Les centres équestres contraints de naviguer à vue pour 2021
2021, sera-t-elle une deuxième année difficile ou une lueur d’espoir pour les clubs ? C’est la question que se posent les gérants de centres équestres et poney-clubs. Entre casse-tête d’organisation compte tenu du couvre-feu et crainte d’un reconfinement potentiellement fatal pour certains, l’incertitude règne dans la plupart des club house de France.
Comme cela est le cas pour d’autres secteurs d’activité, les poney-clubs et centres équestres français ont subi de plein fouet la crise sanitaire du Covid-19, et notamment à cause du premier confinement, qui a impliqué deux mois de fermeture totale et de manque à gagner pour la profession. Les appréhensions concernant l’année 2021 sont nombreuses et dépendent de nombreux facteurs particuliers à chaque club : leur taille, leur situation géographique, le nombres de chevaux de propriétaires en pension, l’impact du premier confinement, la saison estivale, la rentrée...
La rentrée de septembre a souri aux centres équestres avec une hausse de 27 000 nouvelles licences. Même si les structures ont globalement connu une bonne rentrée avec plus d’inscriptions - expliquées en partie par le fait que les nouveaux inscrits ont délaissé certaines activités en salles pour le plein air en raison du contexte sanitaire – les gérants d’établissements restent prudents quant à la suite des événement. Armand de Martimprey, à la tête du centre équestre des Deux Rives situé à Strasbourg, explique : “Nous avons fait une très bonne rentrée avec un très bon été, c’était très positif ce qui, je vous avoue, me permet de garder le moral aujourd’hui car pour 2021, il est difficile de le garder. Nous avons perdu à peu près 80 000 euros au premier confinement et nous avons heureusement réussi à combler un peu cette perte”.
Selon les gérants de centres équestres, une des difficultés principales est la réorganisation perpétuelle qui accompagne chacune des nouvelles annonces faite par le gouvernement. Les clubs doivent s’adapter et le faire vite pour continuer à pouvoir fonctionner dans une période où le moindre coup d’arrêt pèse un peu plus sur le préjudice initial. Il faut trouver de nouveaux horaires sur des journées qui se raccourcissent de plus en plus à cause du couvre-feu, désormais imposé à 18h sur tout le national. Jean-Charles de Cours, gérant du centre équestre du domaine de Cazettes à Lavardac, dans le Lot-et-Garonne (47), se voit contraint de déplacer des cours au dimanche ou d’essayer de jongler avec les horaires. “Tant qu’on ne nous impose pas un possible confinement pour le week-end, nous allons basculer les cours impactés par le couvre-feu le dimanche. Au départ, avec le couvre-feu à 20h, il ne s’agissait que d’un cours du samedi, mais maintenant, je dois en rajouter un autre et trouver de nouveaux horaires pour les cavaliers adultes qui montaient le soir dans la semaine et dont les disponibilités ne sont pas toujours les mêmes en journée”, explique-t-il. “Après les annonces du jeudi 16 janvier s’était ajoutée la difficulté d’utiliser les manèges, car seules les structures disposant d’espaces qui ne sont pas complètement clos peuvent continuer à les utiliser”. Une difficulté également évoquée par Armand de Martimprey : “Aujourd’hui en Alsace, compte tenu de la météo, on ne peut utiliser que les manèges. Or, j’ai beaucoup de débutants, je ne peux pas les accueillir pour l’instant sans manège, ce qui est bien dommage”.
“Le pire scénario serait l’annonce d’un troisième confinement”
La crainte qui plane reste celle du reconfinement. Si durant la première mise en arrêt de leur activité, la belle saison prenait ses quartiers sur le territoire et les chevaux vivant au box pouvaient profiter des pâtures, permettant aux gérants de diminuer les rations par l’absence de travail et le complément foin et herbe à volonté, ce n’est pas le cas en cette saison. Un véritable casse-tête économique et logistique pour les clubs. Les gérants interrogés s’accordent tous à dire qu’un nouveau confinement serait catastrophique si les mesures étaient les mêmes qu’en mars dernier. Jean-Michel Jahan, propriétaire du Centre hippique de Grasse (06) a fait part de son inquiétude : “Le pire scénario serait l’annonce d’un troisième confinement. Un club hippique en confinement est très compliqué à gérer. Nous faisons un chiffre d’affaire qui nous ne nous permet pas d’obtenir des subventions. J’ai quatre-vingt-dix chevaux dans la structure, dont une partie infime de pensions. Je suis obligé de garder mes salariés, les charges ne bougent pas. La situation est difficile pour tout le monde”.
Les professionnels interrogés s’accordent par ailleurs pour dire qu’ils ont été écoutés par les instances. Une des personnes interrogées gérant une structure dans la Creuse (23) évoque les assouplissements obtenus par les clubs et relayés à chaque dirigeant par la FFE. “L’assouplissement nous a permis de continuer à accueillir des groupes scolaires, des groupes de personnes handicapées puis a été élargi aux propriétaires. Le fait d’avoir bénéficié d’une réouverture le 15 décembre a quand même permis de respirer un peu, tandis que d’autres établissements commerciaux ou culturels sont encore fermés”.
L’impression générale pour les mois à venir et 2021 reste cependant celle de “naviguer à vue”, comme l’a confié un des dirigeants. Comme pour les autres secteurs d’activité, les nouvelles mesures sont toujours imprévisibles. Les clubs tentent tant bien que mal de continuer à fonctionner en respectant chacune des contraintes imposées par la situation sanitaire. Le sentiment de retard quant à l'arrivée des décrets, l’incertitude du maintien ou non de l’activité fait ressentir une tension générale dans la profession, qui doit continuer à entretenir une cavalerie et parfois rémunérer des salariés. “J’ai quarante chevaux qui m’appartiennent, huit salariés qui comptent sur cette activité pour pouvoir manger, c’est une grosse responsabilité”, a conclu Armand de Martimprey.