Entre témoignages et engagements institutionnels, Longines Equita Lyon s’engage pour la lutte contre les violences sexuelles

Mercredi dernier, à l’initiative des organisateurs du salon Longines Equita Lyon et de la Fédération française d’équitation, une longue et riche conférence de sensibilisation aux violences sexuelles s’est tenue dans le village VIP d’Eurexpo. En présence d’Audrey Larcade, dont GRANDPRIX avait déjà reçu la parole en septembre 2020, Marie Leduc Lusteau, psychologue et amie de cette dernière, Anthony Savoie, représentant rhônalpin de l’association Colosse aux Pieds d’Argile, Fabienne Bourdais, déléguée ministérielle à la lutte contre les violences dans le sport, et Christian Boyer, président du comité d’éthique de la FFE, cette après-midi a permis de mettre en lumière un combat dont l’importance est désormais reconnue de tous.



“Il y a quelques années, en 2017, j’avais vécu une édition d’Equita Lyon très compliquée, car j’avais dû passer la semaine à proximité de mon agresseur (Adamo Walti, ndlr), dont les boxes étaient situés juste à côté des miens... À chaque fois qu’il me croisait, il me regardait dans les yeux avec un sourire narquois, comme pour me signifier qu’il avait gagné après que ma plainte a été classée sans suite”, se remémore Audrey Larcade au micro, les trémolos dans la voix. Cette année, quatre ans après, la jeune et lumineuse femme de trente-cinq ans était invitée au salon Longines Equita Lyon pour témoigner des agressions sexuelles et viols qu’elle a subis dès l’âge de dix ans de la part de son ancien entraîneur, mis en examen en début d’année, à l’occasion d’une longue conférence de sensibilisation aux violences sexuelles. Si les dizaines de chaises aménagées dans le village VIP du hall 4 n’ont hélas pas toutes été occupées - seuls des représentants institutionnels, journalistes consciencieux et proches de la victime étaient présents - cette conférence a symbolisé toute l’importance désormais reconnue de la lutte contre les violences sexuelles dans les sports équestres. “Oser parler de ce fléau dans un salon du cheval est très nouveau”, confie la directrice de structure équestre à GRANDPRIX. “De la part de GL events (organisateur de l’événement lyonnais, ndlr) et de la Fédération française d’équitation (FFE), c’est un signal très fort d’avoir décidé de le mettre en avant car cela reste un sujet compliqué et encore tabou pour beaucoup de gens. Aujourd’hui, j’ai l’impression que les institutions soutiennent vraiment cette cause, donc c’est très positif. J’étais très stressée pour cette conférence, d’autant que le fils de mon agresseur (ce dernier est décédé en avril dernier, à l’âge de quatre-vingt-ans, après avoir contracté la Covid-19, ndlr) a eu le culot de se présenter à l’entrée… Comme il s’était inscrit préalablement, le service de sécurité d’Equita, qui a été vraiment efficace et compréhensif, était prévenu et a fait le nécessaire. Dérouler mon témoignage devant des gens qui me traitent de menteuse et m’insultent sur les réseaux sociaux aurait été insoutenable pour moi. Une heure avant, j’ai aussi eu la surprise de rentrer dans le stand du sellier avec lequel je travaille et voir des dizaines de livres de mon agresseur étalés... Puisqu’il n’y a pas de raison de faire seulement la promotion d’un agresseur, j’ai proposé de mettre mon livre (Mon corps pour une coupe, paru en octobre chez l’éditeur Jets d’encre, et co-écrit avec Marie Leduc Lusteau, psychologue et amie de la victime, ndlr) à côté du sien. La photo que j’en ai prise est assez marquante et révélatrice du combat qu’il reste encore à mener. Pour autant, même si je m’attendais à mettre un pied dans la fosse aux lions, je me suis sentie très soutenue durant tout le week-end. Beaucoup de gens sont très contents du fait que j’ai pu enfin parler. C’est extrêmement positif.” 



Un rappel des maîtres mots de la lutte contre les violences: sensibilisation, formation et accompagnement

Précédemment au poignant témoignage d’Audrey Larcade, dont le récit aura fait verser des larmes à quelques spectateurs, notamment à l’une de ses anciennes camarades d’écuries de l’époque, des intervenants ont rappelé les fondamentaux de la lutte contre les violences sexuelles: sensibiliser, former et accompagner. Représentant rhônalpin de Colosse aux pieds d’argile, association reconnue d’utilité publique engagée sur le sujet, Anthony Savoie a ainsi présenté des pistes de réflexion et des recommandations, dont chacun peut se saisir dans le cadre de l’exercice de son travail. “Au sein de notre association (qui a signé une convention avec une quarantaine de fédérations sportives nationales, dont la FFE en mars dernier, ndlr), nous avons élaboré une charte de bonne conduite, que nous diffusons partout où nous le pouvons, à destination des professionnels du milieu sportif et des parents d’élèves. Par exemple, nous recommandons d’instaurer un check au lieu d’une bise pour se saluer, de ne pas prendre de douche avec un enfant, de limiter l’accès aux vestiaires, de passer par les parents pour la transmission d’informations entre entraîneur et élève, de ne pas mettre un encadrant dans la même chambre qu’un sportif en cas de déplacement, ou encore de demander la permission lorsqu’un entraîneur souhaite corriger la position d’un élève.” Aussi, le porte-parole de cette association d’une vingtaine de salariés a tenu à rappeler les différents délits et crimes relatifs aux violences sexuelles, allant du viol à l’agression sexuelle, en passant par l’atteinte sexuelle, qui condamne toute relation, consentie ou non, entre un mineur et une personne majeure ayant une responsabilité de droit ou de fait.

À sa suite, Christian Boyer, président du comité d’éthique de la FFE, a tenu à promouvoir le récent plan de lutte et de prévention de l’instance fédérale, comprenant notamment le renforcement de la charte éthique et déontologique, l’organisation de séminaires de formation à destination des animateurs, cavaliers, formateurs, et dirigeants, la campagne “N’en parle pas qu’à ton cheval”, ou encore la tenue de conférences de sensibilisation lors de grands événements. Fabienne Bourdais, déléguée ministérielle à la lutte contre les violences dans le sport et inspectrice générale de l’éducation, du sport et de la recherche, a également mis en avant les avancées légales de ce combat, dont le fait le plus important est probablement la généralisation du contrôle d’honorabilité pour les encadrants bénévoles et les membres des équipes dirigeantes des associations sportives, mis en oeuvre depuis la convention nationale de prévention des violences du 2 avril 2021, installée par Roxana Maracineanu, ministre déléguée chargée des Sports.  

Concernée au premier plan en tant qu’actrice de la loi, la députée Maud Petit, élue de la quatrième circonscription du Val-de-Marne et co-présidente du groupe d'études pour le droit des enfants et la protection de la jeunesse, est même allée plus loin. “Je me bats personnellement pour l'imprescriptibilité de tous les crimes commis sur un mineur”, a déclaré l’élue du MoDem, qui s’est déjà dissociée de la majorité présidentielle à de multiples reprises à l’Assemblée nationale, sur ce sujet comme sur la protection de l’environnement. “Audrey s’est métamorphosée depuis sa première visite dans mon bureau de parlementaire. Aujourd’hui, je l’ai à peine reconnue; c’est une superbe et radieuse jeune femme. Si beaucoup des intervenants l’ont déjà fait, je tiens une nouvelle fois à saluer l’initiative des organisateurs d’Equita Lyon, car elle est très importante pour ce combat.”