’’L'harmonisation, ça peut être un avantage’’, Olivier Robert

Au milieu de la grogne des cavaliers, une voix se fait entendre à peu à contre-courant. Cette voix, c’est celle d’Olivier Robert. L’Aquitain, qui connaît très bien le système des États-Unis pour y avoir vécu deux ans, exprime ainsi un point de vue un peu contraire à ceux entendus jusqu’alors. Pourtant, à l’écoute des arguments du cavalier, les solutions qu’il propose semble censées.



Voilà quasiment une semaine que les cavaliers européens font entendre leur mécontentement, après l’annonce par la fédération équestre européenne (EEF) de la volonté de la Fédération équestre internationale (FEI) de vouloir harmoniser le prix des engagements entre Europe et États-Unis. Et s’ils ont si peur, c’est que cette décision pourrait bien faire double, tripler voire quadrupler le montant des engagements en CSI 2, 3 et 4*. La raison ? Aux États-Unis, les engagements se font épreuve par épreuve, en fonction de la dotation. ’’À Wellington, quand je suis allé sauter le CSIO 4* l’an passé, j’ai reçu une facture de 4500$ pour deux l’engagement dans deux épreuve et un boxe ! Je ne peux pas imaginer qu’on en arrive là’’, témoigne Olivier Robert, qui connaît bien le système américain pour avoir passé deux ans en Floride. ’’Ce système d’engagement pas épreuve revient extrêmement cher et, au bout de deux ans, j’ai décidé de rentrer car je ne tenais plus la distance.’’ Dans ces conditions, comment les concours américains font-ils le plein d’engagés ? ’’Ce sont des concours de milliardaires entre amis !’’, résume-t-il.
Alors l’Europe bientôt aux tarifs américains ? ’’Ça peut passer, évidemment, mais j’ai du mal à imaginer que ça aille au bout’’, confie-t-il. Et si, d’emblée, le cavalier, qualifié pour la finale de la Coupe du monde d’Omaha, dans quelques jours, avoue que cette mesure est ’’évidemment catastrophique’’, il n’y trouve pas que des inconvénients. ’’Quand on y réfléchit bien, je ne suis pas sûr qu’il faille absolument passer par les CSI 2* pour former les chevaux jusqu’au haut niveau’’, explique-t-il. ’’Sur ces Grands Prix CSI 2*, on voit toutes sortes de cavaliers : des Amateurs, des Pros, mais également des étrangers venus avec leurs meilleurs chevaux pour gagner des points au classement mondial. Nous, cavaliers, voulons rentabiliser l’engagement et nous participons donc avec des chevaux qui ne sont pas forcément prêts. Au lieu de cela, nous pourrions revenir à de bons concours nationaux où l’engagement est bien moins cher. C’est une meilleure solution pour les éleveurs et les propriétaires.’’ Courir des nationaux n'empêchera, selon lui, d'ailleurs pas ces derniers de vendre des chevaux. "Aujourd'hui, on achète les chevaux sur vidéos. S'il est bon, ça ne change rien que ce soit sur des obstacles nationaux ou internationaux."
Concernant les CSI 2*, Olivier Robert n’est donc pas contre une harmonisation des engagements, qui pourrait revaloriser les concours nationaux, nombreux sur le circuit français. ’’On n’a jamais fabriqué autant de chevaux qu’il y a quinze ans, quand il n’y avait pas de CSI 2* et que nous courrions sur de bons nationaux. Honnêtement, payer 400€ d’engagement pour un cheval de sept ans qui saute des parcours à 1,25m, c’est horriblement cher, surtout quand on peut aller sur un national où l’on paie 120€ d’engagement et 60€ de boxe. Avec cette deuxième solution, les propriétaires s’y retrouvent plus.’’


’’Un véritable avantage d'être français’’

Car, pour le pilote, être cavalier en France est vraiment un avantage, même si cette nouvelle mesure venait à s’appliquer. ’’Cette revalorisation n’est pas réaliste ! L’Europe est une terre d’élevage et on ne peut pas financer un cheval de six ans ou de sept ans à ce tarif. Nous avons tout intérêt à réorganiser de bons concours nationaux, d’autant plus qu’on le fait très bien en France et que ça marche : il n’y a qu’à voir le Grand National, qui fait à chaque fois le plein d’engagés. Si nous étions un pays comme la Grande-Bretagne, qui n’organise pas de concours, je comprendrais que cette décision nous paraisse terrible mais, en France, nous avons vingt concours tous les week-ends et des organisateurs de CSI 2* qui ne savent pas toujours comment financer leur concours ! J’ai bien réfléchi et je persiste à le dire : pour les CSI 2*, ce n’est pas une mauvaise chose si l’on sait réagir.’’
Olivier Robert a également son avis concernant le nouveau système d’invitation, qui va restreindre un peu plus les CSI 5* aux tout meilleurs cavaliers au classement mondial. ’’En France, nous avons la chance d’avoir de bons sélectionneurs et beaucoup de concours. Tout cela fait que, même si on n’est pas dans le haut du classement mondial, on arrive toujours à avoir une place sur de beaux concours. Prenez Quenelle, par exemple. Même si je loin dans le classement mondial, son talent et sa fiabilité ont fait que nous avons toujours pu participer à beaux concours et à des Coupes des nations. Ce n’est certes pas le cas dans tous les pays et c’est un véritable avantage d’être français. Après, personnellement, je n’aurais aucun problème à ne faire des CSI qu’une semaine sur deux, pour aller faire de bons concours nationaux. On prépare les chevaux sur les nationaux et ils vont sauter les CSI 4 et 5* quand ils sont prêts.’’
Pour lui, le passage aux équipes de trois cavaliers dans les championnats est bien plus grave. ’’Ça c’était vraiment grave. C’est une catastrophe ! Désormais, si un cheval est un peu mal, il va quand même devoir sauter. Mais l’harmonisation des engagements, pour les CSI 2*, on peut y trouver des avantages.’’