“J’ai envie de donner une chance à All In pour les Jeux olympiques de Tokyo”, Peder Fredricson
Quatrième du classement mondial Longines, Peder Fredricson a vécu des derniers mois heureux. La Suède n'ayant pas imposé de confinement à ses citoyens, le quadragénaire a pu profiter de sa famille et prendre le temps de vivre. Il a également pu remettre en forme son exceptionnel H&M All In, vice-champion olympique à Rio de Janeiro en 2016 et blessé depuis le CHI de Genève, en décembre. Compétiteur avant tout, il a savouré le retour en compétitions internationales.
Comment allez-vous et comment vivez-vous la situation actuelle ?
Je vais très bien, je suis en bonne santé et je n’ai pas encore attrapé le virus. Heureusement, il en va de même pour ma famille. Notre entreprise fonctionne toujours bien et j’ai été suffisamment chanceux de pouvoir me rendre dans de beaux concours tels que Valkenswaard et Grimaud.
La Suède n’a pas imposé de confinement et de mesures strictes à ses citoyens. Qu’en pensez-vous et comment avez-vous traversé cette période ?
C’est difficile à dire. Vous savez, chaque pays est différent et la Suède est un grand territoire. Les gens ne vivent pas réellement près les uns des autres, comme cela peut être le cas ailleurs. Je pense que dans quelques années nous saurons si cette décision était la bonne ou non. Pour l’heure, tout va plutôt bien en Suède. Personnellement, je vis dans la campagne, donc notre vie quotidienne n’a pas été tellement impactée. Nous ne mettions pas de masques ou quoi que ce soit. J’ai même pu prendre part à des concours nationaux.
Qu’avez-vous fait entre mars et juin, la période pendant laquelle vous n’avez pu concourir internationalement ?
C’était assez agréable je dois dire. J’ai pu passer un peu plus de temps avec ma famille. Je suis allé voir des matchs de foot avec mes garçons, car ils en jouent. Nous avons eu le temps de travailler aux écuries, de réaliser un ménage de printemps et de faire des choses pour lesquelles nous n’avons pas suffisamment de temps d’habitude.
Avez-vous pris le temps de vous adonner à la peinture, une autre de vos passions ?
Oui, un peu. Cela n’a rien donné de très bon, mais j’ai essayé (rires).
“Chacun doit être responsable à son niveau”
Que cette situation inédite vous inspire-t-elle ? Vous a-t-elle fait réfléchir sur des problématiques que traversent la planète actuellement ?
Pas tellement, en fait. On savait déjà presque tout avant que la pandémie ne frappe. J’ai bien sûr été un peu surpris, comme tout le monde. Mais concernant les problématiques mondiales, nous étions au courant. Nous devons tous travailler pour que celles-ci s’améliorent, notamment pour l’environnement. Chacun doit être responsable à son niveau. Dans mon sport, le saut d’obstacles, il est difficile de changer profondément ses comportements car si vous voulez faire partie du haut niveau, il est nécessaire de voyager à travers le monde.
L’organisateur de concours Christophe Ameeuw a notamment défendu l’idée qu’il fallait être plus raisonné et ne plus traverser le monde chaque week-end pour concourir. Êtes-vous en ligne avec cela ?
Oui, je pense que c’est une bonne idée, pour plusieurs raisons. En premier lieu pour l’environnement bien sûr, mais aussi pour les chevaux. Plus nous nous rapprocherons d’un tel modèle, mieux ce sera pour les cavaliers, les chevaux et la planète. Cela permettrait aussi de limiter les coûts. Je pense que ces changements vont arriver. Le monde change si vite… Et cela est nécessaire.
Parlez-vous de cette situation avec vos confrères cavaliers ?
Oui, et je crois que certain ont mieux vécu le confinement que ce qu’ils l’auraient pensé. Quelques-uns ont été vraiment frustrés, mais d’autres ont pu profiter davantage de leurs familles. Si on veut rester au sommet du sport et du classement mondial, cela implique beaucoup de voyages, presque tous les week-end. La plupart de ceux avec qui j’ai échangé ont plutôt apprécié cette période finalement. Mais heureusement qu’il y a eu une accalmie.
Comment avez-vous vécu le retour en compétitions internationales en juin, après trois mois loin de tout cela ?
Cela m’a bien sûr rendu très heureux. Le fait de prendre de nouveau part à un Grand Prix CSI 5* a été très stimulant. Il s’agit de l’épreuve reine, la dotation est importante, nous voulons tous réussir. Le fait de vivre à nouveau une situation dans laquelle je dois être extrêmement concentré m’avait manqué. Le confinement a été très relaxant et heureux, mais je n’ai pas eu l’occasion d’être concentré sur un objectif, et cela m’a beaucoup manqué. La stimulation de la compétition vous pousse en avant. Cela permet indiscutablement de devenir meilleur.
Après avoir très peu concouru en 2019 et tenté un retour en janvier 2020, Hansson WL est de retour en compétitions internationales depuis mi-août. Comment va-t-il ?
Il va très bien. Il redémarre doucement mais pour l’heure tout va pour le mieux. Je suis heureux de la manière dont il revient. J’espère qu’il pourra retrouver son meilleur niveau et je vais le construire doucement et faire un parcours après l’autre.
Auparavant montée par la Tchèque Emma Augier de Moussac, H&M Chacco Dia a rejoint vos écuries en fin d’année dernière. Quel regard portez-vous sur son évolution ?
Cela n’a pas très bien commencé. Tout se passait bien avec son ancienne cavalière et nous l’avons achetée. Je ne réussissais pas à la monter au départ. Nous avons eu cette pause et avons pu redémarrer dans des épreuves un peu plus modestes. Cela va mieux désormais, je vais prendre le temps de former un couple avec elle sur de petits parcours.
À plusieurs reprises, il lui est arrivé de s’arrêter en piste. Manque-t-elle de confiance en elle ?
Je pense qu’il s’agit d’un souci de communication. Nous ne parvenions pas à nous comprendre. J’espérais pouvoir l’engager dans de belles épreuves assez rapidement, mais pour ce genre de rendez-vous, la communication doit être parfaite. Parfois, cela fonctionne, d’autres fois non. Je crois que le fait d’avoir une pause et de reprendre dans de petites épreuves lui a fait le plus grand bien, et qu’il s’agira d’un moyen de gagner sa confiance.
“All In n’était pas très en forme en fin d’année dernière”
À neuf ans, H&M Crusader Ice a pris part à son tout premier Grand Prix CSI 3* fin septembre à Grimaud, qu’il a conclu au huitième rang avec un double sans faute. Alors que vous doutiez encore de ses moyens dans un entretien publié dans le magazine GRANDPRIX en fin d’année dernière, comment jugez-vous sa progression ?
Il s’est en effet classé et devrait courir le Grand Prix CSI 4* cette semaine (interview réalisée le 8 octobre, ndlr). J’ai changé d’avis par rapport à ses moyens, il a prouvé de belles choses cette année. Il a notamment remporté un Grand Prix national et a pris la deuxième place du championnat de Suède. Avec son classement à Grimaud, cela prouve qu’il progresse très bien. Il est vraiment génial à monter en plus.
En mars, Zacramento a été associé à sa propriétaire Tove Håkansson dans un CSI 1* à Oliva. Vous ne le montez plus ?
Non, il est retourné chez sa propriétaire en début d’année. Il concourt désormais sous sa selle.
Avec le report des Jeux olympiques de Tokyo en 2021, vous êtes vice-champion olympique pour une année supplémentaire. Avez-vous bon espoir que l’échéance puisse se tenir l’été prochain ? Si oui, comment allez-vous vous y préparer ?
Oui, je crois qu’il y a de grandes chances qu’ils essaient de maintenir l’évènement. Je vais tenter de préparer tous mes chevaux qui sont capables de concourir jusqu’à 1,60m, même ceux qui ne seraient pas spécialement des premiers choix. J’aimerais leur donner une chance à tous de montrer ce dont ils sont capables. Je crois que lorsqu’ils ont un cheval capable de sauter 1,60m, cela est valorisant pour les propriétaires. C’est ma philosophie, et à la fin, je serai très heureux si j’en avais ne serait-ce qu’un sélectionnable (rires) !
Âgé de quinze ans, H&M All In n’a pas concouru depuis le CHI de Genève, en décembre dernier. Comment va-t-il ?
Il a en effet eu une longue pause et a profité des pâtures avec un autre cheval, mais il est désormais de retour à l’entrainement. J’ai envie de lui donner une chance pour les Jeux olympiques de Tokyo. Il n’était pas très en forme en fin d’année dernière donc je lui ai donné le temps de se reposer. J’essaie désormais de le remettre en forme pour l’année prochaine.
Vous avez partagé des photos sur lesquelles on vous voit le promener en main, alors que vous êtes sur un autre cheval…
Oui, il était si gros que je n’osais pas le monter (rires) ! Mais c’était très sympa de pouvoir lui faire prendre l’air ainsi pour quarante-cinq minutes environ. Nous vivons à la campagne, donc il y a du dénivelé ce qui était très bon pour lui.
Avez-vous un plan en tête pour la saison indoor ?
Je vais essayer de concourir à Lyon, Vérone ainsi que Genève. J’en ferai peut-être d’autres entre temps, sûrement des concours nationaux avec d’autres chevaux.