Face aux alertes météorologiques, Oliva a fait une pause tandis que Valence poursuit la compétition

Deux semaines après les inondations meurtrières qui ont touché la région de Valence, en Espagne, le bilan fait état d’au moins deux-cent-vingt-quatre morts et de milliers de sinistrés peinant à se reconstruire. Alors que de nombreuses manifestations sportives ont été annulées ou reportées, la proscription ne s’est pas appliquée à la sphère équestre et à deux tournées majeures espagnoles. Alors que la région a été placée en vigilance rouge pour les pluies le 13 novembre, les organisateurs du Mediterranean Equestrian Tour (MET) ont annulé les épreuves hier et d’aujourd’hui. À Valence, le Moura Tours n’a lui jamais cessé de battre son plein, malgré sa proximité avec l’épicentre des premières inondations. Différents acteurs de ces rendez-vous livrent leurs versions.



Pour la première fois depuis le début de la catastrophe naturelle qui touche mortellement certaines régions de la côte espagnole, les organisateurs du Mediterranean Equestrian Tour (MET) ont été contraints d’annuler les épreuves hier et aujourd’hui à la suite de pluies diluviennes qui se sont abattues sur Oliva. 

Arrivé sur place pour concourir ce matin, Thierry Rozier témoigne de cette situation imprévue et décrit les efforts des organisateurs pour gérer les conditions climatiques extrêmes. “Je me suis levé à 4h30 aujourd’hui pour prendre mon avion, et une fois arrivé, j’ai vu que la journée de concours à Oliva avait à nouveau été annulée en raison des pluies torrentielles, comme hier. La météo a été particulièrement violente et on m’a envoyé des images impressionnantes. Sur place, les organisateurs attendent encore que l'eau se retire des pistes. Cela fait treize ou quatorze ans que je me déplace sur ce concours, et l’organisation à Oliva est toujours remarquable. Ils savent gérer ce genre de situations et disposent de plans de secours efficaces. Ceux qui sont déjà sur place m’ont confirmé que tout est bien pris en main. En arrivant au secrétariat, j’ai posé la question qui semblait évidente: pourquoi le concours de Valence continue-t-il, malgré les inondations qui frappent la ville et ses environs depuis des semaines? Là-bas, on m’a expliqué que c’était une demande de l'État. J’étais assez étonné, mais c’est bien la réponse qu’on m’a donnée. L’État espagnol aurait demandé le maintien des événements pour soutenir l'économie locale et que les gens puissent rebondir, même dans des conditions difficiles”. 

À Oliva, le cavalier de Bois-le-Roi a rapidement pu observer les mesures exceptionnelles mises en place face à ce nouvel épisode de pluies. “Huit cents policiers ont été logés dans des hôtels réquisitionnés pour prêter main-forte aux opérations de nettoyage et aux secours. La solidarité est impressionnante!”



“La météo est typique de journées d’octobre, comme nous en avons chaque année”, António Moura

Le 30 octobre, lendemain des inondations meurtrières qui ont touché la région de Valence faisant au moins deux-cent-vingt-quatre morts, les organisateurs du Moura Tours, opéré par le Portugais António Moura, ont publié sur les réseaux sociaux un message à première vue rassurant : “Tout va bien ici ! Malgré le temps pluvieux d'hier à Valence, le concours continue aujourd'hui sous un ciel ensoleillé et une brise agréable. Merci à tous pour les messages et préoccupation. Nous sommes là pour trois semaines de plus, pleins d'énergie et prêts pour la suite !” Une publication qui a semblé pour certains mal venue face au drame qui s’est produit à quelques kilomètres de là, au Sud-Est de la ville. La compétition, située à moins de dix kilomètres au Nord, a été maintenue malgré tout. 

Le 3 novembre, les organisateurs du concours international ont finalement annoncé avoir mis en place une collecte de dons : “Nous avons besoin de votre soutien pour aider les victimes de la tragédie à Valence. Nous recueillons des produits alimentaires, produits d’hygiène et de nettoyage pour les familles et les animaux touchés. […] Ensemble, faisons la différence ! Chaque don compte.” Une initiative remarquée, mais assez vivement critiquée compte-tenu de la publication précédente. Le Moura Tours n’a jamais cessé d’accueillir des épreuves. 

Hier, deux semaines après le drame, la région de Valence a été mise en vigilance rouge en vue des pluies diluviennes qui se préparaient. “Malgré les alertes reçues sur nos téléphones, nous n’avons eu aucune pluie ou inondation ici, dans le Nord de Valence”, explique le Français Didier Gonde, président du jury du CSI 4*, CSIYH-1* et CSI 1*. “C’est comme s’il ne s’était rien passé... Il est vrai qu’à vingt kilomètres au Sud, les dégâts ont été bien plus importants, voire meurtriers... Personne ne nous a empêché de maintenir le concours. […] En tant que président du jury, je ne peux pas annuler les épreuves sans que l’on me demande de le faire. Je n’ai jamais reçu de papiers officiels me demandant de tout arrêter. L’organisateur a décidé de poursuivre son concours sous contrôle de l’État et en accord avec la FEI, qui a approuvé la conformité et la non-dangerosité des installations. Une partie des boxs a même été réquisitionnée pour les chevaux de la gendarmerie. Rien sur le lieu de compétition ne nous obligeait à prendre une telle décision.”

António Moura, organisateur de la série hivernale à Valence, abonde en ce sens. “Nous n'avons pas eu d'inondation ici, tout est normal. Nous continuons à faire sauter des chevaux tous les jours, sans aucune annulation. La météo est typique de journées d’octobre comme nous en avons chaque année. Tout ce que vous voyez à la télévision, c'est de l'autre côté du Turia (le fleuve au Sud du centre historique de Valence qui se jette dans la mer Méditerranée, ndlr). Là-bas, les inondations sont catastrophiques et désastreuses. Notre concours est au Nord de la ville. Ici, il ne se passe rien, comme dans le centre-ville de Valence d’ailleurs... Cette désinformation est causée par la presse espagnole”. 

Interrogé ensuite sur le dilemme moral qu’implique la tenue d’un concours alors que des centaines de personnes perdent ou ont perdu la vie à quelques kilomètres, et pendant que d’autres peinent à se reconstruire après des semaines de traumatisme, Antonio Moura a préféré couper court à la conversation. “Nous avons œuvré avec beaucoup de monde pour venir en aide aux sinistrés, mais nous ne pouvons pas nous arrêter de travailler. Ceux qui vont bien doivent justement continuer à travailler pour pouvoir aider les autres”