“Tescari et moi, nous nous connaissons par cœur”, Lalie Saclier

La semaine prochaine, Lalie Saclier entrera sur le Terrain d’honneur du Grand Parquet de Fontainebleau pour défendre le drapeau tricolore lors des championnats d’Europe Longines FEI de jumping, à Fontainebleau. Pleine d’ambitions et de ressources, l’amazone de vingt-et-un ans a aussi fait preuve d’une résilience importante ces deux dernières années. Écartée deux fois de suite des championnats d’Europe à la suite de blessures de sa monture, Tescari’Jac, la jeune femme revient en force sur le devant de la scène, plus combative que jamais. Entretien. 



Ici en selle sur Perle Fine du Val, une jument qu'elle monte toujours, Lalie Saclier concourt aux championnats d'Europe Enfants de Comporta, en 2011.

Ici en selle sur Perle Fine du Val, une jument qu'elle monte toujours, Lalie Saclier concourt aux championnats d'Europe Enfants de Comporta, en 2011.

© Sportfot

GRANDPRIX-Replay.com : Vous êtes sélectionnée pour courir les championnats d’Europe Longines FEI de Fontainebleau la semaine prochaine. Vous doutiez-vous que Thierry Pomel vous choisirait ? 
Lalie Saclier : Oui, un peu, car c’était mon objectif depuis le début de la saison, pendant laquelle j’ai eu de bonnes performances. Ma sélection est en quelque sorte la suite logique. Je commence aussi à avoir une bonne expérience de ce type de compétition : j’ai déjà participé à trois championnats d’Europe, en catégories Enfants et Juniors, et j’ai monté plusieurs Coupes des nations. Ma relation avec mon cheval, Tescari’Jac, est aussi un véritable atout. Nous nous connaissons par cœur !

GPR. : Comment avez-vous réussi à surmonter la déception de ces deux dernières années, lors desquelles vous n’avez pu prendre part aux Européens en raison de blessures de votre meilleur cheval ? 
L.S. : J’ai vraiment joué de malchance... En 2016, j’ai panaché à Hagen, lors du CSIO, ce qui a écarté pendant un mois Tescari des terrains de concours. En 2017, il s’est donné un coup lors de la Chasse du Master Pro à Fontainebleau. Il a été arrêté de juin 2017 à février 2018. L’an dernier, ça n’a pas été simple moralement. Je me suis donc concentrée sur les plus jeunes chevaux. Cela m’a appris à être très rigoureuse dans les soins apportés à mes montures, et surtout, à être patiente ! J’ai repris les concours avec Tescari sur 1,30m cette année, pour l’amener de nouveau, progressivement, à son meilleur niveau.

GPR. : Quels sont les qualités et les défauts de Tescari’Jac ? 
L.S. : C’est un excellent cheval, que j’ai beaucoup de chance de monter. J’en prends énormément soin, et c’est pourquoi je l’ai remis doucement sur de gros parcours, avec prudence, afin de le préserver. Il est courageux, a beaucoup de force tout en restant très respectueux et en donnant le meilleur de lui-même. Par contre, il est toujours un peu raide, et assez lent, il faut veiller à être bien dans le temps. Il est parfois un peu dissipé dans le travail, il faut le mobiliser en permanence pour conserver son attention. C’est un joueur, mais il est très souvent sans faute et, bien travaillé, il parvient même à gagner des barrages !


“Nous avons de bonnes chances pour les championnats d’Europe”

Lalie Saclier et Tescari'Jac évoluent ensemble depuis août 2015 et prendront part à leur premier championnat la semaine prochaine, à Fontainebleau.

Lalie Saclier et Tescari'Jac évoluent ensemble depuis août 2015 et prendront part à leur premier championnat la semaine prochaine, à Fontainebleau.

© Loïc Baurr

GPR. : Comment vous préparez-vous pour le championnat continental ?
L.S. : Je ne fais rien de particulier. C’est un travail de longue haleine et je ne vais pas tout changer en une semaine. Je vais le travailler tranquillement, afin de le garder frais pour qu’il tienne la distance lors du championnat. La préparation pour affronter la hauteur a commencé en début de saison sur des plus petites barres, jusqu’au CSI 4* de Bourg-en-Bresse, où il a retrouvé la hauteur qu’il avait l’habitude de sauter. Je vais veiller à garder son niveau au top pour que nous donnions le meilleur de nous-mêmes la semaine prochaine. Je n’ai d’ailleurs pas participé au Master Pro ; deux championnats d’affilée, ça aurait été trop. J’ai cependant une petite appréhension de concourir à Fontainebleau, à cause de la blessure de l’année dernière. Toutefois lors du CSIO Jeunes Cavaliers de GRANDPRIX Classic, tout était parfait, donc je suis confiante.
J’ai déjà effectué des stages de préparation quand j’étais en Enfants et en Juniors, le but est vraiment d’effectuer les derniers réglages et de souder au maximum l’équipe. Pour Tescari, l’objectif sera de le garder bien souple, surtout au niveau du dos et des cervicales, et à l’écoute. Je ne saute jamais gros chez moi, je veille surtout à l’avoir aux ordres et décontracté. Je travaille quotidiennement avec ma sœur pour avoir un œil extérieur, et pour le dressage, je me fais aider par Carlos Pinto, dont la fille est en équipe de France pour cette discipline.

GPR. : Quelles sont selon vous vos chances de médailles ? 
L.S. : Cette année, nous avons une bonne équipe, avec des chevaux solides et des cavaliers d’expérience. Nous avons selon moi de très bonnes chances, même si l’Allemagne et la Grande-Bretagne seront comme d’habitude des adversaires redoutables. Je ne me suis pas tellement préoccupée des sélections étrangères : ce qui m’importe, c’est de rester concentrée sur ma performance et sur celle du collectif.


“Avec Lolita, nos résultats seront nos cartes de visite”

Ici aux côtés de sa sœur Lolita, Lalie Saclier compte bien se faire un nom à force de travail.

Ici aux côtés de sa sœur Lolita, Lalie Saclier compte bien se faire un nom à force de travail.

© Sportfot

GPR. : Comment en êtes-vous venue aux chevaux ?
L.S. : Je ne suis pas du tout issue du sérail : j’ai commencé en poney-club, puis ai démarré la compétition en amateur à l’âge de douze ans. J’ai été tout de suite mordue de saut d’obstacles. J’ai ensuite été sélectionnée pour les championnats d’Europe. J’ai passé mon bac S sans aménagement d’horaires, je montais à cheval le soir et entre midi et deux. Avec le recul, j’avais un emploi du temps très chargé, avec des cours de 8h à 18h. J’ai quand même séché quelques cours, je ne suis pas une élève modèle (rires), mais j’ai fait au mieux pour concilier les deux ! Mes parents étant toujours un peu inquiets pour l’avenir, j’ai poursuivi en licence de gestion à Dijon, que je viens de valider en avril. Je suis donc débarrassée des études ! 

GPR. : Comment envisagez-vous l’avenir ? 
L.S. : J’ai commencé à travailler avec ma sœur Lolita début 2018, nous avons fondé notre entreprise de cavalières professionnelles. Être deux est vraiment une force. Nous sommes complémentaires, tant en termes de caractère que d’organisation ; nous nous entraidons et nous soutenons en permanence. Nous avons toujours travaillé ensemble, la confiance entre nous est maximale. C’est toujours un peu difficile de démarrer, surtout lorsqu’on n’est pas issu de ce milieu professionnel et qu’on est jeune, mais nos résultats seront nos cartes de visite.

GPR. : Avez-vous un modèle ? 
L.S. : Kevin Staut ! Ses parcours paraissent toujours très fluides et agréables à regarder. Tout a l’air facile avec lui. Son maintien au plus haut niveau depuis tant d’années est impressionnant, c’est un modèle à suivre. Internationalement, il y a tellement de systèmes différents et efficaces que je ne saurais choisir.

GPR. : Qui voyez-vous défendre les couleurs de la France lors des Jeux équestres mondiaux de Tryon, en septembre ?
L.S. : Pour moi, il faudra compter sur Olivier Robert, qui est très régulier, ce que son titre de champion de France a confirmé. Je vois bien aussi Nicolas Delmotte, qui a plusieurs chevaux pour ce niveau. Mathieu Billot me semble aussi solide, tout comme Simon Delestre, qui peut apporter sa pierre à l’édifice avec Ryan (Hermès Ryan des Hayettes, ndlr). Je suis très déçue de la blessure d’Aquila*HDC, qui a toujours de très bons résultats avec Patrice Delaveau (l’alezan propriété du haras des Coudrettes s’est blessé à Rotterdam, rendant ses chances de s’élancer à Tryon nulles, ndlr). J’aurais aimé qu’il y ait une femme dans l’équipe, mais les montures de Pénélope Leprevost et Alexandra Francart me paraissent un peu jeunes. En tout cas, cela fait du bien de voir de nouvelles têtes en équipe de France, c’est un renouveau intéressant !