“Je ne vais pas à Leipzig pour faire de la figuration”, Harry Charles

Il est jeune, talentueux, ambitieux, dispose d’un piquet de chevaux performant et d’un entourage lui permettant de concourir dans des conditions optimales. À vingt-deux ans, Harry Charles pourrait-il devenir le troisième cavalier britannique à soulever la Coupe du monde, lors de la quarante-deuxième édition qui se déroulera du 6 au 10 avril à Leipzig, en Allemagne?



En l’espace de quelques années, Harry Charles s’est hissé au sommet et figure ce mois au trentième rang mondial. Le cavalier de vingt-deux ans reste pondéré, ce qui lui vient certainement de son père et entraineur Peter Charles. Après avoir couru sous couleurs irlandaises et remporté l’or européen en individuel à Saint-Gall en 1995 et l’or européen par équipes à Arnhem, au Pays-Bas, en 2001, celui-ci a repris la nationalité britannique pour remporter l’or historique par équipes aux Jeux olympiques de Londres, en 2012. Il a transmis sa passion à ses trois enfants qui concourent tous trois, ne manquant pas de leur rappeler de garder les pieds sur terre. “J’ai pu goûter au haut niveau en 2018, mais mon père m’a dit que le plus dur n’était pas d’y arriver, mais d’y rester, et il a raison”, détaille Harry Charles. En 2019, le jeune Britannique a remporté un Grand Prix 3* à Oliva et s’est placé dans quelques épreuves prestigieuses en 5*. Compte-tenu de la pandémie, son ascension a bien entendu été stoppée, avant de pouvoir reprendre en fanfare en 2021. 

“J’ai fait mon premier concours de niveau 5* en mai et c’est parti de là. Pendant la pandémie de Covid-19, je me suis concentré sur mon équitation et sur la mise en place d’une bonne équipe de propriétaires et de chevaux autour de moi. Je suis sorti de l’ombre l’année dernière et j’ai obtenu d’excellents résultats (il s’est notamment imposé dans la Coupe du monde Longines et dans le petit Grand Prix de Londres, ndlr). À la fin de l’année, j’ai intégré le top 30 mondial, c’était assez fou et tout s’est passé si vite”, déclare l’athlète qui occupe également la tête du classement de la Fédération équestre internationale réservé aux moins de vingt-cinq ans. Son ascension dans a été favorisée par une nouvelle association avec l’Américaine Ann Thompson, qu’il a rencontrée pour la première fois “vers fin 2020”. Il s’agit d’un tournant majeur. “Elle a été ma première vraie propriétaire et j’ai eu beaucoup de chance, elle m’a donné Romeo 88 (Z, Contact van de Heffinck x Orlando) à monter”, raconte le cavalier de vingt-deux ans. Désormais âgé de treize ans, Romeo avait auparavant évolué sous la selle de l’Irlandais Darragh Kenny, avec qui il avait notamment remporté une épreuve à 1,50m à Calgary, en 2019.

“Quand il est arrivé aux écuries, il évoluait déjà au plus haut niveau et l’objectif était d’aller aux Jeux olympiques de Tokyo. Ann m’a beaucoup soutenu et possède l’un de mes autres extraordinaires chevaux, Aralyn Blue (OS, Chacco-Blue x Ludwig As), qui est le candidat de cette année pour les championnats du monde. […] Une fois que Romeo est entré dans l’écurie, j’ai eu accès aux grands concours, et le reste de mon piquet s’est construit autour de lui”, explique le jeune Britannique.

Harry Charles et Stardust au CSI 5*-W de Londres

Harry Charles et Stardust au CSI 5*-W de Londres

© Jon Stroud/FEI



Vingt et un ans et déjà une participation aux Jeux olympiques

Harry Charles a réalisé l’un de ses rêves en participant aux Jeux de Tokyo l’été dernier. “C’était incroyable, la meilleure expérience de ma vie! Tout le voyage a été spécial ; faire partie de l’équipe avec Ben (Maher, nldr)alors qu’il a gagné la médaille d’or, et voir ce qu’il fallait faire pour la gagner était vraiment incroyable”, explique-t-il à propos du cavalier de l’incroyable Explosion W. “Bien sûr, il a le meilleur cheval du monde, mais il a travaillé incroyablement dur et il est l’un des meilleurs cavaliers du monde. Cette médaille d’or est la récompense de beaucoup de travail. Ces dernières années, il savait qu’il avait le cheval pour s’imposer, et à Tokyo, la pression sur lui était énorme. […] Tout le mérite en revient à Ben et à son équipe, c’était incroyable”,a-t-il ajouté. Harry explique également un autre temps fort de l’année passée : sa performance avec Romeo qui a permis à la Grande Bretagne de remporter la Consolante lors la finale des Coupe des nations, en octobre, à Barcelone. “Rien n’est comparable au fait de concourir pour son pays au sein d’une équipe”, se remémore-t-il. “C’était une soirée tellement géniale, nous avons réalisé le seul double sans-faute de l’épreuve et mon cheval a sauté de manière incroyable. Ann (Thompson, ndlr) est venue spécialement pour le voir, c’était son anniversaire donc c’était un week-end absolument parfait”, se souvient-il. Une réussite qui a bien sûr rendu particulièrement son père Peter. “Il a été mon entraîneur toute ma vie, personne ne voudra mieux pour moi que lui”, explique Harry. Peter Charles se consacre désormais entièrement à ses enfants plutôt qu’à sa propre carrière de compétiteur. Les sœurs d’Harry, Scarlett, âgée de vingt et un ans, et Sienna, de deux ans sa cadette, gravissent également les échelons vers le haut niveau.



“Martin Fuchs est en très bonne forme et très motivé cette année ”, Harry Charles

“Notre père a arrêté sa carrière très tôt pour nous soutenir. Il dit qu’il apprécie encore plus ce sport maintenant que lorsqu’il était cavalier! C’est un passionné, mais il ne nous met pas la pression. Nous pouvons choisir notre propre voie, et il nous a encouragés à le faire, mais à seize ans, j’ai compris que c’était ce que je voulais faire”, explique le numéro trente mondial. “J’ai eu le goût du succès dans les épreuves Poneys et Juniors. Cette soif de victoire, je ne peux pas la contrôler”, dit le jeune homme dont le premier grand succès a été de remporter le titre de “Pony Showjumper of the Year” en montant Scoubidou, en 2014. “Le poney que j’ai battu était Tixylix qui était probablement le poney le plus célèbre de tous les temps en Grande-Bretagne. Je n’avais rien gagné avec Scoubidou avant cela et j’ai fait un tour très rapide. D’ailleurs, une vidéo de notre tour est devenue virale après”, rappelle-t-il. 

Cette semaine à Leipzig, Harry Charles participera à sa première finale de la Coupe du monde et pourrait être le troisième britannique à soulever le trophée. Le légendaire John Whitaker, a remporté le premier de ses deux titres consécutifs avec le célèbre Milton en 1990, à Dortmund en Allemagne. Trente-deux ans plus tard, il s’alignera à nouveau pour la Grande-Bretagne la semaine prochaine aux côtés de son neveu Jack Whitaker, âgé de vingt ans. Le seul autre Britannique à avoir remporté le plus prestigieux des trophées est Nick Skelton, le champion olympique de Rio de Janeiro, en 2016. Il avait mené Dollar Girl à la victoire à Göteborg, en 1995, à l’âge de trente-huit ans. Mais Harry n’est pas intimidé par la perspective de marcher sur les pas de géants pour ses débuts en finale du circuit indoor. Le lendemain de son retour du Saut Hermès à Paris, où il a décroché une victoire avec sa jument Stardust (OS, Chacco-Blue x Con Air 7), il a expliqué qu’il prendrait les deux semaines de repos pour se préparer à la finale, où Stardust, lauréate de l’étape de la Coupe du monde de Londres, en décembre, et Romeo concourront tous les deux. “La raison pour laquelle je prends ces deux chevaux est qu’ils sont tous deux très réguliers.  Stardust a un taux de sans-faute extrêmement élevé à 1,60 m et Romeo a tellement d’expérience”, précise-t-il. Pour accéder au podium, Harry Charles aura de sérieux concurrents à l’instar du Suisse Martin Fuchs, deuxième de la dernière finale de la Coupe du monde en 2019, ou de son compatriote et champion en titre Steve Guerdat. “Martin a probablement certains des meilleurs chevaux du monde dans son écurie en ce moment. Il est en très bonne forme et très motivé cette année. Steve a une relation un peu magique avec la finale de la Coupe du monde”, souligne Harry avant de conclure avec détermination: “mais je n’y vais pas pour faire de la figuration !”

 

 

Harry Charles et Stardust au CSI 5*-W de Londres

Harry Charles et Stardust au CSI 5*-W de Londres

© Jon Stroud/FEI