"J'attends un cheval comme Requiem depuis plus de dix ans", Alexandra Ledermann

Septième du Grand Prix CSI 3* de Canteleu, le week-end dernier, Alexandra Ledermann semble bien partie pour retrouver le haut-niveau grâce à son puissant Requiem de Talma. Après près de dix ans d’absence, la première femme à avoir décroché le titre européen semble être bel et bien de retour. Elle s’est confiée à GrandPrix-Replay sur son programme et ses ambitions.



GrandPrix-Replay : Vous venez de signer une belle septième place dans le CSI 3* de Canteleu, où le plateau était plutôt relevé. C’est donc un joli retour que vous venez d’effectuer…
Alexandra Ledermann :
 Je suis très contente car c’était le premier CSI 3* de Requiem. Il a déjà bien progressé cette année en étant classé dans les CSI 2* de Chantilly et Mantes-la-Jolie. Il avait aussi très bien sauté le Grand Prix du Grand National de Deauville. Je sens qu’il a pris de la maturité et il me tardait de recommencer les CSI 3* pour confirmer. Il a fait une petite faute au barrage car il n’est pas encore prêt à aller vite : son caractère est ressorti quand je lui ai demandé de tourner un peu court. Il a couché les oreilles et s’est mis en colère. Il va falloir qu’il prenne goût au jeu du barrage. Mais je suis très contente de lui et ça me fait extrêmement plaisir, c’est la récompense de plus de deux années de travail avec ce cheval.

GPR : Pouvez-vous parler un peu de Requiem de Talma ? 
A.L. : 
C’est un cheval que j’ai depuis trois ans et demi. Il n’est pas très grand (Requiem mesure 1,62m, ndlr) mais plein d’énergie. Techniquement, il a de la force, beaucoup de sang et il est volontaire et respectueux. Mais il a aussi beaucoup de caractère et de personnalité et il n’accepte pas les contraintes. C’est pour cela qu’il m’a fallu tout ce temps pour réussir à canaliser son énergie. Il a un fort caractère et il est capable de me le montrer en parcours et même parfois assez violemment. L’idée est d’arriver à conserver tout cette énergie, qui est positive, en le mettant de mon côté pour qu’il la restitue en étant combatif. C’est ce qu’il se produit depuis cette année : je le sens beaucoup plus avec moi et c’est génial.


"Je vais tout faire pour accéder au plus haut niveau"

GPR : Pensez-vous qu’il ait l’étoffe d’un cheval de très haut niveau ? 
A.L. :
 C’est difficile à dire tout de suite car il ne s’est pas encore essayé au haut-niveau. Se projeter dans l’avenir et dire ce qu’un cheval pourra faire est très compliqué, il y a tellement de paramètres à prendre en compte. Requiem semble avoir la combativité nécessaire, une bonne technique et il a l’air d’avoir des moyens mais je ne sais pas encore jusqu’où. Pour l’instant, je ne lui ai pas demandé d’aller plus loin que ce que nous faisons pour le moment.  Beaucoup de choses plaident en faveur d’une carrière à plus haut niveau mais je reste prudente. Avec les chevaux, on n’est jamais sûr de rien, c’est à la fois la difficulté et l’attrait du sport. J’ai envie d’y croire et je vais tout faire pour réussir à accéder au plus haut niveau avec Requiem. S’il a l’étoffe pour faire les grosses épreuves, alors je l’y amènerai.  

GPR : Quel est la suite maintenant ? Allez-vous continuer à grimper dans les niveaux où voulez-vous d’abord aguerrir votre couple ? 
A.L. : 
Nous n’allons pas brûler les étapes. Nous avons déjà eu suffisamment de mal pour arriver jusque-là ! Je veux continuer à faire des CSI 2* et peut-être des CSI 3* si j’en trouve, mais je ne vais pas forcer les choses pour arriver plus haut niveau à tout prix. Cela va se faire naturellement, tout comme cela s’est fait avec mes autres chevaux dans le passé. Pour l’instant, il est sur la pente ascendante et très en forme. C’est tentant d’en profiter, mais je préfère prendre le temps. Pour le moment, nous sommes bien à ce niveau là et nous allons essayer d’accrocher de meilleurs classements, car j’aime bien gagner. À Canteleu, ma septième place a un goût de victoire, une victoire sur le tempérament de ce cheval parce que j’ai eu des moments de découragement. 


"Requiem a un peu le même profil que Rochet M"

GPR : Avez d’autres chevaux pour l’épauler ? Des jeunes ? 
A.L :
 Non, c’est bien mon drame. Cela fait plus de dix ans que j’attends d’avoir un cheval comme Requiem. Maintenant, j’aimerai en avoir deux ou trois autres comme lui. J’ai Quiet Love, une jument très compétitive, qui adore gagner mais elle tourne sur 1,40m cette année. Malheureusement, le lundi avant Canteleu, nous avons panaché à l’entrainement et nous nous sommes blessées toutes les deux. J’ai eu une entorse des cervicales et j’ai dû monter avec une minerve. Quiet Love, elle, s’est blessée à l’épaule, elle est pour le moment arrêtée. Ce n’est pas facile à gérer et nous ne sommes jamais à l’abri d’un accident. Les chevaux que j’ai ensuite n’ont pas la qualité pour faire du haut niveau. Je les travaille et les améliore, ils progressent mais ils deviendront des chevaux d’amateurs. 

GPR : Quel est votre programme pour la suite ? 
A.L. :
 Je vais me rendre à Chantilly ensuite ce n’est pas défini car, jusqu’à présent, je n’avais pas les chevaux  pour faire des plans sur du long terme. Maintenant que Requiem commence à aller bien, je vais pouvoir planifier sur le long terme. C’est encore un peu frais après Canteleu, mais j’ai vu qu’il y avait deux CSI 3* cet été, Royan et St Lô. Peut-être que je m’y rendrais.  Je fais rarement de grosses épreuves avec des chevaux de huit ans. Requiem a dix ans, cela peut paraitre un peu tard mais il a un peu le même profil que Rochet M, bien qu’il ait un an d’avance sur lui. Mais il reste délicat et je sais qu’un grain de sable dans l’engrenage pourrait suffire à nous faire repartir en arrière.