’’Il fallait trouver une solution’’, Aymeric de Ponnat

Vendredi après-midi, Aymeric de Ponnat a officialisé le départ d’Armitages Boy de ses écuries. L’étalon qu’il montait depuis 2010 a rejoint Stephex en Belgique où il devrait être monté par l’Italien Lorenzo de Luca. Rencontré samedi soir au bord du paddock du CSI 3* de Neufchâtel-Hardelot, dans le Pas-de-Calais, le Normand a confié son sentiment quant à cette histoire qui est en passe de se terminer, tout en évoquant son présent et son avenir.



GrandPrix-Replay : Dans quel état d’esprit êtes-vous trois jours après avoir dit au revoir à Armitages Boy ?
Aymeric de Ponnat : Je me sens forcément un peu triste, parce que j’avais une affinité particulière pour ce cheval, comme chacun le sait, et puis parce que je n’ai pas tout fait comme je le voulais avec lui. Je ressens aussi de la déception parce que j’ai tout fait pour le faire racheter et qu’hélas, je n’ai pas pu trouver les investisseurs qui m’auraient permis de continuer cette belle aventure avec lui.
 
GPR. : Il vous aurait fallu réunir pas mal d’argent puisque son prix de réserve était supérieur à 2,8 millions d’euros lors de sa mise en vente aux enchères, fin septembre…
A.d.P. : On ne va parler de prix parce que personne ne sait exactement combien il peut être vendu, même si évidemment, un tel cheval vaut une somme conséquente…
 
GPR. : Vous avez réussi de bons championnats d’Europe, en 2013 à Herning, et vous avez contribué à de belles victoires françaises, dans la finale mondiale de la Coupe des nations, en 2013 à Barcelone, puis dans la Coupe des nations de La Baule, en 2014. Pour autant, vous ne sauterez donc jamais de Jeux mondiaux ou olympiques avec lui…
A.d.P. : C’est aussi pour cette raison que je suis triste. En 2013, nous avions réussi une belle saison alors qu’Armitages était encore jeune. Il est clair que j’avais d’autres objectifs avec lui et que je ne les ai pas réalisés, mais c’est la loi du sport.
 
GPR. : Pourquoi les copropriétaires d’Armitages, dont vous êtes, ont-ils choisi de confier sa commercialisation Stephan Conter ?
A.d.P. : Il fallait le vendre, y compris pour moi, car j’ai un bon pourcentage à toucher. À partir du moment où je ne suis pas parvenu à le faire racheter, il fallait trouver une solution. J’ai alors pris la décision de trouver la bonne personne et l’endroit le plus adapté à la vente de ce cheval d’exception. Stephan vend beaucoup de chevaux, y compris de cette gamme-là. Cela me semblait donc assez logique. Bien entendu, nous lui avons laissé carte blanche pour choisir le meilleur cavalier pour lui. Il s’agit de bien le commercialiser, pas de concourir à haut niveau à long terme. Armitages est un cheval qu’il faut comprendre. À celui qui y parvient, il donne le meilleur de lui-même, ce que je crois avoir montré au long de ma carrière avec lui. Il a certes quatorze ans, mais il se trouve en parfaite santé. Il aurait pu être vendu plusieurs fois cet hiver, les visites vétérinaires étaient nickel.
 
GPR. : A priori, même si peu d’informations ont filtré, il y a eu quelques potentiels acheteurs français et étrangers. Qu’est-ce qui a péché ? Ne se sont-ils pas montrés assez généreux ?
A.d.P. : C’est un ensemble de choses, pas forcément le prix. Nous avons reçu un certain nombre de propositions conséquentes. Simplement, tout ne s’est pas conjugué comme il le fallait. Les éléments pour concrétiser la vente n’ont pas été réunis.


’’Cavalier, c’est un éternel recommencement’’

GPR. : Le fait de détenir ce cheval à plusieurs (Aymeric de Ponnat, Christophe Mabille, Guillaume Canet, Serge Varsano et Grégory Mars, notamment) n’a pas toujours dû faciliter les choses…
A.d.P. : Ça ne veut rien dire. Parfois, il n’y a qu’un seul propriétaire, et les choses sont très compliquées. Il n’y a pas de règle de ce point de vue. Les personnes qui ont rejoint l’aventure ont investi en sachant que l’un des objectifs était de revendre le cheval à plus ou moins long terme. Donc pour moi, il n’y a pas de problème. Il est vrai que je me suis davantage attaché à ce cheval qu’à d’autres, come tout cavalier, mais mon métier, c’est de reconstruire et de former. Cavalier, c’est un éternel recommencement. Et mon intérêt, je le rappelle, est aussi de le vendre.
 
GPR. : On a parfois senti poindre des tensions entre vous. Qu’en est-il aujourd’hui ?
A.d.P. : J’entretiens de bonnes relations avec tous. Il y a parfois eu des petites tensions parce que les choses ne se goupillaient pas comme chacun l’entendait, mais à la fin, nous restons des gens intelligents et sommes capables d’aller dans le même sens.
 
GPR. : Votre présent et votre avenir sportif reposent désormais sur Ricoré Courcelle, double sans-faute l’an passé de la Coupe des nations de Gijón. Où en êtes-vous avec lui ?
A.d.P. : Il a évolué de façon incroyable. C’est un cheval rare qui a le potentiel pour évoluer au plus haut niveau. Je prends du temps pour bien élaborer les choses, et parce que mon système est ainsi fait. Pour moi, il est du niveau d’Armitages. Il ne nous manque plus que quelques mois, voire quelques semaines de travail. Jusqu’ici, il a eu la chance d’évoluer en deuxième cheval dans tous les plus beaux concours et de sauter de sérieuses qualificatives. Je lui ai épargné les Grands Prix parce que je ne le trouvais pas prêt pour ça. Cet hiver, il a peu sauté en indoor, car il ne s’y sent pas très à l’aise avec sa grande galopade et il préfère sauter dans le mouvement en avant. L’objectif, c’est cette saison extérieure qui commence. J’espère que nous aurons à nouveau la chance d’être sélectionnés en Coupe des nations cette année. Pour moi, c’est un cheval de championnat.
 
GPR. : Vous êtes donc venu à Neufchâtel-Hardelot dans l’optique d’obtenir une sélection pour l’Officiel de France de La Baule ?
A.d.P. : On verra, ce n’est pas moi qui décide. En tout cas, nous avons réussi une belle Coupe à Gijón. Philippe Guerdat suit le cheval depuis que je l’ai. À partir du moment où il saute bien (ce qui a été le cas à Neufchâtel-Hardelot, même si le couple a concédé quatre points vendredi et cinq dimanche, ndlr), je pense pouvoir obtenir une place à La Baule. Je l’espère en tout cas. Pour la suite, on verra. Comme tous les couples, nous devrons confirmer notre potentiel. En tout cas, je suis assez confiant.
 
GPR. : Outre Ricoré, sur quels chevaux comptez-vous pour l’avenir ?
A.d.P. : Il y a Ultrachic Tardonne, un autre fils de Quaprice Bois Margot (comme Ricoré, ndlr) que j’ai acheté avec l’écurie de Montchevreuil. Cet hiver, j’ai également récupéré Ululu, la fille d’Uélème qui avait été sacrée championne des six ans. Le haras de Turenne me l’a confiée pour l’amener progressivement à haut niveau. C’est une super jument de concours. Je compte aussi sur Ultra du Reverdy que m’a confié le haras des M. Il a beaucoup de qualités. Je continue à monter Quick Racer Z, un neuf ans qui manquait un peu de métier. Je vais essayer de le faire avancer. Pour l’instant, il va aborder les Grands Prix CSI 2*. Et puis j’en ai encore d’autres plus jeunes.
Globalement, à l’avenir, j’aimerais pouvoir étoffer mon écurie pour me donner toutes les chances de m’illustrer plus durablement à haut niveau. Aujourd’hui, je crois que les gens me connaissent et savent que j’ai eu des chevaux jeunes et que j’ai su les amener aussi haut que possible (Jubilée d’Ouilly, Winsome van de Plataan et Armitages Boy, ndlr).