« L’aide de Nicolas Delmotte m’est indispensable », Benoit Cernin
C’est LA révélation française de 2017. À vingt-huit ans, Benoit Cernin a conquis l’Hexagone cette année, en raflant tout sur son passage sur le circuit du Grand National et en obtenant pour la première fois de sa carrière des sélections en équipe de France. Encore très en forme à Paris le week-end passé, le talentueux cavalier a obtenu son sésame pour concourir au mythique CHI de Genève dans deux semaines. C’est dire si sa progression a été fulgurante ! Pour GRANDPRIX-REPLAY, Benoit Cernin est revenu sur son week-end parisien, sur sa superbe saison et a évoqué son système et ses chevaux. Entretien avec un pilote dont on devrait entendre parler dans les mois qui viennent.
Benoit Cernin : À la base il n’était pas prévu que j’aille à Paris, mais Philippe Guerdat m’a proposé d’aller à Genève, donc pour garder les chevaux en forme je me suis dit que Paris serait une préparation idéale. Je n’ai pas été pris dans le CSI 2* donc j’ai fait le national avec six chevaux qui ont obtenu de nombreux classements. Unamour (du Suyer, ndlr) a été classé sur ses trois parcours, Uitlanders (du Ter, ndlr) a été à la remise des prix à deux reprises, et les autres ont tous obtenu un classement donc je suis vraiment content.
Je n’étais jamais allé au Salon du cheval de Paris, que ce soit comme spectateur ou comme cavalier. C’était une première et j’ai été vraiment agréablement surpris. Je suis habitué au concours de Lyon car je n’habite pas très loin, et je n’ai vraiment pas été déçu par Paris. L’organisation était super, le site également. Tout est au point, que ce soit aux boxes, sur la piste, tout était parfait !
GPR : L’âge de vos chevaux est plutôt très homogène ce qui vous permet de les faire évoluer en même temps, comment avez-vous construit cette écurie ?
B.C. : Le seul cheval que j’ai construit depuis le début est Uitlanders. C’est mon meilleur cheval aujourd’hui, et c’est un peu normal car je le monte depuis qu’il a cinq ans et que je le connais vraiment par cœur. Les autres chevaux sont quasiment tous arrivés l’hiver dernier, seuls deux d’entre eux ont intégré mes écuries en cours d’année. Uitlanders n’est pas à vendre ce qui permet d’envisager une carrière de sport à long terme. Au départ, je l’ai emmené sur de beaux concours et il était assez anxieux et ému. Aujourd’hui, il a passé un vrai cap et n’a plus peur, donc c’est vraiment quelque chose de primordial pour participer à de gros concours. Dorénavant, il me fait confiance à deux-cent pour-cent. Tea Star d’Oyale est à la commercialisation, et Unamour est pour le moment dédié au sport, nous verrons avec ses propriétaires les projets pour la suite en fonction de son évolution.
GPR : Vous êtes engagé pour concourir au CHI de Genève dans deux semaines, comment avez-vous obtenu une place pour ce concours mythique ?
B.C. : Philippe Guerdat m’a appelé en me disant qu’il avait une place pour Genève. Je lui ai directement dit oui, même s’il m’a dit d’y réfléchir ! Je n’aurai pas le droit de courir la première épreuve qualificative pour le Grand Prix qui regroupera tous les ténors. Mais je pense que prendre le départ d’un tel Grand Prix serait un peu prématuré pour Uitlanders et moi. Par contre, avoir l’opportunité de courir toutes les autres épreuves représente une bonne préparation pour la suite. J’ai eu la chance d’aller aux CSI de Drammen, Chantilly, Hickstead, Saint Gall, et ce sont vraiment des concours qui permettent d’évoluer, tant pour moi que pour les chevaux. Cela donne d’excellents indicateurs pour savoir ce qu’il faut travailler à la maison. J’ai actuellement beaucoup de chevaux, je vais donc essayer de préparer ma saison 2018 au mieux. C’est encore assez vague, nous verrons quels chevaux seront vendus ou non cet hiver.
“Les chevaux ont répondu présent à chaque fois”
B.C. : Cette année sur le Grand National a été vraiment top ! Au début de la saison, nous avions convenu avec Romain que nous devrions faire toutes les étapes. Il n’a finalement pas pu en faire beaucoup car il a dû faire des choix. Pour ma part, mes chevaux ont été performants à presque tous les concours ce qui était super. C’est vraiment un niveau d’épreuve qui permet de bien les former. Nous pouvons toujours en emmener beaucoup, et pour preuve nous en avons emmené quatorze à Barbaste, ou encore douze au Mans. L’année prochaine s’organisera en fonction des chevaux. J’aimerais bien me lancer un peu plus sur de gros concours, et les Grands Prix du Grand National serviront à former les chevaux qui auront neuf ans.
GPR : Justement, comment jugez-vous le potentiel de Vimala de Ponthual, Version de Laume, Vackanda de Lojou ou encore Vasco vh Jukschot Z, vos chevaux qui prendront neuf ans en 2018 ?
B.C. : Ce sont quatre chevaux qui ont un super potentiel, et j’espère qu’ils prendront le relai. Tant qu’ils n’ont pas concouru sur de grosses épreuves, c’est difficile à dire s’ils seront de la trempe des plus grands, mais le sentiment sur leurs dos est vraiment bon aujourd’hui. Ce sont des chevaux très respectueux qui ont des gros moyens. Vasco vh Jukschot Z est un peu plus difficile que les autres, mais je pense qu’il est du niveau d’Uitlanders. Tous les quatre ont vraiment un fort potentiel, et en ce moment ils ne ratent pas grand-chose. Je veux parfois aller un peu trop vite et ils ne sont pas toujours prêts, mais dans l’envergure et le rayon ils sont vraiment excellents. L’an prochain, ils devraient répéter les belles performances dans les Grands Prix du Grand National.
GPR : Vous avez connu une ascension assez exceptionnelle cette année qui vous a permis de prendre part à plusieurs CSI 5* notamment. Comment avez-vous vécu cette progression ?
B.C. : Dans l’ensemble tout s’est vraiment bien passé. Philippe Guerdat m’a proposé d’aller au CSIO 3* de Drammen ce à quoi j’ai immédiatement répondu oui, puis tout s’est un peu enchainé au rythme des performances réalisées. Les chevaux ont répondu présent à chaque fois. Sur le Grand National ils n’ont quasiment rien loupé, puis tout s’est fait au fur et à mesure. Au début, ni les chevaux ni moi n’avions l’expérience car je débute tout juste. Mais il n’y a pas eu de catastrophe, et j’ai pris le soin de ne pas les user. C’était vraiment quelque chose de primordial pour moi, et c’est quelque chose d’un peu stressant au départ car on ignore un peu à quelle sauce on va être mangé sur les grosses compétitions. Les autres cavaliers sont habitués à ce rythme car ils y sont soumis tous les week-ends, donc au début c’est un peu compliqué d’avoir des repères, puis on prend le rythme au fur et à mesure. Je ne voulais surtout pas faire ces concours si les chevaux n’étaient pas prêts.
GPR : Comment est construit votre système et quelle est l’organisation au sein de vos écuries ?
B.C. : Ma femme et moi sommes installés depuis une dizaine d’années à Génelard, en Saône-et-Loire. À la base, la structure était une ferme car nous travaillions avec mes parents qui élevaient des chèvres. Puis au fur et à mesure, tout s’est transformé jusqu’au moment où nous avons dû faire un choix face au nombre croissant de chevaux que nous avions au travail. Étant vraiment passionnés, mes parents ont fait le choix de sacrifier leur activité pour que nous puissions nous consacrer aux chevaux. Depuis, toutes les installations ont été transformées : nous avons agrandi la carrière et construit un manège. Cela fait trois ans que ma femme s’est lancée en dressage. Nous formons un bon binôme car elle est vraiment très forte pour travailler les chevaux sur le plat, et elle m’aide également beaucoup à l’obstacle en me conseillant. J’essaye d’avoir une base solide afin de pouvoir aller encore plus haut et monter d’un cran à chaque fois. En trois ans, le système s’est vraiment bien mis en place, mais il faut que l’on arrive à stabiliser tout cela en trouvant de très bons chevaux pour percer au plus haut niveau. Jusqu’à aujourd’hui nous avons été assez autonomes, mais il est assez difficile de s’en sortir seul. Heureusement, je travaille avec Carlos Pinto sur le plat et Nicolas Delmotte à l’obstacle, mais je ne peux pas le voir souvent étant donné qu’il habite loin. Lorsque nous sommes sur les mêmes concours, nous échangeons beaucoup. Il est vraiment très fort et m’a beaucoup aidé, son aide m’est indispensable ! J’aimerais le faire revenir cet hiver, mais il est très occupé avec tous ses chevaux.