Sur la route des Européens, les Néerlandais battent la France sur le fil à Rotterdam
Entre la pression du circuit et surtout celle de bien figurer à quelques jours des annonces de sélections pour les Européens de La Corogne, le sport a été palpitant aujourd’hui à Rotterdam. Au terme d’une épreuve à suspense, les Bataves ont supplanté de trois points la France, qui a pu compter sur Jeanne Sadran et Dexter de Kerglenn, bien rassurés après leurs incertitudes bauloises.
L’ESSENTIEL
Aujourd’hui à Rotterdam, où se tenait la troisième étape de la saison des Ligues des nations Longines, la tension était particulièrement forte ; non seulement les nations engagées devaient s’illustrer pour bien figurer au classement général du circuit de la Fédération équestre internationale (FEI), mais bon nombre de cavaliers étaient aussi scrutés par leurs chefs d’équipes en vue des sélections pour les championnats d’Europe Longines de La Corogne. Dans moins d’un mois à La Corogne, en Espagne, les Suédois et Steve Guerdat remettront leurs titres en jeu, et quelques prétendants aux médailles d’or se sont démarqués aujourd’hui.
Inauguré en 2024, le format de la FEI a tenu sa promesse aujourd’hui en Hollande : le suspense a été total jusqu’au passage de l’ultime cavalier. Partis sur d’excellentes bases en première manche avec cinq points au compteur, les Pays-Bas et la France ont mené une bataille acharnée. Sous un grand soleil, les locaux n’ont rien lâché dans la seconde manche, dans laquelle seuls trois des quatre cavaliers sont choisis par le sélectionneur. Si Maikel van der Vleuten et Kim Emmen, respectivement sur leurs métronomes Beauville Z et Imagine, n’ont pas du tout alourdi le score de leur équipe, Nina Mallevaey et Jeanne Sadran ont aussi réussi à être impeccables en seconde manche avec Nikka vd Bisschop et Dexter de Kerglenn. Toute la pression est donc retombée sur les épaules d’Harrie Smolders et Kevin Staut. Avec le très régulier Monaco, récent vainqueur de l’étape du Longines Global Champions Tour de Monaco, le premier a fait bruisser les tribunes – clairsemées mais investies – en laissant à terre le vertical n°9 et en écopant d’un point de temps dépassé. De quoi laisser un peu d’air, cinq points exactement, à Kevin Staut. Ultime partant, le Normand et Visconti du Telman, troisièmes de la finale de la Coupe du monde de Bâle en avril, ont fauté dès le deuxième vertical, faisant réagir le public. Les Bataves se sont même montrés franchement antis sport en se réjouissant de la faute de la jument de seize ans sur le second élément du double n°8. Un manque de fair-play dont ne s’est pas formalisé le Français. “C’est comme ça, nous savons qu’ici en Hollande ils sont peut-être encore plus chauvins que nous. Honnêtement, ça ne m’a pas perturbé, même si je l’ai entendu. Nous terminons à une bonne deuxième place, les filles (Nina Mallevaey et Jeanne Sadran, ndlr) ont fait un superbe boulot, et en ce qui me concerne, ma jument remonte en puissance”, a réagi le champion olympique par équipes de Rio de Janeiro.

SI la rivière de La Baule leur a fait défaut, Jeanne Sadran et Dexter de Kerglenn ont été impeccables face à celle de Rotterdam.
© Leanjo de Koster/FEI
LES TOPS
Mathématiquement, Maikel van der Vleuten et Jeanne Sadran ont été les meilleurs de l’épreuve puisqu’ils ont été les seuls à trouver par deux fois la clé du sans-faute sur le parcours très relevé du local Bart Vonck. Si la réussite du Néerlandais n’est pas une surprise, celui-ci étant en selle sur l’excellent Beauville, médaillé de bronze individuel aux Mondiaux de Herning et aux Jeux olympiques de Paris, la copie parfaite de la Toulousaine n’était pas tout à fait une évidence. En couverture du numéro en kiosques du magazine GRANDPRIX, la jeune femme avait en effet connu une Coupe des nations compliquée il y a deux semaines à La Baule, fautant à deux puis trois reprises. Sur un Dexter de Kerglenn des grands jours, Jeanne Sadran n’a rien lâché et montré qu’elle était plus motivée que jamais à l’idée de décrocher sa première sélection pour ses potentiels premiers championnats d’Europe Seniors. “J’ai beaucoup aimé la réaction de Jeanne à la suite du concours de La Baule, où elle avait connu des petits problèmes avec la rivière et les obstacles suivants. Elle a bien monté et analysé tout cela. Je suis très content de cette performance-là”, s’est réjoui le sélectionneur et chef d’équipe tricolore Édouard Coupérie.
Plus largement, saluons les scores encourageants des jeunes pousses engagées dans cette épreuve, qu’il s’agisse de l’Italien Giacomo Casadei sur Marbella du Chabli, des Irlandais Seamus Hughes Kennedy avec ESI Rocky et Tom Wachman associé Tabasco de Toxandria et son geste surnaturel, ou encore du très solide belge Thibeau Spits sur Impress-K van’t Kattenheye. Impossible de ne pas mentionner également la Tricolore à qui tout réussit, Nina Mallevaey, sortie de piste avec cinq points avant de redresser la barre avec un sans-faute sur la démonstrative Nikka van de Bisschop. En cette année post-olympique et sans pression de qualification, la relève a bien compris qu’il s’agissait de la saison ou jamais pour saisir sa chance.

Avec une seule faute en première manche aujourd’hui, Seamus Hughes Kennedy et ESI Rocky font indiscutablement partie des révélations de l’année.
© Leanjo de Koster/FEI
LES FLOPS
La pilule sera en revanche dure à avaler pour la Suède et la Suisse, deux nations pourtant solides mais qui n’ont pas réussi à se qualifier pour la seconde manche aujourd’hui. En l’absence de leurs piliers, les équipes d’Henrik Ankarcrona et Peter van der Waaij ont accumulé des scores lourds, terminant respectivement avec vingt et vingt-neuf points. Premier à partir, le Genevois Édouard Schmitz a notamment concédé vingt points de son fidèle Gamin van’t Naastveldhof, tandis que son compatriote Adrian Schmid n’est pas allé au bout de son parcours. Très proche de l’entrée du double n°8, le gris Chicharito 11 n’a pu sortir de la combinaison, et s’est également arrêté face à l’oxer n°11. Septième du Grand Prix du CSIO 5* de Saint-Gall et auteurs de parcours à huit et un point dans la Coupe des nations du CSIO 5* de La Baule, le duo ne s’est pas montré en phase aujourd’hui.
Janne Friederike Meyer-Zimmermann n’est pas non plus allée au bout du premier tour. Après deux fautes puis un refus de Messi van’t Ruytershof dans le triple, l’Allemande a préféré abandonner.
Enfin, Jos Verlooy a montré un parcours extrêmement poussif sur Parise van den Dael, visiblement à l’effort en multipliant les sauts totalement démesurés, ce qui était encore plus frappant des tribunes. Semblant lasse de donner autant, la baie de dix ans par Zazu a refusé de tourner face au double, puis conclu le tour avec dix-huit points de pénalité. Un parcours dont le sport, scruté de toutes parts, se serait bien passé.

Sur la touche pour la seconde manche en raison de deux fautes de Grandorado, Willem Greve félicite son coéquipier Maikel van der Vleuten.
© Leanjo de Koster/FEI
LES BLEUS
Outre la performance remarquable de Jeanne Sadran et le bon clear round de Nina Mallevaey, Kevin Staut se satisfait du sans-faute en première manche de sa fidèle fille de Toulon, qu’il jugeait encore sur le retour au CSIO 5* de Rome.
Avec Make My Day*du Gèvres, Marc Dilasser espérait sûrement marquer de précieux points dans une quête de potentielle sélection européenne aujourd’hui. Malheureusement, le Normand et sa grise sont restés sur le banc en seconde manche après avoir fauté à trois reprises dans la première. “Marc Dilasser a très bien commencé le parcours mais s’est trouvé un tout petit peu loin de la palanque n°6 qui suivait la rivière en raison d’un tracé un peu extérieur. Sa jument ne s’est ensuite pas tirée du tout dans le triple, où elle a fauté sur le deuxième élément. Elle est encore tendre et a besoin d’engranger de l’expérience. Dimanche, elle courra le Grand Prix. Nous voulons absolument la suivre pour l’avenir”, a commenté Édouard Coupérie.