"C'est dommage car l’année commençait très bien pour moi", Julien Épaillard
Signataire d'un début d'année 2020 remarquable, ayant décroché pas moins de dix-huit victoires en épreuves internationales depuis le mois de janvier, dont dont un Grand Prix 2* à Oliva, le Grand Prix secondaire du CSI 5*-W d'Amsterdam, une épreuve à 1,50m et le Grand Prix dominical à Bordeaux, sans oublier une deuxième place dans le Grand Prix de Coupe du monde de Bâle et une septième au CSI 5* de Doha, Julien Épaillard pouvait entrevoir une superbe année 2020. Confiné comme le reste de la population, le Français a donné de ses nouvelles.
Comment vivez-vous le confinement ?
Ça va. Je vais répéter ce que tous les cavaliers professionnels disent, mais nous sommes privilégiés car nous avons la chance de monter à cheval tous les jours. Même si elle est difficile, cette période sans concours me permet de m’occuper de mes jeunes chevaux, de m'entraîner avec mon cavalier. C'est un autre rythme. Et bien sûr, nous ne prenons aucun risque et respectons le confinement à la lettre.
Comment avez-vous vécu l’arrêt brutal des concours ? Vous surfiez sur une vague de succès incroyable !
C’est clair que c'est dommage car l’année commençait très bien pour moi. J'avais pas mal d’objectifs et un calendrier de concours vraiment intéressant, dont la finale de la Coupe du monde de Las Vegas faisait partie. Sportivement, cette longue pause ça remet tout en cause. La saison s’annonçait bien et mes chevaux étaient en grande forme. Évidemment, inutile de dire que nous aurions tous préféré que cette crise ne survienne pas, mais je relativise car mes proches sont en bonne santé et que je suis avec mes chevaux tous les jours ! Habituellement, nous sommes toujours partis à droite à gauche en concours, donc cette situation me permet d'être plus posé. Au début, ne pas avoir d'objectif au quotidien me donnait l'impression de perdre mon temps, mais cela me fait finalement voir certaines choses différemment.
Comment se passe le travail aux écuries ?
Je monte pratiquement tous les jours, et je m'octroie une ou deux journées off par semaine. Avec mes chevaux de concours, j'essaie de les garder un maximum en condition, en faisant du trotting par exemple. Environ une fois par semaine, on saute un petit parcours à 1,20m histoire de garder une routine. En tout cas, mes chevaux sont prêts à repartir, et nous espérons tous que tout ça va s’arranger le plus vite possible... D'autant que plus longtemps durera cette pause, plus les chevaux auront du mal à revenir rapidement au top.
De nombreux cavaliers, français et étrangers, font appel à des chefs de piste afin de trouver de l'inspiration ou des idées de parcours. Faites-vous la même chose ?
Non. L'inspiration je l'ai car je fais des concours tous les week-ends normalement ! (rire) J’ai simplement repris quelques plans de parcours de Grands Prix qui m’avaient posé des problèmes, où il y avait des combinaisons, des contrats de foulées ou des enchaînements techniques. Les plans sont facilement trouvables sur Longines Timing par exemple, donc j'ai dernièrement repris le tour du Grand Prix 5* de Bordeaux, que j'avais quitté avec huit points avec Toupie de la Roque. Toutefois, les chevaux de haut niveau n’ont pas besoin de sauter de vrais parcours, nous faisons davantage d'entretien que nous les mettons à l’effort. Avec les chevaux plus jeunes en revanche, ou qui n'ont pas beaucoup couru, on peut s'entraîner avec des parcours un peu plus techniques pour les faire progresser. J'ai notamment deux très bons chevaux de huit ans dans mes écuries, qui sont d'ailleurs nés à la maison (Julien Épaillard fait également un peu d'élevage sous l'affixe d'Auge, ndlr), avec qui je peux bien travailler. En gros, nous avons deux méthodes de travail différentes selon le type de cheval.
“J'ai simplement envie de retourner en concours!“
En dehors de monter à cheval, avez-vous trouvé des occupations pour passer le temps ?
Quand je ne monte pas à cheval, je passe le tracteur dans les champs, je fais un peu de bricolage, je passe la herse... Mon hobby c’est le motocross, mais on a vite fait de se casser un bras dans cette activité donc par civisme j'ai décidé de m'en passer. Je n'ai pas envie de prendre le risque de me retrouver à l'hôpital après un accident et d'occuper un lit. Franchement, mes autres activités sont assez tranquilles. J'en profite pour me balader en famille, passer du temps avec mes enfants et mes chiens, et faire des choses simples. Nous avons la chance de pouvoir prendre l’air à la campagne et d'être confinés dans un endroit où il y a pas mal d'espace.
Que pensez-vous du report des Jeux olympiques de Tokyo à l'été 2021 ? Si la FEI décide de maintenir les championnats d'Europe l'année prochaine, cela signifierait sans doute dire qu'il y aurait davantage de places disponibles pour d'autres couples en équipe...
Honnêtement, nous verrons l'année prochaine. Peut-être que cela pourra effectivement ouvrir quelques portes à de nouveaux couples, mais le temps est encore long. En tout cas, reporter les Jeux olympiques est une bonne décision. Il n’y avait pas d'autre choix possible de toute façon. C'est sûr que mes chevaux étaient en pleine forme cette année, donc c'est dommage car il y avait beaucoup de beaux rendez-vous, mais le seront-ils autant l'année prochaine ? J’ai la chance d'avoir un piquet de chevaux extrêmement fourni, avec quatre ou cinq chevaux capables de sauter des Grands Prix 5*.
De nombreuses personnes réfléchissent aux causes et aux conséquences de cette crise, et cette période de répit leur permet de réfléchir, de penser à l'avenir du sport et de la société plus généralement. Avez-vous des craintes ou des impressions à ce sujet ?
Honnêtement... J’ai assez pensé pendant ce confinement, j’ai simplement envie de me dépenser et de retourner en concours ! (Rire)