Mener une détente optimale pour la reprise
Après huit semaines de confinement, la reprise d’activité doit être progressive afin que le cheval puisse reconstruire sa musculature, retrouver son souffle et sa souplesse, tout en ménageant son physique et son mental. Le mieux est de repartir sur des bases saines et concentrer ses efforts sur le contrôle de l’allure, de l’attitude, de la rectitude et de la trajectoire. Voici quelques conseils pour mener des détentes optimales.
Après cette période de confinement et d’arrêt de la pratique équestre pour les amateurs, la reprise va devoir s’effectuer en douceur afin de ne pas risquer une blessure. Tout d’abord, il faut veiller à prendre le temps de marcher longuement au pas en main avant une séance, plus encore que d’habitude. Si le cheval sort du box, ce temps d’échauffement est d’autant plus nécessaire. Voici également l’occasion de tester sa concentration. Attention, il s’agit là d’une marche active destinée à mettre en route l’équidé, pas question de trainer les pieds en zigzagant de droite à gauche. La paire pourra explorer tous les recoins de la piste en s’attardant sur des zones qui pourraient poser problème, tout en marchant à l’épaule du cheval. Dès lors que le cheval semble échapper au contrôle, il faut s’arrêter et re-capter son attention. Cette première étape de l’entraînement va donner le ton du reste de la séance, et permettre aux deux partenaires de se mettre en jambe. Si le pansage oblige déjà à quelques étirements pour le cavalier, qui doit se plier pour curer les pieds ou se grandir pour brosser le dessus de la croupe, ces tours de piste vont réveiller les muscles et préparer la respiration. Au fil de ces premières minutes, il ne faut pas oublier d’ajuster la sangle au fur et à mesure afin que le cheval soit plus à l’aise.
Une fois prêt pour la seconde étape, il est temps de mettre pied à l’étrier, de préférence avec un marchepied pour préserver le dos du cheval tout en évitant de désaxer la selle. Tout d’abord, le mieux est de marcher encore quelques tours rênes longues, en se contentant de maîtriser la trajectoire, en effectuant un tour complet de la piste à chaque main, et en contrôlant la vitesse, s’assurant que les postérieurs sont actifs. La mise en main n’a alors aucune importance. Celle-ci deviendra une préoccupation sitôt les rênes ajustées. En cas de difficulté à conserver le pas, si le cheval trottine, se montre distrait, voire indiscipliné, ou se place totalement contre la main, le cavalier peut directement passer à la phase suivante en prenant du contact. Par sécurité, sur un jeune cheval, il est d’ailleurs préférable de marcher rênes longues en fin de séance uniquement. Pour les autres, lorsque les rênes sont tendues, la monture doit immédiatement venir sur la main, d’abord nuque basse et chanfrein sensiblement devant la verticale. Cette orientation d’encolure permet d’étirer la ligne dorsale. Le cheval doit se poser avec confiance sur le mors, fidèle au contact. L’idéal est d’obtenir un rapport franc, sans que le cheval ne tire ou ne lâche.
Pour parvenir à cette qualité de relation avec la bouche, l’équidé doit être dynamique et avoir les postérieurs énergiques et engagés. Selon son âge et son niveau, il est possible d’intégrer quelques exercices latéraux, de quoi débuter une gymnastique d’assouplissements : épaules en dedans avec un angle modéré, cession à la jambe avec peu de croisement, grandes hanches en dedans, appuyer couvrant toute la longueur, etc. On peut en parallèle vérifier si son cheval est dans les aides, réactif aux jambes, droit dans le couloir des rênes, canalisé par la main et le mollet extérieurs du cavalier, réceptif aux demandes de flexion et d’incurvation. Lorsqu’il semble attentif, malléable, souple et connecté, il est temps de passer à l’allure supérieure.
NE PAS NÉGLIGER LE TROT
On peut désormais demander le trot, en testant au préalable la réactivité du cheval. Au contact des jambes, celui-ci doit se propulser vers l’avant. L’idée est ensuite « d’entrouvrir la porte » pour l’inciter à cette transition : les épaules du cavalier s’avancent subtilement et les bras restent souples afin d’autoriser le mouvement dynamique. Pour autant, il ne faut pas lâcher totalement le contact, au risque de perdre la mise en main. Bien qu’une détente au galop soit mieux adaptée à certains chevaux, le temps de trotter quelques foulées dans l’optique de vérifier la régularité de votre partenaire est vraiment utile. De plus, cela risque d’être le meilleur moyen de passer à côté d’une gêne perceptible uniquement à cette allure. Tout le long de la détente, la monture doit avoir une attitude basse et ronde, donc pas question de flâner le nez au vent ! Il doit pousser sur les rênes pour solliciter l’engagement de la ligne du dessus dans son intégralité. Il ne s’agit pas de s’appuyer sur la main, mais bel et bien de se tendre vers le mors. L’activité insufflée aux postérieurs encourage l’engagement de l’arrière-main qui, à son tour, stimule la mobilisation de la croupe et du dos, articulant l’encolure. Il vaut mieux opter pour une allure dite « de travail » et simplifier la trajectoire, alternant entre lignes droites et cercles de vingt mètres. Le trot enlevé est de rigueur, voire même le galop en suspension. En s’allégeant, le cavalier libère le cheval et permet ainsi à son dos d’onduler.
CHANGER D’ALLURE RÉGULIÈREMENT
Après quelques minutes aux différentes allures, réparties à chaque main, le foisonnement de transitions est de mise. Entre et pendant les allures, il est bon de multiplier les variations, d’abord sur un cercle puis en ligne droite, en laissant suffisamment de distance pour que le cheval puisse s’installer avec confiance dans l’allure supérieure avant de demander la transition suivante. Si les changements sont harmonieux et nettement dans l’impulsion, on peut rapprocher les demandes, ou par exemple diminuer la taille des foulées au trot jusqu’à tomber dans un pas rassemblé le temps d’une paire de foulées, avant de demander le trot à nouveau. Ainsi, on améliore le fonctionnement de la demi-parade, la réaction aux jambes, l’engagement, l’abaissement des hanches, la flexibilité du rein et le port de l’avant-main. Il ne faut pas hésiter à intégrer des voltes qui aideront à ajuster la taille des foulées sans tirer sur les rênes, favorisant aussi la prise de poids sur les hanches. Rythme et équilibre doivent être maintenus, même si l’amplitude varie. Contrôle de l’allure et réactivité sont les maîtres mots de cette détente. La moindre action propulsive du cavalier doit recevoir une réaction instantanée.
L’attitude, sujet parfois tabou, est un élément central de l’entraînement. Elle ne doit jamais être le fruit d’une main qui tire. Hauteur de nuque et position de chanfrein sont le fruit de la réponse aux aides, de l’impulsion et de l’ajustement de l’amplitude. Si le cavalier ne parvient pas à contrôler la mise en main de son cheval, l’engagement de ses postérieurs et la souplesse de son dos peuvent être questionnés. L’important est de varier régulièrement le cadre, d’en être totalement maître et d’éviter les excès. Un cheval a tendance à se creuser en se plaçant trop haut, il faut donc travailler plus régulièrement la nuque basse avec une encolure arrondie. À l’inverse, s’il a du mal à se tenir, il est bon d’éviter un stretching en début de séance qui risquerait de faire basculer l’équilibre sur les épaules.
TRAVAIL LATÉRAL AU GALOP
L’ensemble des trois allures exploré, on peut envisager un travail latéral au trot enlevé et au galop. Cette étape et la précédente sont interchangeables en fonction des dispositions et caractéristiques du cheval. S’il manque d’activité, commencer par les transitions devrait le stimuler, éveillant son attention, testant ses réflexes et sollicitant sa mobilité. Au contraire, s’il est plutôt chaud, les cessions au trot vont le préparer au contact des jambes avant le premier départ au galop. En abordant le travail latéral, il est bon de favoriser le mouvement vers l’avant au croisement avant d’augmenter progressivement la difficulté. On peut débuter par de longues cessions à la jambe, avec une légère flexion de la ganache, épaules devant, de la ligne du milieu à la piste sur l’ensemble des soixante mètres. Au fur et à mesure, le cavalier peut demander davantage de croisement pour finalement suivre l’une des grandes diagonales.
On peut choisir de terminer la séance au pas ou d’entreprendre la préparation d’un exercice en fonction du programme hebdomadaire de votre cheval. Bien entendu, l’intensité doit respecter la forme du cheval, commençant tranquillement pour ensuite aller crescendo de jour en jour. Cette partie de l’entraînement ne doit être ni négligée, ni bâclée. Dans l’hypothèse où le temps manquerait, il est préférable de se contenter d’une détente bien construite plutôt que d’exiger trop tôt des mouvements à froid.
Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX du mois de mai.