“Que du bonheur !”, Alexis Goury

Hier, Alexis Goury est monté pour la toute première fois de sa jeune carrière sur le podium d’un CCIO 3*. À vingt-deux ans, il a en effet terminé troisième à Boekelo grâce à Trompe l’Oeil d’Emery, un cheval qu’il a acheté à quatre ans et patiemment formé jusqu’à haut niveau. Malgré une petite frayeur à l’issue du cross samedi, le Tricolore a vécu un week-end de rêve aux Pays-Bas. Pour Grand Prix, Alexis Goury a accepté de revenir sur cette troisième place et d’évoquer son système et ses projets.



Grand Prix Replay : Hier, vous êtes monté pour la première fois sur le podium d’un CCIO 3*. Qu’est-ce que cela représente pour vous ? 
Alexis Goury : C’est vraiment impressionnant, sur le moment, j’ai eu un peu de mal à réaliser ce qu’il se passait réellement. Mais une fois que l’on réalise, c’est que du bonheur ! C’est seulement mon deuxième format long en CCI 3*. J’avais fait les championnats du monde des moins de vingt-cinq ans à Bramham au mois de juin où j’avais essuyé un refus sur le cross. Je tenais donc à rectifier à ce niveau-là et ça a plutôt bien marché ! Ce podium est l’accomplissement de toute une saison et de tout le travail fait en amont.
 
GPR : Vous vous êtes même offert le luxe de devancer Astier Nicolas !
A.G. : Nous espérions qu’un des deux Tim (Price et Lips, ndlr) fasse une faute pour pouvoir être tous les deux sur le podium ! Quand je suis sorti de piste, il m’a dit en rigolant qu’il était content pour moi mais qu’il aurait préféré que je fasse quatre points pour qu’il soit à ma place (rires). C’est un cavalier que je connais plutôt bien, nous faisons régulièrement les mêmes concours. C’est vraiment facile d’aller lui parler.
 
GPR : Pouvez-vous revenir sur ce qu’il s’est passé samedi lorsque les juges vous ont attribué cinquante points de pénalité au motif que vous n’étiez pas passé entre les fanions d’un obstacle ? 
A.G : La combinaison 23 a-b était composée de deux strings à quatre foulées en tournant. Ils n’étaient pas très larges et, sur le premier, mon cheval s’est décalé dans la battue d’appel donc j’ai pris le fanion droit dans la jambe. Sur le coup, je pense que le commissaire de cet obstacle a considéré que j’étais en dehors des fanions mais j’étais sûr d’être dedans. Quand je suis arrivé, Tierry Touzaint m’a demandé où j’ai eu un refus car les juges m’avaient mis vingt points de pénalité. Je lui ai dit que le seul endroit potentiellement litigieux pouvait être ce string-là, et les juges m’ont par la suite éliminé puis mis cinquante points, considérant que je n’avais pas franchi l’obstacle entre les fanions. Ça a changé plusieurs fois et nous avons alors porté réclamation car j’étais sûr de moi. Nous avons trouvé deux photos pour prouver que j’avais franchi l’obstacle correctement, et je pense que les juges l’ont vu grâce aux vidéos, en étudiant les différents cas de réclamations à la fin de l’épreuve.
 
GPR : Le CCIO 3* de Boekelo est souvent considéré comme l’occasion pour les chefs d’équipes de faire une revue d’effectifs avant le travail d’hiver et la saison suivante. Quels sont vos objectifs pour 2019 ? 
A.G. : Je serai encore au Pôle Jeunes de Saumur jusqu’au mois de juin. L’idée c’était de repartir sur l’objectif des championnats du monde de moins de vingt-cinq ans à Bramham. Est-ce que le programme va changer parce que le cheval a très bien couru ici, je ne sais pas. Le staff fédéral va peut-être me demander de faire une autre épreuve pour voir le cheval sur un concours plus compliqué, je l’ignore encore ! Trompe l’Oeil est désormais qualifié pour concourir en CCI 4* et des échéances comme les Jeux équestres mondiaux qui arrivent l’année prochaine. Le cheval est disponible s’ils en ont besoin ! Je suis jeune, le cheval l’est aussi, donc nous avons encore des choses à prouver. Pour le moment, je suis concentré sur Bramham, cela changera peut-être au cours de l’hiver en discutant avec Thierry Touzaint.  


“Trompe l'Oeil est juste extraordinaire !”

GPR : Qu’est-ce que le Pôle Jeunes de Saumur vous apporte au quotidien ? 
A.G. : Je suis rentré à Saumur pour faire la formation initiale, puis j’ai finalement intégré le Pôle en deuxième année car mon cheval avait bien couru au CIC 2* de Pau. Pour moi c’est un vrai plus ! Tous mes chevaux sont sur place ce qui représente un véritable gain de temps. Ce n’était pas le cas avant : j’avais un cheval à l’école et d’autres à l’extérieur. Je bénéficie également des infrastructures, j’ai le nombre de boxe que je souhaite. Et surtout, je ne suis jamais tout seul étant donné que je suis encadré au quotidien par Philippe Mull et Jean-Pierre Blanco. Ça représente un vrai avantage parce que nous sommes vraiment soutenus, le staff est très proche de nous. Pour franchir le cap de Jeune Cavalier à Sénior, ça représente un vrai plus !  Si j’étais tout seul, ce serait nettement plus compliqué et, grâce au Pôle, j’arrive à mener mon projet et ma carrière sportive.
 
GPR : Vous montez Trompe l’Oeil d’Emery en compétition depuis 2011, jusqu’où pourra-t-il vous emmener ? 
A.G. : J’ai acheté Trompe l’Oeil lorsqu’il avait quatre ans. À l’époque je n’avais aucune expérience et je l’ai acquis pour entrer en formation initiale à Saumur. Nous avons mis un peu de temps à prendre nos marques, il n’avait pas fait de complet auparavant, ça n’était pas trop son truc. Avec mon manque de métier, cela a pris du temps mais tout s’est déclenché après le CIC 2* de Pau où le cheval a vraiment bien couru. Jusqu’à Bramham, il n’avait jamais fait le moindre refus. Tout est allé très vite, à chaque marche montée, nous avons aussitôt pu en gravir une autre. Ça a toujours bien fonctionné et nous sommes allés crescendo. Ce week-end, il a été incroyable. Il a développé une maturité et une envie de bien faire remarquables, il est juste extraordinaire ! C’est un cheval qui va faire des CCI 4*, j’en suis sûr. Il fait les CCI 3* avec une telle facilité que je n’ai aucun doute là-dessus. Au lendemain du cross de Boekelo, il était frais comme s’il n’avait rien fait la veille ! J’avais même du mal à croire qu’il pouvait être dans un tel état de fraicheur au lendemain d’un tel parcours. C’est de bon augure pour la suite ! À Bramham, il était sensiblement pareil alors que le cross était à mon sens plus difficile car plus vallonné, physique, et plus long de trente secondes. Je pense qu’il a tout pour faire plus.
 
GPR : C’est un cheval qui vous appartient, le projet est-il de le garder à long terme ? 
A.G. : Ce cheval-là a une histoire assez particulière, c’est mon premier cheval. C’est une question que je me pose, mais je pense que j’aurais du mal à le vendre si l’occasion se présentait.
 
GPR : Sur quels autres chevaux pouvez-vous compter pour épauler Trompe l’Oeil d’Emery ? 
A.G. : Trompe l’Oeil est le seul cheval qui m’appartient, tous les autres sont à des propriétaires. J’ai un très bon cheval de huit ans, Vidocq de Tael, qui appartient à Gwenaëlle Le Breton. C’est la propriétaire de Phosphore de Lhocre, un cheval monté par Eddy Sans qui a gagné de belles épreuves. Vidocq a une qualité extraordinaire, je prends mon temps pour le former. Cela fait deux ans que je l’ai et il va concourir au CIC 2* de Pau, j’espère pouvoir l’emmener au CIC 3* de Brahmam l’année prochaine et pourquoi pas faire le championnat du monde des chevaux de neuf ans à Blenheim en septembre. J’ai également un bon cheval qui prendra sept ans l’année prochaine, Bad Boy d’Ac. C’est un super cheval d’avenir qui appartient à Julianne Dupuis, j’espère qu’il fera une bonne saison l’an prochain. Grâce à cette même propriétaire, je monte également Vadim de Savigny, un cheval de huit ans qui évolue en CCI 1*. Il est à vendre et sera un bon cheval de CCI 2*.