Quel métier choisir pour s'épanouir dans le monde du cheval? (1/2)

Vous voulez faire de votre passion votre métier? Il existe de nombreuses formations dans le monde du cheval, allant de CAP à bac+6, permettant d’embrasser toutes sortes de professions. À choisir en fonction de vos inclinations, compétences, qualités, ambitions, de votre niveau équestre, votre situation géographique et votre degré de mobilité... Ce dossier consacré aux formations se concentre sur les quatre métiers les plus porteurs en termes d’embauche et d’évolution professionnelle: enseignant, palefrenier-soigneur, cavalier d’entraînement et lad-driver/lad-jockey.



Pour une bonne partie des passionnés d’équitation, travailler dans le monde du cheval représente souvent un objectif, sinon un rêve de vie. Pour autant, certains hésitent parfois à franchir le pas, d’autant plus dans un contexte socio-économique difficile – 34000 personnes de plus qu’en 2017 sont inscrites à Pôle emploi –, fragilisé davantage depuis la pandémie de Covid-19. Aussi, si le nombre de personnes sans activité en France est en baisse (-5,5%) par rapport à l’an passé à la même période, on constate une hausse du nombre de travailleurs précaires (+4%), donc employés à temps partiel, en activité réduite ou en intérim, représentés dans les catégories B et C. 

Toutefois, certains secteurs de la filière équestre se portent bien et recrutent davantage que les autres. En effet, les métiers d’enseignant, de palefrenier-soigneur, de cavalier d’entraînement et de lad-driver/lad-jockey apparaissent comme porteurs. D’après Équi-ressources, plateforme dédiée au monde du cheval qui met en relation les employeurs et les candidats, informe sur les métiers et les formations et publie chaque année des analyses de l’emploi et de la formation, la filière équine française a généré environ 66000 emplois en activité principale, dont sept emplois sur dix en lien direct avec le cheval (producteurs et utilisateurs du cheval), selon les chiffres de 2019. Aussi, il existerait une différence entre les attentes des postulants et celles des employeurs. En effet, au-delà des problèmes d’attractivité et afin d’expliquer les abandons de recrutements faute de candidat trouvé, les employeurs pointent principalement le manque d’expérience, les niveaux d’équitation insuffisants et un manque d’autonomie des candidats. Les conditions de travail proposées lors des entretiens d’embauche peuvent également décourager les aspirants potentiels (pénibilité, horaires, etc.).

D’après les chiffres d’offres et de demandes, un manque de candidats se fait ressentir sur le marché du travail. Une offre sur deux est d’ailleurs pourvue en un mois et demi pour recruter les métiers dits “de terrain”. Pour tous, le nombre de postulants reste supérieur au nombre d’offres d’emploi (taux inférieur à 1). Globalement, la filière équine souffre de tensions de recrutement persistantes sur certains métiers, et d’un déficit inédit d’attractivité de ses offres. Ces difficultés s’expliquent en partie par une pénurie de candidats sur le marché du travail, et par un décalage entre leurs profils et les besoins des postes. Parmi les raisons évoquées, les jeunes sont de plus en plus séduits par les écuries étrangères et leurs conditions d’emploi attractives. Par exemple, de nombreux cavaliers d’entraînement partent l’hiver dans des pays tels que les États-Unis ou l’Australie et ne reviennent qu’à la fin du printemps. Or, en France, c’est a cette période que les entraîneurs rentrent les poulains à l’enseignement. Toutefois, il faut noter que les postulants et recrutés sont majoritairement des jeunes (40% ont moins de vingt-cinq ans), et sept postulants sur dix sont des femmes. 

Concernant le niveau de formation, les employeurs apparaissent comme ouverts à l’embauche de candidats ayant peu d’expérience (neuf offres sur dix sont accessibles avec moins de quatre ans d’expérience). Les métiers liés à l’utilisation du cheval attirent des candidats plutôt diplômés: plus de 70% ont au moins un niveau bac ou plus. Les postulants pour devenir lad-driver/lad-jockey comptent la plus forte part de niveau CAP: un tiers des postulants sont titulaires de ce dernier. En revanche, les employeurs privilégient les niveaux techniques; une offre sur deux précise un niveau d’équitation, et quatre sur dix souhaitent au moins un niveau Galop 7. Les candidats les plus expérimentés sont recherchés aux postes de responsable d’écurie ou premier garçon: près de quatre offres sur dix attendent une expérience de plus de quatre ans, avec un CDI à la clé, pour huit offres sur dix. Il est à préciser que les employeurs proposaient en 2019 davantage de CDI pour les enseignants d’équitation, lad-driver/lad-jockey, cavaliers (sport et soigneurs) et responsables d’écurie. Globalement, une offre sur deux concerne un CDI.



Entreprenariat et bien-être au travail, les conséquences de la Covid-19

Paradoxalement, l’entreprenariat se développe grandement, concernant surtout les animateurs et enseignants. Cette tendance pose la question de l’attractivité des structures équestres et la nécessité de s’adapter aux mutations du monde du travail, aux nouvelles relations de subordination à développer pour attirer et fidéliser la nouvelle génération. La crise sanitaire de la Covid-19 a beaucoup joué dans ce sens, avec le développement de nouvelles formes d’organisation du travail et de management. Face à cette demande croissante, Équi-ressources a développé un nouveau service web gratuit “sur mesure” adapté à la mise en relation entre les prestataires de services et les professionnels et amateurs de la filière équine, qui verra le jour courant 2022. 

De manière générale, les attentes des salariés évoluent, conduisant les employeurs à trouver les moyens de s’adapter afin d’attirer les bons candidats avec les profils adaptés. Le salaire et les conditions de travail restent des facteurs décisifs dans l’acceptation d’une offre d’embauche. Les candidats privilégieront de plus en plus l’environnement de travail, la flexibilité, l’équilibre personnel-professionnel, le management horizontal, etc. Ainsi, la rédaction de GRANDPRIX a proposé à ses lecteurs exerçant leur métier dans le domaine de l’équitation de donner leur avis sur certains points de leur activité dans un sondage publié en décembre dernier. Il en ressort que la majorité semble plutôt satisfaite de son sort puisque peu de sondés envisagent de changer, à court ou long terme, de carrière. Toutefois, ils sont nombreux à pointer des problématiques de salaires trop bas, conditions de travail pénibles, perspectives d’évolution de carrière trop minces, et un manque de corrélation entre le contenu de certaines formations et la réalité des métiers. 

Les métiers liés à l’utilisation du cheval sont les plus en tension de la filière équine, tandis que les plus exposés au manque de personnel sont le lad-driver/lad-jockey et l’enseignant d’équitation. Ce premier connaît la plus forte évolution, mais les employeurs pointent malgré tout le manque de candidats qualifiés et le manque de savoir-être professionnels tels que la polyvalence, la capacité d’adaptation, la motivation, la disponibilité, ou encore la présentation et le relationnel. Les métiers les plus exposés aux pénuries de personnel sont les écuries de course, d’autant que la concurrence entre entraîneurs est rude. De fait, cette situation privilégie le candidat au moment de la négociation du contrat. Les employeurs de cavalier-soigneur rencontrent moins de problèmes de recrutement car les candidats restent nombreux. Toutefois, ils soulignent le décalage entre le niveau d’équitation des candidats et le niveau recherché. 

Palefrenier est le métier le plus recherché sur équi-ressources (25% des offres). Il est de plus en plus difficile de trouver un palefrenier-soigneur capable de répondre à toutes les attentes des employeurs. Ces derniers soulignent l’importance des compétences. Les grandes amplitudes horaires, les faibles rémunérations et les minces perspectives d’évolution favorisent le turn-over de ces postes. Équi-ressources constate d’ailleurs l’arrivée d’ouvriers agri- coles provenant d’autres secteurs (élevage bovin par exemple), qui auraient les gestes et le sens de l’observation voulus, recrutés à des postes de palefrenier. Afin de remédier à ces problèmes, Équi-ressources a entrepris deux démarches inédites: une campagne de promotion et d’attractivité des métiers du cheval, développée sous le hashtag #lechevalrecrute, ainsi que l’intégration de quatre métiers (enseignant, palefrenier-soigneur, cavalier d’entraînement, lad-driver/lad-jockey) au concours de Meilleur ouvrier de France (MOF) afin de valoriser le savoir-faire de ces métiers porteurs. Cela constitue en effet une source non négligeable de motivation, un solide passeport pour l’emploi, un véritable outil de recrutement et une promotion des formations. 

Parmi les nouvelles professions en plein essor, et pas seulement dans la filière équine, il y a celle d’influenceur. Porté par l’explosion des réseaux sociaux, l’influenceur est un internaute devenu relais d’opinions auprès des consommateurs, et se voit pour cela rémunéré par différents partenaires. Ces acteurs du web ont tendance à faire rêver en postant du contenu esthétiquement très léché, mettant en avant des produits souvent fournis par des marques désireuses d’exploiter ce moyen de publicité nouvelle génération pour toucher un public plus large. Il s’agit d’un métier dans lequel de nombreux influenceurs gagnent ainsi bien leur vie. Toutefois, il n’est pour l’heure quasiment pas réglementé, aucune formation officielle n’existant. “C’est un nouveau moyen de communication, surtout très porteur pour les jeunes”, admet Patricia, cinquante-huit ans, propriétaire d’une pension de chevaux, tandis que Fanny, trente ans et cavalière de jeunes chevaux, pense qu’il faut “utiliser ces métiers pour s’enrichir et transmettre. Ils peuvent être de super atouts!” De son côté, Alice, enseignante de trente-quatre ans, évoque même des vertus bénéfiques pour toute la filière: “L’arrivée de ce métier est une bonne chose car cela permet de fonder une communauté équestre.” Pour autant, la majorité des sondés s’en méfie, comme Jennifer, trente ans, cavalière et enseignante-gérante d’une écurie: “Je ne vois pas cela d’un très bon œil car les influenceurs sont souvent des gens qui ne connaissent pas forcément la réalité de la filière équine ou même des chevaux en général. Ils ne sont pas professionnels, mais sont admirés juste parce qu’ils ont beaucoup d’abonnés. Du coup, je trouve aujourd’hui que les adolescents donnent beaucoup plus d’importance à leur tenue et aux marques plutôt qu’à leur formation à cheval.” Ce que confirme Yves, soixante-quinze ans et enseignant BEES2: “Je porte un regard mitigé sur ce métier, car la connaissance du cheval (zootechnie, biomécanique, etc.) est souvent reléguée au second plan.” Les sondés, sûrement plus sévères, disent aussi que “c’est dans l’air du temps, mais triste”, que “ce n’est qu’un monde de paillettes”, que “c’est un effet de mode”... À suivre!



Les bons filons des formations

Si vous désirez exercer dans le monde du cheval, il est opportun de vous pencher sur l’offre disponible afin d’être certain de trouver un emploi et d’évoluer de façon satisfaisante au sein de cette place. Depuis plusieurs années, quatre métiers sont particulièrement en tension (offre supérieure à la demande): enseignant, palefrenier-soigneur, cavalier d’entraînement et lad-driver/lad- jockey. Chacun de ces métiers requiert des compétences et qualités particulières. De plus, ils nécessitent de bonnes conditions physiques, ces métiers étant manuels, s’exerçant essentiellement en extérieur et nécessitant une vraie capacité d’adaptation. Pour ce faire, il existe des formations dédiées qui demandent un minimum de niveau d’équitation et de connaissances du cheval. Elles commencent au niveau CAP, après une classe de Troisième, et peuvent se poursuivre sur un bac pro. Il en existe deux: le bac pro Conduite et gestion de l’exploitation agricole (CGEA), tourné vers l’élevage et qui permet de gérer une structure proposant des prestations d’entraînement, pension, enseignement et commerce, et le bac pro Conduite et gestion de l’entreprise hippique (CGEH), qui est, quant à lui, lié à la valorisation du cheval (élevage, débourrage, dressage). Insistant sur la gestion spécifique à l’entreprise hippique, ce bac professionnel forme des responsables d’entreprise dans les secteurs des courses (organisation de l’entraînement des chevaux et du travail dans les écuries) ou des activités de loisir (centre équestre) et de compétition. En- suite, le postulant peut aussi se tourner vers un BTS, une licence, et même plus. Les formations peuvent se suivre en présentiel, au sein d’une école spécialisée, en alternance, ou via un contrat d’apprentissage. La formation permet de se former à un métier durant une durée comprise entre un et trois ans. Les stages ne sont pas obligatoires mais fortement conseillés afin d’acquérir des connaissances sur le terrain.

Les jeunes peuvent également opter pour une section sport-études: un enseignement classique couplé à un accompagnement sportif à cheval, avec des horaires adaptés. On peut intégrer une section sport-études à partir de la Sixième, et plus généralement à partir de la Quatrième. Il faut avoir au minimum un Galop 2 et un très bon dossier scolaire. Cet enseignement n’est proposé que par des écoles privées, ce qui implique un coût, auquel il faut ajouter la plupart du temps des frais d’internat. Sans oublier les Maisons rurales familiales (MFR) qui permettent de se former directement dans le métier choisi tout en suivant un cursus scolaire agricole. L’élève alternera entre des périodes de formation scolaire et des périodes de stage. Pour rejoindre une MFR, il faut être âgé d’au moins quatorze ans, avoir validé la classe de Cinquième et élaboré un projet professionnel en rapport avec l’équitation. Les MFR sont des établissements scolaires privés. Cependant, elles sont financées par le ministère de l’Agriculture et les conseils généraux. Les cursus se déroulent sur deux ans et préparent au brevet national des collèges. Une fois celui-ci validé, l’étudiant en MFR pourra rentrer en lycée général, professionnel (CGEH, CGEA option équin, STAV) ou bien en CAP.

La deuxième partie de cet article, paru dans le dernier numéro du magazine GRANDPRIX, sera publiée demain.