“Concourir à haut niveau avec des chevaux qu’on a formés de A à Z est très agréable”, Pierre-Marie Friant
À Saint-Lô, le week-end passé, Pierre-Marie Friant a réussi une très belle performance en plaçant ses deux montures, Bianca Star (SF, Quick Star x Qualisco III) et Urdy d’Astrée (SF, Bouffon du Murier x Pamphile), sur le podium du sélectif Grand Prix à 1,45m. Ces deux chevaux, dont le second l’avait déjà conduit à la septième place du Grand Prix CSIO 5* de Gijón en 2019, Pierre-Marie les a formés depuis leurs débuts. Rencontre avec ce cavalier qui allie haut niveau le week-end, et jeunes chevaux la semaine.
Vous venez de remporter le Grand Prix de la première semaine du Normandie Horse Show à Saint-Lô avec Bianca Star, tout en plaçant Urdy d'Astrée à la troisième place de l’épreuve. Quel va être leur programme pour la suite de la saison?
À la fin du mois, je participerai à l’étape du Grand National de Tours-Pernay. Urdy d’Astrée prendra part au Grand Prix à 1,50 m et je pense que Bianca Star va également essayer de le sauter. Elle n’a jamais participé à des épreuves aussi hautes, mais au vu de sa performance à Saint-Lô, je vais essayer de la lancer dans le grand bain. Ensuite, au mois de septembre, le programme n’est pas trop calé. En octobre, nous allons viser Saint-Tropez (deux CSI 4* se tiendront à l’Hubside Jumping du 8 au 11 puis du 15 au 18 octobre, ndlr) où je suis déjà allé une fois cette année. Globalement, c’est un peu compliqué cette année pour construire un planning.
Vous avez participé à votre premier GP CSI 5* avec Urdy d’Astrée à l’occasion du CSIO de La Baule en mai 2019, puis avez terminé le Grand Prix CSIO 5* de Gijon à la septième place en septembre. La marche est-elle haute entre ces CSI 5* et les CSI des labels inférieurs?
Nous avons la chance en France de disposer du bon circuit qu’est le Grand National. Nous avons également la possibilité de prendre part à beaucoup de CSI 3*. Thierry Pomel (le sélectionneur national, ndlr) m’a laissé ma chance pour me lancer dans pas mal de concours, donc j’ai pu monter les échelons assez progressivement. Il est sûr qu’il y a une marche entre les CSI 5* et les autres labels. Le Grand Prix est forcément plus gros en CSI 5*, plus impressionnant. Cependant, je pars du principe que quand Thierry Pomel nous y envoie c’est que nous sommes prêts, et pour moi apparemment cela a fonctionné!
Tout en vous illustrant au plus haut niveau international ainsi que sur de beaux Grands Prix nationaux, vous continuez à monter des jeunes chevaux en Cycles Classiques. Accordez-vous une grande importance au fait de former vous-même votre relève?
Effectivement, c’est très important pour moi. Aujourd’hui, pour avoir des chevaux il faut pouvoir les former. J’ai préparé Urdy d’Astrée ainsi que Bianca Star moi-même depuis leurs débuts, et il est vrai que c’est très agréable de se dire que l’on arrive à haut niveau avec des chevaux que l’on a formés de A à Z. Et puis, quand on n’a pas la chance de pouvoir investir dans des chevaux, il faut pouvoir avoir des propriétaires qui nous font confiance, comme j’en ai aujourd’hui que je remercie d’ailleurs pour cela. Ce sont eux qui nous permettent de pouvoir aller faire du beau sport, qui nous suivent, alors c’est vraiment important de monter des jeunes chevaux.
N’est-il pas compliqué d’articuler votre programme entre les concours réservés aux jeunes chevaux la semaine, et les autres compétitions qui se déroulent le week-end?
J’ai une douzaine de jeunes de quatre à six ans. Parmi eux, je ne pense pas en avoir beaucoup qui puissent sauter de très grosses épreuves, mais nous avons toujours des espoirs sur certains. En ce qui concerne le programme, il faut une bonne organisation pour pouvoir allier les deux types de concours. J’ai la chance d’avoir une super équipe à la maison qui me permet de pouvoir le faire, et puis j’ai mon père qui est ancien cavalier professionnel et gère aussi tout cela. J’ai un super système qui me permet de faire cela.
“En Allemagne, les parcours sont un peu plus faciles pour les jeunes chevaux”
En raison de la crise sanitaire liée au Covid-19, aucun concours n’a eu lieu entre la mi-mars et la fin du mois de mai, date à laquelle les compétitions réservées aux jeunes chevaux ont pu reprendre. Comment avez-vous vécu cet arrêt du sport?
Il y a d’abord eu un peu de déception car nous avions préparé un très bon programme pour le début de saison, et Urdy d’Astrée allait très bien. Au final, cela n’a pas été si catastrophique que cela pour nous car cette période a permis de vraiment avancer dans le travail des jeunes chevaux, de peaufiner leur formation. Cela a donc été un bon point les concernant.
Lors de la reprise du Cycle Classique, la SHF, ne sachant pas encore quel montant lui serait alloué par le Fonds Éperon en raison de la crise, a fait le choix d’attribuer des points aux chevaux selon leurs performances et de les convertir en dotations à la fin de la saison seulement. Cela représente-t-il pour vous une contrainte financière?
Pour moi, pas spécialement, mais c’en est une pour les propriétaires, bien sûr. On leur demande d’investir tous les mois, de payer une pension, et quand on va en concours, il n’y a aucune rentrée financière pour eux. Ils ne peuvent pas uniquement payer, il faut forcément que nous leur redonnions de l’argent à un moment donné. Cette situation est donc assez difficile pour eux.
Une écurie comme la vôtre ne dépend-elle pas du tout des gains en concours?
Si, je récupère un pourcentage sur les gains des chevaux. Cependant, en ce qui me concerne je prends ma part sur les gains en fin d’année donc la décision de la SHF n’est pas très grave, car normalement nous allons les récupérer en fin de saison. Cela aurait tout de même été mieux pour tout le monde qu’ils attribuent les gains comme les autres années, au fur et à mesure des concours.
Vous concourez sur le circuit de la SHF réservé aux jeunes chevaux depuis plus de dix ans. Avez-vous observé une évolution de ce circuit et notamment du niveau des parcours proposés?
Pas tellement, par contre le niveau dépend vraiment des générations. Concernant le circuit en lui-même, je trouve personnellement qu’il est bien assez difficile pour les chevaux. J’ai eu la chance de travailler en Allemagne, où j’ai pu observer des parcours un peu plus faciles pour les jeunes chevaux. Ici, on veut toujours tirer le sans-faute parce qu’il faut en faire pour qualifier les chevaux (pour les finales nationales de Fontainebleau, ndlr) donc ce n’est pas toujours très académique. Je ne sais pas s’il y a des choses à changer dans ce système, mais en tout cas je n’ai pas observé de nette évolution du circuit depuis que j’y participe.