Le triomphe romain de McLain Ward

Après avoir signé un brillant double sans-faute dans la Coupe des nations de vendredi et remporté hier le Petit Grand Prix, McLain Ward s’est magistralement adjugé le Grand Prix du CSIO 5* de Rome, cet après-midi sur la Piazza di Siena, au cœur des sublimes jardins de la Villa Borghèse. Devançant le Suédois Peder Fredricson, deuxième sur H&M All In, sa compatriote Laura Kraut, troisième sur Zeremonie, mais aussi Simon Delestre, sixième sur Hermès Ryan des Hayettes, l’Américain rejoint le groupe des favoris au sacre olympique avec HH Azur, son exceptionnelle jument de dix ans.



McLain Ward a littéralement survolé les deux manches du Grand Prix.

McLain Ward a littéralement survolé les deux manches du Grand Prix.

© CSIO Roma

Il est venu, il a vu et il a vaincu. C’est peu dire tant McLain Ward a dominé de la tête et des épaules l’incomparable CSIO 5* de Rome. Sur cinq épreuves comptant pour le classement mondial des cavaliers, l’Américain en a remporté trois dont deux à barrage avec le très compétitif HH Carlos Z, jeudi et hier, et surtout la seule qui reste dans les annales, le prestigieux Grand Prix d’Italie, cet après-midi avec HH Azur du Gardens, jument qui a déjà signé l’un des quatre doubles sans-faute de la Coupe des nations de vendredi. Difficile de faire mieux !
Si McLain Ward concourt relativement peu en Europe, il ne traverse jamais l’Atlantique à des fins touristiques. Sa flamboyante victoire d’aujourd’hui n’est d’ailleurs nullement surprenante compte tenu de la trajectoire exceptionnelle du couple qu’il forme avec cette pépite sBs de dix ans, issue du croisement entre Thunder van de Zuuthoeve et Sir Lui. Depuis l’automne dernier, la paire n’a quasiment rien raté, remportant le Grand Prix Coupe du monde de Toronto et un Grand Prix CSI 5* à Wellington fin février, avant de terminer deuxième du dernier Grand Prix CSI 5* du Winter Equestrian Festival, ainsi que de l’étape inaugurale du Global Champions Tour, début avril à Miami. McLain Ward tient enfin la véritable relève de l’inoubliable Sapphire, et une monture olympique qu’il faut sans conteste placer dans le groupe des favoris au sacre individuel, même si bien des choses peuvent encore se produire d’ici la première épreuve des JO de Rio, dans un peu plus de deux mois.
Sous un ciel presque aussi clément que ces deux derniers jours, cinquante couples ont osé défier ce Grand Prix disputé sur un parcours des plus corsés. Échauffé par les vingt-trois sans-faute du Petit Grand Prix d’hier, la maestro Uliano Vezzani a sorti de sa manche trois verticaux à 1,65m dont un défendu par une palanque, un double de verticaux à 1,60m et quelques oxers particulièrement épais et massifs, sans oublier certains contrats de foulées à donner la migraine, dont celui qui s’est imposé aux impétrants entre la rivière et le vertical sur bidet numéro cinq. Ils ont été pas moins de quatorze à échouer face à cette difficulté… dont le double champion du monde et d’Europe en titre, Jeroen Dubbeldam, qui a préféré abandonner après une seconde faute liée à un saut complètement vrillé sur le vertical à palanque numéro sept, précédant le délicat triple. Comme vendredi, SFN Zenith n’a pas du tout semblé dans le coup. Rob Ehrens, le chef d’équipe néerlandais, peut désormais nourrir de réelles inquiétudes quant au pilier de ses derniers grands succès en date.
Ce tracé s’est avéré si sélectif – ce dont témoignent sept abandons, trois éliminations et dix résultats à douze points ou plus – que seuls sept couples ont réussi à le boucler sans y laisser la moindre plume. Le Grand Prix se disputant ici en deux manches, les treize meilleurs ont toutefois pu revenir en piste, ce qui devait ajouter un peu de sel au scénario et ravir le public. En termes de sensations fortes, les quelques milliers de spectateurs abrités dans les tribunes couvertes ou assis sur les buttes entourant la piste ovale ont été servis… pour le meilleur et presque pour le pire…
 


Kent Farrington peut encore se mordre les doigts…

Peder Fredricson a signé une très, très grande performance avec H&M All In.

Peder Fredricson a signé une très, très grande performance avec H&M All In.

© CSIO Roma

 
En lice pour une sélection aux JO avec la Colombie, Carlos Lopez et Admara 2, ancienne monture de l’Italien Emanuele Gaudiano, ont laissé une fort belle impression sur la piste en dépit d’une faute concédée sur le vertical neuf, antépénultième effort de cette seconde manche. Huit points au total et la onzième place pour ce jeune couple. Un bon galop et aucune faute supplémentaire pour le Néerlandais Maikel van der Vleuten, très facile avec VDL Groep Verdi TN, septième. Aussi convainquant, mais moins rapide, l’Irlandais Billy Twomey a dû amplement se contenter de sa huitième place avec le polyvalent Diaghilev, lauréat voici trois semaines du prestigieux Derby de Hambourg!
Flattant le public transalpin, guère ébloui jusqu’alors par les performances de ses protégés, le champion d’Italie Emilio Bicocchi a joué crânement sa chance avec Ares. Hélas pour lui, la palanque du vertical sept l’a puni et relégué au dixième rang. Au regard de sa seconde manche parfaite et de son chrono avantageux, Kent Farrington aurait pu remporter ce Grand Prix avec la fabuleux Voyeur. Seulement, comme souvent, l’Américain a péché par excès de confiance et de précipitation en première manche, fautant sur un dernier gros oxer naturel qui méritait d’être soigné. Il a donc dû se sustenter du cinquième rang. Marcus Ehning aurait tout aussi bien pu s’imposer avec un Cornado NRW puissant et parfaitement aux ordres. Hélas pour lui, l’Allemand, impeccable au second tour, s’était fait piéger par le chronomètre relativement serré du premier. Il s’est donc intercalé à la quatrième place.
Double sans-faute de la Coupe des nations avec H&M Cue Channa 42, Malin Baryard-Johnsson a tenté d’en faire autant dans ce Grand Prix, associé cette fois à Corporal VDL, son autre fils de Cardento. De manière inattendue, elle a cependant écopé d’un refus sur le vertical cinq, suivi de deux fautes. Avec quatorze points, la Suédoise a dégringolé au douzième rang. McLain Ward, lui, ne s’est posé la moindre question. Auteur d’un premier tour presque écœurant de facilité, HH Azur a accéléré son train et obéi à toutes les demandes de son génie de pilote pour couper la ligne d’arrivée sans faute et dans un temps qui ne sera pas battu! Bravissimo!
 


Marco Kutscher a sûrement évité le pire…

Laura Kraut semble prête à relever les plus grands défis avec Zeremonie.

Laura Kraut semble prête à relever les plus grands défis avec Zeremonie.

© CSIO Roma

 
Il reste pourtant cinq excellents candidats. Le Néerlandais Jur Vrieling ne tente qu’à moitié sa chance avec VDL Zirocco Blue (alias Quamikase des Forêts), ce qui ne l’empêche pas de faucher le dernier oxer et de redescendre au neuvième rang. Compte tenu de la jeunesse de sa généreuse et respectueuse Zeremonie, neuf ans, Laura Kraut assure un excellent double sans-faute qui la hisse sur la troisième marche du podium. Well done pour les États-Unis, deuxièmes de la Coupe des nations ex æquo avec la France et dont les représentants ont donc terminé premier, troisième et cinquième du Grand Prix. Les favoris pour Rio, c’est bien eux!
Associé à un excellent H&M All In, le Suédois Peder Fredricson trouve le bon compromis entre le risque et l’assurance, ce qui lui permet de s’intercaler à une très, très belle deuxième place. Second Allemand de cette seconde manche, Marco Kutscher peut aller encore plus vite que Ward avec son très compétitif Van Gogh. Cependant, les dieux du saut d’obstacles en décident autrement. Victime d’une lourde chute après un refus très impressionnant devant le maudit vertical cinq, laquelle nécessitera son transport à l’hôpital et une interruption d’épreuve de quinze minutes, l’Allemand termine treizième, ce qui paraît assez anecdotique au regard du drame que ces mêmes dieux lui ont heureusement évité…
Pendant ce temps, Simon Delestre, auteur du sans-faute le plus rapide de la première manche avec un Hermès Ryan des Hayettes totalement retrouvé après une Coupe des nation mi-figue mi-raisin, a dû rester concentré et faire des dizaines tours de paddocks au pas, au trot et au galop… Quand le sport reprend enfin ses doits, le numéro un mondial manifest de belles intentions. Hélas, il ne parvient pas à négocier de façon optimale son virage à 270° entre le vertical cinq et l’oxer six que la crack renverse. Un double sans-faute leur aurait octroyé la deuxième place. Le Lorrain est reparti avec la sixième, mais surtout avec une confiance totalement retrouvée. C’est bien là l’essentiel, pour lui comme pour l’équipe de France.
 
Les résultats
Les performances des couples français
La réaction de Simon Delestre