Le projet EUnetHorse avance vers une meilleure adaptation des structures équestres au changement climatique

La deuxième journée de démonstration du projet EUnetHorse s’est déroulée le 30 septembre à Cornillon-Confoux, dans les Bouches-du-Rhône. Une cinquantaine de participants se sont rassemblés lors de cet événement organisé par l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) pour découvrir les solutions évaluées par le projet européen sur la thématique de l’adaptation des exploitations agricoles équines au changement climatique.



La deuxième journée de démonstration d’EUnetHorse, organisée par l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE), coordonnateur européen de ce projet, a eu lieu à Cornillon-Confoux, dans les Bouches-du-Rhône. Lancé en mars 2023, EUnetHorse regroupe des participants de neuf pays européens, et un total de quinze partenaires. Lors de la première phase du projet, des thématiques ont été définies et réparties. Pour la France, l’adaptation des exploitations au changement climatique a été retenue, les exploitants français interrogés en ayant fait un besoin prioritaire. Ce projet a pour objectif de “partager les solutions et bonnes pratiques qui permettent d’améliorer la performance et la résilience des exploitations agricoles équines européennes”. Les deux premières phases, dédiées successivement à l’identification des besoins et à l’identification des solutions, ont été clôturées avec succès. La troisième, consacrée à l’évaluation des solutions, devrait aboutir fin 2026.

Aux écuries de Riboulam, le public concerné, une cinquantaine de personnes, était constitué de professionnels de la filière équine, d’exploitants, de futurs exploitants, de conseillers et de formateurs. Dans un premier temps, ils ont pu découvrir les premiers résultats du projet EUnetHorse, et une partie des solutions et bonnes pratiques évaluées positivement. Présentant des profils très hétéroclites, les participants, répartis en groupes de façon aléatoire, ont participé aux ateliers proposés: connaître les propriétés de son sol, réduire la chaleur au sein des écuries, créer un modèle de production d’énergie (photovoltaïque), collecter l’eau de pluie et établir un diagnostic carbone. À l’issue de ceux-ci, les participants ont pu évaluer la présentation des solutions et initiatives présentées, ainsi que leur faisabilité dans leurs structures. 

Des initiatives innovantes ont retenu l’attention, parfois simples et juste de bon sens, comme celles proposées pour réduire la chaleur régnant dans les écuries ou l’utilisation de sols alternatifs à base de bois broyé, permettant une conséquente économie d’eau. Cette solution, encore assez coûteuse, a fait des adeptes chez les gérants de centres équestres. Dans une région particulièrement impactée par les épisodes de sécheresse, la gestion de l’eau s’impose comme une problématique essentielle. À ce titre, la récupération d’eau, qu’elle soit issue des pluies ou semi-usées (provenant de la douche des chevaux, par exemple), pour arroser les carrières, peut paraître intéressante. Mise en œuvre par les écuries hôtes de cette journée, cette initiative pose tout de même un problème de taille: la réglementation sanitaire l’interdit. En effet, dans un établissement recevant du public (ERP), seule l’eau potable peut être utilisée pour arroser, selon l’article R211-126 d’un décret daté du 29 août 2023.

Le site de Riboulam, dans les Bouches-du-Rhône, dispose d'un système de récupération et de phytoépuration des eaux de pluie et issues des douches des chevaux.

Le site de Riboulam, dans les Bouches-du-Rhône, dispose d'un système de récupération et de phytoépuration des eaux de pluie et issues des douches des chevaux.

© Solenn Rispail/IFCE



Fabien Rivera, un précurseur

Le site de Cornillon a permis aux participants de voir des réalisations pratiques des solutions présentées, Fabien Rivera étant innovateur à ce sujet. La famille Rivera possède les écuries de Riboulam depuis près de quarante ans. Ayant succédé à ses parents, Fabien en assume la direction depuis une quinzaine d’années, en collaboration avec sa sœur. Et comme partout dans les Bouches-du-Rhône, l’eau est ici un bien précieux. “L’eau utilisée dans les écuries provient d’un forage. Elle est filtrée et traitée pour être de catégorie A. Nous disposons de deux carrières, un grand manège et un petit, et un parcours de cross. L’été, nous n’utilisons pas la grande carrière (80 x 60m) car son arrosage demande de trop grandes quantités d’eau. C’est pourtant un sable de rivière, moins gourmand que les sables actuels. Seul le grand manège est équipé de sable Bord Sol, car il n’est pas obligatoire de l’arroser lorsqu’il est fermé.”

Confronté à la consommation d’eau des douches lors des vacances de printemps ou des journées de compétition, le dirigeant a imaginé un système de récupération. “J’avais procédé à une évaluation et cela peut représenter 5 à 6.000 litres d’eau par jour, d’où l’idée de la récupérer.” Un projet a été mis en place avec l’entreprise InphytO, spécialisée dans les processus d’épuration naturelle. Les demandes de subvention ayant été refusées, le projet a pu être concrétisé grâce au mécénat. Ainsi, l’eau récupérée à la sortie des douches subit une première filtration verticale dans un bassin contenant des plantations aquatiques spécifiques et des micro-organismes choisis par des spécialistes selon des critères très pointus, puis elle est transférée vers un autre bassin avec une filtration horizontale, selon le même procédé. “La phytoépuration n’utilise aucun produit chimique”, précise le Provençal. L’eau ainsi filtrée est de catégorie C, ce qui permet actuellement d’arroser... les arbres de la propriété. Pour que l’eau soit considérée de catégorie A, ce qui permet de la réutiliser pour arroser les carrières et doucher les chevaux, le processus doit être complété par une biofiltration, un traitement UV et une microfiltration, consommant peu d’énergie et toujours sans produits chimiques.

Riboulam, pour les cavaliers de la région, et des régions voisines, c’est surtout un terrain de cross de qualité, particulièrement rare dans le sud-est de la France. Fort de son expérience en matière d’entretien des pistes, Fabien Rivera en est venu à doter son petit manège d’un sol en bois. “Cela n’a rien à voir avec le sol expérimental de Deauville présenté – c’est beaucoup plus sommaire – mais ça nous permet de travailler. J’ai couvert le sol et le sable résiduel de bois de palettes broyé. Cela fonctionne bien sur le cross, l’humidité est retenue et il y a une production d’humus qui permet d’alimenter la végétation environnante et ensuite de créer de l’ombre et de l’humidité dans un cercle vertueux. Le sol du manège a été conçu il y a trois ans et nous n’avons encore jamais rajouté de matière jusqu’à présent. Je le ferai probablement cette année. Durant toute la saison estivale, nous n’avons arrosé le sol qu’à cinq reprises”, conclut-il.

À la fin de la journée, chaque participant a remis à l’équipe organisatrice une évaluation, de la journée comme de chacune des solutions et bonnes pratiques présentées, qui remontera au niveau européen et dont les retours seront intégrés aux résultats à l’échelle européenne. “Il est important pour nous, exploitants, de participer à des journées comme celles-ci. Nous recherchons en permanence des exemples pour améliorer notre travail face au changement climatique”, explique Julien Aussel, co-dirigeant du centre équestre Equi-P dans l’Hérault. “J’avais déjà pu rencontrer des experts de l’IFCE pour parler des sols en bois. Cette journée nous a donné l’occasion de découvrir de nouvelles solutions qu’on ne connaît pas forcément. Par exemple, j’ai trouvé vraiment intéressant de voir le système de traitement des eaux de douche, que j’aimerais vraiment mettre en œuvre chez moi.”