Isabell Werth toujours en or, mais la jeunesse triomphe aussi à Göteborg!

Sans surprise, Isabell Werth a remporté sa deuxième médaille d’or aux championnats d’Europe Longines de dressage, cet après-midi à Göteborg. Même si la reine allemande a encore dominé la concurrence avec Weihegold, invaincue depuis la retraite de Valegro, la Danoise Cathrine Dufour et surtout le jeune Sönke Rothenberger ont montré qu’elle n’était pas invincible. De bon augure avant la Reprise Libre en Musique de demain.



«Tant qu’ils restent à leurs places sur le podium, et moi à la mienne, ça me va!», s’est esclaffée Isabell Werth lors de la conférence de presse qui a suivi la cérémonie de remise des médailles du Grand Prix Spécial des championnats d’Europe Longines de dressage, ce soir à Göteborg. Un rien arrogante, un rien agacée de passer pour une ancienne combattante alors qu’elle n’est âgée que de quarante-huit ans, la plus grande championne de l’histoire du dressage, dont la sportivité n’est a surtout pas à remettre en cause, a simplement tenu à rappeler qui restait la patronne. Quelques minutes plus tôt, elle l’a encore démontré aux yeux de tous en présentant une reprise quasiment parfaite avec Weihegold, sa fabuleuse jument, juste un poil hésitante sur l’un des trois piaffers inscrits sur le texte de cette exigeante reprise. Pour le reste, il n’y a pas eu grand-chose à dire. Déjà sacrée par équipes avant-hier, l’Allemande a décroché un énième titre de championne d’Europe, et tentera d’en glaner un de plus demain après-midi lors de la Reprise Libre en Musique. Lequel aura le plus de valeur ? Chacun en jugera.

En effet, alors qu’elle clame partout haut et fort sa volonté de simplifier son sport et de le rendre plus lisible pour le public, la Fédération équestre internationale continue à distribuer deux lots de médailles individuelles dans cette compétition. Généralement, ses responsables justifient cette bizarrerie par leur volonté de surligner l’intérêt de ce deuxième test et de remplir les tribunes des stades. De ce point de vue, ce fut loin d’être réussi cet après-midi, tant l’immense et magnifique stade Ullevi a sonné le creux. Et encore, la Suède est une grande nation de dressage, ce qui s’est d’ailleurs ressenti aux réactions et à la sportivité du public, attentif aux moindres détails lors des dernières reprises décisives. Si le fait de rassembler quatre disciplines (jumping, dressage, attelage et para-dressage) dans ce qu’il convient d’appeler des Jeux équestres européens favorise sûrement les retombées, une réflexion devra sûrement être menée quant à la programmation.


Sönke combattif, Cathrine en harmonie totale

Pour autant, sportivement, le fait majeur de ce Grand Prix Spécial reste l’incroyable et fabuleuse percée de la jeunesse. Dans une discipline où la hiérarchie est d’ordinaire si figée, et où les jeux sont souvent faits d’avance, à Göteborg, il y a du suspense et le sport en sort grandi. Déjà mercredi, deux grandes nations, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne, avaient été éjectées du podium par équipes au profit du Danemark et de la Suède, qui évolue ici à domicile. Aujourd’hui, Carl Hester, juché sur un Nip Tuck toujours aussi peu à son aise dans ces championnats, quoiqu’un peu moins que mercredi, n’est reparti qu’avec une cinquième place, tandis que le leader suédois, Patrik Kittel, a dû se contenter du septième rang avec Delaunay.

Au terme d’une dernière heure de haute volée, la médaille d’argent est revenue à l’Allemand Sönke Rothenberger, incroyable de maturité et de combativité à vingt-deux ans. En selle sur le bondissant et très expressif Cosmo, ce jeune homme à la silhouette très élancée, ancien cavalier de saut d’obstacles, a obtenu une moyenne générale de 82.479%, à un peu plus d’un point de sa glorieuse aînée. Sans quelques petites imperfections çà et là, il aurait pu arracher l’or! Chapeau. Les chiens ne font pas des chats, penseront certains en se rappelant que ses deux parents et ses deux sœurs brillent également en dressage. En matière d’équitation, pourvue qu’elle s’associe au talent, l’hérédité reste un accélérateur de carrière.

La médaille de bronze, elle, a récompensé un couple très harmonieux, très en place et très esthétique, mais moins impressionnant que les deux précédents. Il s’agit de la Danoise Cathrine Dufour et Atterupgaards Cassidy, passés tout près d’atteindre pour la première fois de leur carrière les 80% sur ce test (79.762%). Vice-champion d’Europe Juniors en 2010, quadruple champion d’Europe Jeunes Cavaliers en 2012 et 2013 (à Compiègne) après avoir été médaillé déjà en 2011, ce duo a gravi un à un les échelons le séparant du plus haut niveau mondial en passant par le jeune circuit U25 (moins de vingt-cinq ans) et les CDIO Seniors à partir de l’an passé, et les Jeux olympiques de Rio. Cette progression d’une rare régularité est aussi là pour démontrer que la politique de promotion de la jeunesse encouragée par la FEI et de nombreuses fédérations nationales porte ses fruits. Et ça, c’est une très bonne nouvelle!


Les belles promesses d’Arnaud Serre et Ultrablue de Massa

 Pour que le tableau soit complet, on aurait forcément aimé voir au moins un couple français lutter pour une place dans la Reprise Libre en Musique comme ce fut le cas il y a deux ans avec Karen Tebar et Don Luis, révélations des championnats d’Europe d’Aix-la-Chapelle. Cette année, en l’absence de ce couple fort de l’équipe de France, on aurait pu miser sur Pierre Volla et Badinda Altena. Hélas, la paire n’a pas été mesure de se qualifier pour ce Spécial… C’est d’autant plus rageant que la quinzième place, synonyme de qualification pour la RLM, s’est jouée à 72.381%. Seul Français engagé dans cette épreuve, Arnaud Serre a une nouvelle fois montré de belles promesses avec Ultrablue de Massa, son jeune cheval de neuf ans. Même s’ils ont dû se satisfaire de la vingt-huitième place (68.193%), nul doute que le Provençal et son Lusitano-Sport made in France ont pris date pour l’avenir. Bref, en dressage, rien se fait en un jour…
 
Les résultats du Grand Prix Spécial ici