“Un moment clé de l’évolution du sport”, Dominique Mégret

Ce week-end, Dominique Mégret a été nommé président du Club des propriétaires. Jusqu’alors à la tête de ce groupement, Christian Baillet a en effet passé le pouvoir au propriétaire du haras de Clarbec, qui soutient notamment Pénélope Leprevost. Déjà membre du comité exécutif du Club International des propriétaires des chevaux de saut d’obstacles (Jumping Owners Club), Dominique Mégret accède à son titre dans un contexte particulier. Bien décidé à participer activement à l’évolution du sport, il s’est confié à GRANDPRIX-Replay.



GRANDPRIX-Replay : Votre candidature est en prolongement avec vos activités antérieures et de votre implication, s’agit-il d’un cheminement naturel pour vous ?
Dominique Mégret : Oui tout à fait, à partir du moment où Christian Baillet a souhaité prendre du recul, ma candidature était naturelle. J’étais très impliqué dans le Jumping Owners Club car j’étais jusqu’alors membre du comité exécutif. J’ai beaucoup participé aux prises de positions, aux réflexions et aux discussions avec les organes dirigeants comme la Fédération équestre internationale. Je pense que je pouvoir apporter une vision un peu différente, tout en conservant ma passion qui est extrêmement forte. Nous sommes dans un moment clé de l’évolution du sport. Je pense d’ailleurs qu’il ne faut pas se mettre en travers de ces évolutions. Il faut essayer de les comprendre, les analyser, les suivre, mais surtout essayer de trouver un équilibre entre l’ancien et le nouveau monde. Tous les nouveaux circuits ont beaucoup apporté à notre sport, l’argent de ces nouvelles compétitions a indiscutablement aidé les cavaliers et c’est une bonne chose. Cependant, l’argent ne doit pas tout diriger et il faut garder en tête les valeurs fondamentales du saut d'obstacles. Il est par ailleurs nécessaire de pouvoir faire émerger de nouveaux cavaliers. Pour nous propriétaires, l’important est de trouver cet équilibre entre les nouveaux et les anciens circuits. La mission que je me donne est la suivante : j’ai la volonté que la voix et les points de vue des propriétaires soient écoutés et éventuellement entendus. Quand on représente une organisation, on doit la représenter dans sa globalité et ne pas faire prévaloir son propre point de vue.

GPR. :  Combien de membres le Club des propriétaires compte-t-il ? 
D.M. : Il y a environ une centaine de membres, mais c’est un chiffre qui devrait croître. Je précise que je parle de propriétaires purs, sans intégrer les marchands de chevaux et les cavaliers qui font du commerce. Par contre, le Club représente les propriétaires de tous les pays du monde, qu’ils viennent des Etats-Unis, d’Asie ou d’Europe, même s’il y en a objectivement plus en Europe. Nous représentons également les propriétaires de chevaux engagés dans des CSI 2* aux CSI 5*, une diversité qui engendre des réalités de terrains différentes. Nous sommes conscients que nous devons faire évoluer les chevaux et permettre à des cavaliers d’émerger, mais cela ne peut pas se faire qu’avec de l’argent. Il est vraiment important de ne pas décourager les jeunes cavaliers dans leur objectif d’accession au haut niveau, cela représente un véritable enjeu.

GPR. : Cela ne vaut-il pas également pour les propriétaires ?  
D.M. : Si bien sûr, de la même manière, les propriétaires ne doivent pas se décourager. L’équilibre est possible, simplement c’est une voie délicate mais y parvenir est notre objectif.

GPR. : Cela ne pose-t-il pas de problème qu’un Français succède à un Français ? 
DM : Non je ne pense pas, j’ai été élu à l’unanimité après tout. Même si je suis Français, je ne me considère pas comme tel dans ma démarche et ma responsabilité. Mais je comprends les logiques des autres propriétaires venant d’autres pays.  


“Suivre de très près l'évolution du monde équestre”

GPR. : Le fait que Kevin Staut, lui aussi Français, vienne d’être élu à la tête du Club international des cavaliers (IJRC) peut-il faciliter les relations entre les deux organes ?
DM : Non je ne crois pas, il s’agit un hasard puisqu’il n’y a pas de coordination entre ces élections. Bien évidemment, le Club des propriétaires considère qu’il faut avoir une bonne relation avec la FEI afin de pouvoir avoir des discussions constructives. Il ne s’agit pas d’un rapport de force, mais d’une logique de collaboration. Bien évidemment, cela doit se faire en lien très étroit avec le Club des Cavaliers. Mais le fait que le président soit Français ou étranger ne change pas le débat, car de toute façon il y a des réunions régulières entre nous. Nous sommes profondément d’accord sur beaucoup de points, mais pas sur tous. Le Club des propriétaires doit aussi communiquer avec les organisateurs parce qu’il y a aussi des sujets sur lesquels nous devons nous améliorer. Nous n’avons aucun moyen juridique d’imposer nos vues, nous ne pouvons donc le faire qu’avec de la conviction et des bons arguments. Un MoU (protocole d’entente) entre le Club et la FEI nous donne des possibilités de rencontres, et éventuellement une possibilité de participation en tant qu’auditeur aux réunions du comité de saut d’obstacles.

GPR. : Quels sont vos priorités et vos objectifs dans les mois qui viennent ? 
D.M. : La priorité du comité exécutif, c’est que notre voix soit entendue. Je ne dis pas que ce n’était pas le cas jusqu’alors, mais nous allons travailler sur notre capacité de communication. Cela passe par des discussions avec les différentes instances, et notamment avec la FEI, qui a une place fondamentale dans ce cadre. Ma seconde priorité, qui va de pair avec la première, c’est de suivre de très près l’évolution du monde équestre. Le monde de la compétition change extrêmement vite depuis quelques années et ce mouvement s’accélère. Il faut donc participer à cette recherche d’équilibre entre les CSIO, les CSI classiques, et les nouvelles séries. Certains souhaitent que le système d’invitation 60-20-20 (toutes les  explications sur ce système ICI) soit appliqué pour tous les concours, y compris pour les nouveaux circuits. Évidemment, y parvenir permettrait de régler tous les problèmes mais je ne suis pas sûr que cela se produise tout de suite. Attention toutefois, certains propriétaires peuvent avec une vision différente. Mais globalement, en tant que propriétaire, nous sommes tous d'accord pour dire que le bien-être des chevaux doit être sauvegardé car le sport devient pour eux de plus en plus difficile.

GPR. : Qu’en est-il du débat au sujet du classement mondial ? 
D.M. : Il y a un groupe de travail qui a été lancé et qui va regrouper les cavaliers et la FEI, ce qui est assez logique car ce sont les deux instances directement concernées. Nous avons demandé à la FEI un droit d’observation sur ces échanges mais il nous a été refusé. Dans une certaine mesure, cela a pourtant une incidence sur les chevaux. Là où nous avons une vision différente par rapport à certains cavaliers, c’est que nous aimerions que les Coupes des Nations soient mieux rémunérées. Aujourd’hui, les cavaliers ont moins de points pour le classement mondial lorsqu’ils gagnent un Grand Prix de CSIO que lorsqu’il gagne une épreuve de vitesse dans un concours très bien doté. Je trouve cela un peu dommage et je pense que les cavaliers vont se pencher sur cette question. La chose fondamentale reste tout de même le système d’invitation de 60-20-20. Dans certains sports, les ligues sont complètement séparées, et je trouverais cela un peu dommage si jamais cela arrivait.