Dans la cabane de Jean-Michel Roudier : ’’Le GPS ira très bien à Badinda et Don Luis ’’

Juge français officiant pendant cette édition 2015 des championnats d’Europe, Jean-Michel Roudier analyse chaque soir pour GrandPrix-Replay les reprises de la journée et dévoile les points forts et les points faibles des couples le plus marquants. Ce jeudi, il revient sur les reprises de Charlotte Dujardin, Edward Gal, Kristina Sprehe et Mathias Alexander Rath et évoque la surprenante équipe espagnole. Il revient également sur les performances d’Arnaud Serre et Karen Tebar.



Montée en puissance des scores
’’Les niveaux étaient plus hauts aujourd’hui, et c’est normal. Le tirage au sort a été effectué selon le classement mondial des équipes, ce qui fait automatiquement partir les meilleures équipes à la fin. Ensuite, il ne faut pas oublier que, dans la majorité des cas, les cavaliers partent dans un ordre bien défini. Le premier cavalier de l’équipe est en général un cavalier d’expérience mais qui ne fait pas le meilleur score. Le deuxième est celui qui a le moins d’expérience et le dernier est plutôt celui qui peut apporter la médaille. Partant de ce point-là, les deux derniers des équipes sont souvent les meilleurs, sauf dans le cas où le deuxième, souvent ’’le petit jeune’’ est excellent, comme ce fut le cas pour Pierre Volla, par exemple.’’
 
Le trois meilleurs couples du Grand Prix
Valegro a une impulsion et une élasticité extraordinaires, qui ne sont jamais contrariées par le contact de la bouche. Lorsque l’on voit Edward Gal faire des mouvements, on se rend compte qu’il y a une vraie différence dans le fonctionnement du dos d’Undercover et de Valegro. Lorsque je mets un huit à Undercover sur un mouvement, je dois mettre un point de plus à Valegro pour ce fonctionnement de tout son corps, qui donne une véritable harmonie. Mais aujourd’hui, les piaffers de Valegro n’étaient pas très bons, il manquait de régularité dans les postérieurs. Ceci dit, même lorsque l’un des postérieurs n’est pas égal, il a une telle régularité et un tel rebond que l’on ne peut pas baisser la note en dessous de sept.
J’ai beaucoup d’admiration pour Edward Gal. À Rotterdam, Undercover était pratiquement immontable et aujourd’hui il a réussi à très bien le monter. Dans le premier allongement, il était tout de même en avant de ses traces mais il s’est montré de mieux en mieux à chaque allongement. Edward Gal, qui sentait qu’il le pouvait, en demandait de plus en plus à son cheval. Undercover est très régulier, en équilibre et a une magnifique activité. S'il avait le dos de Valegro, il aurait des dix partout !
Kristina Sprehe, quant à elle, a une magnifique équitation, très en harmonie et en équilibre. Mais on peut reprocher à Desperados de manquer parfois un peu d’amplitude et d’activité. Aujourd’hui, les passages n’étaient pas extraordinaires, il a un peu manqué de rythme dans les postérieurs. Mais il été disponible et en équilibre du début à la fin.’’
 
Mathias Alexander Rath et Totilas
Lorsque je juge, je mets les points en fonction de ce que je vois. Pour Totilas, j’ai vu un arrêt qui valait un huit et j’ai vu un trot qui valait maximum quatre. En fait, j’ai hésité entre trois et quatre, puis j’ai mis quatre parce qu’il était régulier. Dans les appuyers, le premier n’était pas trop mal mais le deuxième était assez irrégulier. Dans les piaffers/passages, en revanche, il était magnifique. Mais sur les trois allongements au trot, il a été irrégulier. Je lui ai donc mis trois fois quatre et peut-être quatre et demi aux allures. J’ai aussi mis beaucoup de bonnes notes. La juge allemande était plutôt d’accord avec moi puisqu’elle n’est qu’à quelques points seulement de mes notes. Mais, encore une fois, le système à sept juges permet d’avoir un résultat final qui correspond bien aux prestations.
 
Arnaud Serre et Robinson de Lafont*de Massa
Arnaud a un cheval très prometteur mais qui présente le problème de certains entiers : il peut être très délicat. Pour moi comme pour l’ensemble des juges, c’est un cheval qui a pratiquement toutes les capacités requises mais qui est extrêmement délicat. Si Arnaud le rassure déjà beaucoup dans son équitation, il a tout de même encore besoin d’être en confiance. D’ailleurs, lors de l’arrêt en C, juste avant le reculer, il a regardé la cabane des juges avec l’air de leur demander ce qu’ils allaient lui faire. Du coup, Arnaud a attendu un peu plus l’arrêt avant de demander le reculer. La même chose s’est ensuite passée au bout de la diagonale en K. Mais ce n’est pas la première fois qu’il a des problèmes avec son cheval. Souvent, après les allongements, Robinson semble beaucoup plus émotif et devient plus délicat dans les transitions finales. Mais, pour moi, ce ne sont que des problèmes d’entier qui peuvent se régler. Je crois beaucoup en l’équitation d’Arnaud pour y arriver.
 
Karen Tebar et Don Luis
Karen a été fantastique. Elle a un cheval qui n’a aucune faiblesse. Il est bon en tout. Il est extrêmement élégant. C’est le meilleur cheval qu’elle ait jamais eu. Avec Glock’s Undercover, c’est l’un des seuls chevaux à n’avoir fait absolument aucune faute aujourd’hui. Don Luis nous a vraiment tous impressionnés par ses qualités. Sans oublier la superbe équitation de Karen, qui monte dans la légèreté et l’harmonie. En plus, c’est une cavalière qui a beaucoup de métier et qui monte son cheval vers l’avant et en équilibre.
 
La suprématie néerlandaise
Ce podium a été pour moi une véritable surprise, ce n’était pas du tout ce à quoi je m’attendais. Personne ne savait ce qui allait se passer, ce fut une véritable surprise pour tout le monde.
 
Les équipes surprenantes
Je suis très heureux pour la France, mais je ne m’attendais pas à la voir devant le Danemark. Les Danois ont accumulé les fautes, ce qui n’est pas habituel.
L’Espagne m’a beaucoup étonné. Cela faisait longtemps qu’on ne l'avait pas vue à ce niveau. Delgado, le cheval de Beatriz Ferrer-Salat, est assez incertain normalement. Mais aujourd’hui, c’était certainement la meilleure reprise que je l’ai vu dérouler. Sans parler de l’équitation de Beatriz, qui ressemble beaucoup à celle de Karen et Kristina, où les chevaux sont engagés, en avant et en harmonie.
 
Le Grand Prix Spécial
Le Grand Prix Spécial présente une reprise qui va très bien à Badinda Altena et à Don Luis. C’est la reprise où ces deux chevaux vont vraiment montrer leur qualité puisqu’elle s’appuie sur les piaffers/passages et sur les transitions. Le point faible de Badinda et Don Luis sera peut-être le galop. Moins pour Karen mais pour Pierre, le galop est parfois plus plat.