'ORPHÉO ET MOI ÉTIONS EN PHASE À JARDY', ROBIN BOULANGER



À dix-huit ans, [Robin Boulanger] s’est déjà construit un beau palmarès ! Dimanche dernier, il y a d’ailleurs ajouté une ligne... Et non des moindres, puisqu’il a été sacré champion d’Europe de concours complet Juniors, au haras de Jardy ! Aux rênes d’[Orpheo des Sablons], qui est né chez lui, il a également mené son équipe sur la deuxième marche du podium (lire ici). Une superbe victoire, donc, d’autant plus belle qu’elle arrive en France et pour la dernière année au niveau Juniors du pilote francilien. Ainsi, Robin représente un très bel espoir pour la relève tricolore. Contacté par GrandPrix-Replay, il raconte ses championnats, revient sur sa jeune carrière et dévoile ses objectifs.


GrandPrix-Replay : Vous avez été sixième lors des championnats d’Europe Juniors à Vale Sabroso en 2011, dixième à Strzegom l’an passé. Vous sentiez-vous cette année apte à monter sur la plus haute marche du podium cette année ?
Robin Boulanger :
Apte, je ne sais pas. En tout cas nous travaillions pour ça depuis cinq ans avec Pascal Forabosco et mon entraîneur, Didier Willefer. Le cheval était vraiment au top de sa forme cette saison. Donc s’il y avait une performance à faire, c’était cette année qu’il était prêt à le faire ! En arrivant au haras de Jardy, est-ce que je savais que j’allais prétendre à ce titre, non. Mais tout était réuni pour réaliser une belle performance. En plus, le fait que ça se passe en France, près de chez moi, m’a motivé. Des gens que je connaissais sont venus, j’avais envie de bien faire devant eux.


GPR. : Votre quatrième place à l’issue du dressage était-elle attendue ?
R.B. :
Orphéo est toujours très bien classé au dressage. À Jardy, il était très bien dès le début de la semaine, et a déroulé une vraiment bonne reprise. Habituellement il chauffe vite ; ce jour-là il était très calme. Quand il est détendu comme ça, tout est possible avec lui ! J’espérais être bien classé. Finir dans les dix premiers était largement envisageable.


GPR. : Comment avez-vous vécu le cross, que vous avez couru dans de difficiles conditions climatiques et après un refus de votre coéquipier [Alexis Lavrov] ?
R.B. :
Je savais qu’il fallait que je rentre sans faute, c’était la consigne que j’avais reçu à la détente. C’est un cheval très fiable sur le cross, que je connais par cœur, j’étais assez serein. J’avais à gérer les conditions climatiques et le terrain qui se dégradait au fur et à mesure. Ça n’a pas du tout posé de problème à Orphéo : si je monte correctement, lui il fait le boulot. Samedi, rien ne pouvait lui arriver. Il n’a rien regardé, pas hésité une seule seconde. Il a été exemplaire.


GPR. : Et l’hippique ? La pression n’était-elle pas trop dure à supporter ?
R.B. :
J’avais énormément de pression, mais au final, quand on a trop de pression, on ne la ressent plus. Au moment d’entrer en piste, je n’en avais plus tellement. Je savais qu’il fallait que je finisse avec un bon score, pour l’équipe (de son résultat dépendait le podium de l’équipe, ndlr). J’étais plus stressé par mon résultat pour l’équipe que pour mon résultat personnel ! Orphéo saute extrêmement bien l’hippique, c’est ce qu’il fait de mieux. J’avais un peu peur en entrant dans la carrière : le couple irlandais qui est passé avant moi est sorti sans faute, et les applaudissements ont un peu tendu mon cheval. Il a fallu que je le décontracte rapidement, mais dès que nous avons sauté le numéro, il s’est relâché. Il a fait ce qu’il devait faire, et l’a fait de belle manière. Toutes les conditions étaient réunies la semaine dernière : le cheval était prêt et je bénéficiais de l’expérience des deux années précédentes. Nous étions en phase, lui et moi. Quand j’étais sur son dos, je sentais qu’il ne pouvait rien m’arriver ! C’était parfait.


GPR. : Lors du stage, avez-vous mis en place un partenariat Juniors-Jeunes cavaliers ? Comment votre groupe s’est-il soudé ? Avez-vous l’habitude de concourir ensemble ?
R.B. :
En effet. Chaque Junior était couplé avec un Jeune cavalier. Nous nous sommes entraidé, nous nous aidions à tenir la pression. Nous nous "groomions" en fonction des binômes ; souvent, les filles ont natté les crins pour les garçons ! Moi, j’étais avec Perrine Soulager. Elle m’a bien aidé à l’arrivée du cross, elle s’est occupée de mon cheval avec mon père. C’était une très bonne idée de François Lemière (membre de l’équipe Jeunes cavaliers, ndlr) ! Cela a permis de souder le groupe. Je connaissais déjà pas mal les Jeunes cavaliers, étant donné que j’ai concouru avec eux en Juniors avant qu’ils ne grimpent de niveau. Mais certains Juniors ne les connaissaient pas, et le stage nous a permis de faire connaissance. On ne pouvait pas rêver meilleure ambiance ! Nous étions comme une grande famille, et nous avons vécu deux semaines intenses. Au retour, je me suis senti tout seul, abandonné !


GPR. : Racontez-nous votre parcours avec Orphéo, qui est né chez vous.
R.B. :
La mère d’Orphéo (Cavatina Mail, ndlr) appartient à Nathalie Jacob, qui tient l’élevage de Nath, en Normandie. Ma mère aimait beaucoup la jument, et était fan de Yarlands Summersong. Elle a demandé à faire le croisement. Un premier poulain est né, Noutlaw Gabin, que [Nicolas Touzaint] a un peu monté en 2008. L’année d’après, la jument a été saillie de nouveau, et Orphéo est né. Nous l’avons acheté quand il avait deux jours, c’est pour cela qu’il porte l’affixe de chez nous. Il est resté au pré jusqu’à ses trois ans, et mes parents l’ont débourré. Il a participé aux Cycles classiques des quatre et cinq ans sous la selle de mon coach Didier Willefer. Je l’ai récupéré après la finale des cinq ans. Je me suis progressivement lancé avec lui sur des épreuves Club d’abord, puis Amateur, notamment en saut d’obstacles. Dès l’année de ses sept ans, j’ai commencé le complet au niveau Amateur. J’étais un peu dépassé par lui : il avait beaucoup d’énergie, toujours envie de bien faire, et était très allant sur le cross. Il a fallu qu’on apprenne à se connaître. Moi, je venais de finir mes années à poney. Nous avons mis un an pour réussir à se mettre ensemble, soit toute l’année de ses six ans. Après, nous avons commencé chez les Minimes. Nous avons été champions de France. L’année suivante, nous avons fini troisième du championnat de France Cadets. Et puis nous avons continué sur trois saisons en Juniors.


GPR. : Où vous entraînez-vous et avec qui ?
R.B. :
Je m’entraîne au centre hippique municipal de la ville de Saint-Maur, à Marolles-en-Brie, dans le Val-de-Marne. Je travaille avec Didier Willefer dans la semaine, et avec Pascal, depuis cinq ans, lors des stages organisés par la Fédération française d’équitation. Je le connais très bien, j’ai une totale confiance en lui. Nous nous appelons souvent pour échanger sur Orphéo et les autres montures que j’ai. Je connaissais également déjà Florence, en charge du dressage pour les Jeunes, avant qu’elle ne prenne son poste à la FFE. J’ai travaillé avec elle quand j’étais plus petit, aujourd’hui nous nous retrouvons dans les stages.


GPR. : Vous montez également deux chevaux nommés Sforzando et Flambeau LH. Parlez-nous d’eux.
R.B. :
Flambeau appartient à mon père. Il a aujourd’hui huit ans, mais nous avons décidé de le mettre à la retraite à cause de gros soucis de santé. Il était la meilleure relève que je pouvais espérer. Nous avons fait l’acquisition de Sforzando, en qui je crois énormément ! Il a sept ans. Nous l’avons acheté en fin d’année de cinq ans, il n’était jamais sorti avant. En deux, il a bien rattrapé son retard, puisqu’il est presque au même niveau qu’Orphéo ! Dès l’année prochaine, il pourra courir au niveau Jeunes cavaliers.


GPR. : Quels sont vos objectifs pour l’année prochaine ? Pensez-vous Orphéo capable de poursuivre au niveau Jeunes cavaliers ?
R.B. :
D’après mon coach, Orphéo a les moyens de courir au niveau 3* ! Bien sûr, on ne peut pas le savoir tant qu’on n’a pas essayé, mais il n’y aura pas de souci au niveau Jeunes cavaliers. Mes objectifs sont d’être performant dès le début ! J’ai de chevaux qui me permettent d’y penser. Enfin, pourquoi ne pas finir l’année sur les championnats d’Europe, qui auront lieu au Portugal ?


GPR. : Comment conciliez-vous votre scolarité avec la compétition à haut niveau ?
R.B. :
J’ai dix-huit ans, je viens de rentrer en terminale scientifique. J’ai pris un an de retard il y a deux ans : je passais plus de temps aux écuries qu’à l’école ! Je suis une scolarité normale, je n’ai pas d’emploi du temps aménagé, je monte à cheval après l’école. Globalement, ça se passe assez bien. Bien sûr, ma scolarité se passerait mieux si je n’avais pas à gérer le haut niveau à côté. Ce sont deux choses qui me prennent beaucoup de temps. Je voudrais, à terme, m’installer comme professionnel. Mais avant, je souhaite poursuivre mes études : finir une licence de Staps et enchaîner sur un master de gestion de structures sportives.


GPR. : Quels sont vos objectifs à long terme ?
R.B. :
Mon rêve, c’est de réaliser les mêmes performances chez les Jeunes cav et les Seniors. Puis de courir les 4*, particulièrement le cross de Badminton... J’ai pour modèles mon coach bien sûr, mais aussi [Jean Teulere], [Michael Jung] et [William Fox-Pitt]. Il faut y croire !


Propos recueillis par Léa Dall'Aglio