PRIX DU JOCKEY CLUB: VICTOIRE DE SAÔNOIS, LE BAGARREUR
C'est un conte à la manière de "Cendrillon" que l'on a vécu dimanche à Chantilly lors du Prix du Jockey Club (groupe I - trois ans - 1.500.000 euros - 2.100 mètres) avec la victoire à plus de 30/1 du poulain Saônois (Chichicastenango et Saônoise par Homme de loi) entraîné dans le Centre-Est par Jean-Pierre Gauvin et monté par le jeune jockey Antoine Hamelin qui était encore apprenti le mois dernier ! Il a devancé dans l'ordre le favori Saint Baudolino (Pivotal) d'environ une longueur, Nutello (Lemon Drop Kid), Kesampour (King's Best) et Top Trip (Dubai Destination) séparés par de minimes écarts.
Longtemps au milieu du peloton, Saônois a pu se faufiler entre les vagues et il s'est montré extrêmement courageux dans les deux cents derniers mètres forçant l'admiration de son jeune jockey : "Je suis au ciel, mon poulain a un coeur énorme et je remercie mon patron et son propriétaire qui m'ont maintenu leur confiance pour cette course au sommet malgré ma jeunesse et donc mon manque d'expérience à ce niveau".
Le Prix du Jockey-Club, qui est notre "Derby d'Epsom", est censé désigner le meilleur poulain de la campagne de printemps, mais depuis que sa distance a été raccourcie voici une dizaine d'années, passant de 2.400 à 2.100 mètres, il nous a réservé quelques surprises. La victoire de Saônois n'est pas le moindre de ces succès étonnants, d'autant que ce poulain de petite taille mais d'un grand courage, aimant la bagarre au sein d'un peloton en étant capable de surmonter les coups de tampon, avait été aligné l'an dernier dans une course pour chevaux à vendre (mis à réclamer pour 25.000 euros, en octobre 2011 à Deauville).
Souvent sur la brèche à deux ans, Saônois évoluait en compagnie plus modeste, mais il montrait des progrès à chacune de ses tentatives. Son entraîneur le laissa un peu souffler avant de l'envoyer à Cagnes-sur-Mer l'hiver dernier (ce qui n'est pas forcément un itinéraire classique) et le poulain y enleva la meilleure course du meeting, le Prix Policeman, du nom d'un ancien vainqueur du Prix du Jockey Club, également passé par le circuit des courses "à réclamer". Ce succès étant acquis, Saônois fut aligné dans le groupe III du Prix La Force à Longchamp et il s'y distingua avant de baisser pavillon mais sans démériter devant Kesampour à Saint-Cloud dans le Prix Greffulhe (groupe II).
Quelques-unes des plus grandes casaques européennes étant représentées dimanche à Chantilly : celles du Prince Aga Khan, des Cheikhs Maktoum de Dubai et Al Thani du Qatar, des frères Wertheimer (Chanel) ou encore du plus grand haras du monde, Coolmore Stud (MM. Magnier, Tabor, Smith). On ne s'attendait sûrement pas à voir terminer à la première place celle de M. Treyve, un boulanger du Centre-Est. Comme quoi les fées des courses peuvent parfois se pencher sur les petites écuries et d'un coup de baguette magique, transformer les rêves les plus fous en réalité.
Sur le plan de l'élevage, on soulignera que Chichicastenango, le père du gagnant, termina deuxième de cette même course derrière Anabaa Blue en 2001 et qu'il avait déjà produit un vainqueur du Jockey-Club, Vision d'Etat en 2008.
A Chantilly, Jean-Noël Gontier