Quito de Baussy raconté par son groom

Groom d’Éric Navet de 1991 à 1995, Alexandre Artaud a accompagné le légendaire Quito de Baussy, décédé la semaine dernière, durant une bonne partie de sa carrière de champion. Très ému, il livre à GrandPrix-Replay ses cinq anecdotes les plus marquantes. 
 



Un calme olympien
’’Quito était très calme en concours. Il savait faire abstraction de tout ce qu’il y avait autour de lui. Tout le monde disait toujours avec amusement et respect : ’’Quel dormeur ce Quito !’’. Il y avait un contraste énorme entre le moment où il était en piste et le moment où il était au box. Majestueux en piste, au box, il avait la tête basse, la lèvre pendante. J’avais mis presque un an à être véritablement en osmose avec lui. Ensuite, il savait exactement comment me faire comprendre ce qu’il voulait. Et comme tout champion, il avait besoin qu’on le laisse un peu s’isoler avant les épreuves. Il aimait bien avoir un peu de calme pour se mettre dans sa bulle. Il savait ce qui l’attendait, il adorait cela et avait besoin de son moment à lui pour se préparer psychologiquement !’’

Le chouchou de l’écurie
’’À la maison, Quito était un véritable seigneur. Quand il revenait de concours, il sortait tranquillement du camion et ensuite il saluait ses copains. Il était toujours content de retrouver son chez-lui ! Il avait le deuxième box à droite dans l’écurie et jusqu’à ce qu’il regagne son box, il était fier, il faisait le beau, il savait que c’était un champion. Même si nous essayions de ne pas faire de différence entre les chevaux, c’est clair qu’il avait un statut privilégié. S’il y avait une pomme par exemple, c’était pour Quito ! Et puis, c’était le premier cheval qu’Alain Navet allait voir le matin. Il y avait une complicité incroyable entre eux, tout comme avec Éric d’ailleurs. Leur lien était si fort que c’était très émouvant de les voir ensemble. J’aime bien me dire que Quito a rejoint Alain Navet, c’est deux-là pourront encore se raconter de belles histoires en un simple regard.’’

Championnats d’Europe de Gijón : la déception
’’Je m’en souviendrai toujours. Éric et Quito étaient en tête, ils étaient sur le point de réitérer leur exploit de 1991, à La Baule. Il ne restait plus que deux obstacles, une spa et un vertical. Quito s’est arrêté sur la spa sans que l’on sache pourquoi. Éric est venu une seconde fois sur la ligne et le cheval n’a pas touché une barre. C’était rageant ! À cause de ce refus, la médaille individuelle et le podium se sont envolés !  J’y croyais tellement… De retour au box, j’ai craqué. C’est à ce moment-là qu’Alain Navet est venu me voir et m’a dit : ’’Tu verras on les aura !’’.’’

Les adieux de Quito
’’Les adieux de Quito à la Baule, ont très certainement été l’épisode le plus émouvant que j’ai partagé avec lui. Le cheval a été lâché en liberté au milieu de la piste. Il est parti au grand galop vers la sortie. Il y avait une barrière humaine à la porte et je suis le premier vers lequel il s’est dirigé. Cela m’a énormément touché. C’était beaucoup d’émotion pour moi…’’

Merci Quito
’’Mon plus beau souvenir est d’avoir été à ses côtés durant sa carrière. Je ne remercierai jamais assez Quito. C’est en très grande partie grâce à lui et à Éric que j’en suis où j’en suis à présent. Merci également à la famille Navet pour l’incroyable respect dont elle fait preuve quand elle a choisi de mettre le cheval à la retraite à seulement treize ans. Quand je l’ai appris, j’ai eu un moment d’incompréhension et puis j’ai réalisé à quel point c’était grand et beau ce qu’ils ont fait pour lui. Tous les jours en compagnie de Quito ont été magiques.’’