“Concourir aux championnats d’Europe est une expérience extraordinaire”, Mélina Bouillot

Il y a deux semaines, les Enfants, Juniors et Jeunes Cavaliers étaient à Oliva pour courir les championnats d’Europe Jeunes. Dans la catégorie Enfants, Mélina Bouillot et son sensationnel Canabis d’Albain se sont placés cinquièmes ex-æquo en individuel et ont décroché le bronze par équipes. Aux côtés de son papa mais aussi entraineur, la Bourguignonne de douze ans est revenue sur son excellent résultat, ses chevaux et ses ambitions.



Vous revenez des championnats d’Europe d’Oliva avec une cinquième place en individuel et le bronze par équipes. Qu’avez-vous pensé de votre expérience ?

Mélina Bouillot : Pour une première participation aux championnats d’Europe, j’ai trouvé que c’était très bien. Nous aurions peut-être pu essayer de faire encore mieux mais je n’ai pas de regrets.

Alexis Bouillot : C’était vraiment bien, nous n’espérions pas d’aussi bons résultats. Les cavaliers en concurrence avec elle sont plus âgés et plus précis dans les foulées alors nous ne savions pas si elle allait être prise dans l’équipe. Finalement elle a été sélectionnée et elle est la seule à avoir enchaîné les sans-fautes dans cette épreuve. C’était assez inespéré pour nous. Ce sont toujours les entraîneurs habituels qui coachent leurs cavaliers lors de telles échéances, donc j’ai moi-même accompagné Mélina. En parallèle, l’équipe de France nous épaule. D’habitude, elle ne stresse pas trop en concours, mais cette fois cela a été un peu compliqué à gérer les deux derniers jours. Elle ne se sentait pas très bien avant de monter, surtout à cause de la chaleur, donc il a fallu qu’elle se repose et que nous la mobilisions bien le dernier jour pour qu’elle se remette dans la compétition. Une fois à cheval, elle s’est reconcentrée et tout s’est très bien déroulé.

N'entraînez-vous que votre fille ? Qu’appréciez-vous dans le fait de coacher ? 

A.B. : J’entraîne mon fils de quinze ans qui va courir en Juniors la saison prochaine et ma voisine du même âge. Je n’ai pas envie de coacher d’autres élèves, je n’ai même pas le monitorat ! J’aime le fait de pouvoir transmettre et de pouvoir obtenir des performances avec mes enfants et mes chevaux. Nous ne devons les succès qu’à nous-même et cela est très valorisant. Personnellement, je préfère élever les chevaux, les dresser, les mettre en valeur en concours. Je suis plus éleveur et cavalier qu’enseignant. 

Qu’avez-vous pensé du comportement de Canabis d’Albain (SF, Baloubet du Rouet x Kannan) ?

M.B : Il a été extraordinaire ! Il était plutôt calme quand il n’était pas en parcours et très énergique à l’obstacle, donc c’était bien. Il a sauté de manière exemplaire. 

Quelles étaient les difficultés majeures du concours ? 

M.B. : Je pense que la chaleur a été l’une des difficultés majeures du concours. Il faisait très chaud, c’était assommant, surtout pour faire sept parcours en une semaine ! Les conditions étaient donc plus compliquées comparé aux températures que nous rencontrons en France. Les parcours étaient bien réfléchis et techniques et les concurrents de taille.

A.B. : Il y avait beaucoup de décisions à prendre au niveau des foulées. Mélina avait déjà couru à Hagen en CSIO mais les parcours d’Oliva ont tout de même été plus difficiles. Le chef de piste était bon, les tours techniques mais pas insurmontables. Pour Canabis, la répétition des parcours avec une telle chaleur a clairement été une difficulté supplémentaire parce qu’il fallait réussir à le conserver suffisamment en forme. Le dernier jour, nous pensons qu’il a commis une faute parce qu’au bout du septième parcours, il commençait à fatiguer. Il n’a pas l’habitude d’enchainer autant de parcours en une semaine. Honnêtement, nous ne nous attentions pas à obtenir un si bon résultat, mais savions que tout était jouable avec l’équipe car ils étaient déjà tous montés sur des podiums à plusieurs reprises. Cependant, j’ai trouvé aberrant d’organiser une compétition dans un endroit aussi chaud à cette époque de l’année, ce n’était vraiment pas idéal pour les chevaux. Il faisait entre trente-six et quarante degrés la journée sans que la température ne descende la nuit. Il est plus logique de concourir dans un pays nordique en été comme le font les dresseurs et les complétistes. 

Il n’y a d’habitude pas grand-chose l’été à Oliva, c’était surprenant. 

Mélina Bouillot et Canabis d'Albain aux championnats d'Europe

Mélina Bouillot et Canabis d'Albain aux championnats d'Europe

© Sportfot



“Nous avons eu des demandes pour Canabis mais voulons le garder”

Quelle ambiance y avait-il avec les autres membres de l’équipe ? Avez-vous envie de retrouver avec la veste tricolore ?

M.B. : L’ambiance était géniale ! Nous nous sommes tous très bien entendus, nous nous encouragions en bord de piste. J’ai adoré. Concourir aux championnats d’Europe est une expérience extraordinaire. Nous n’étions même pas sûr de pouvoir y aller cette année et encore moins de faire partie de l’équipe, ça ne s’est décidé qu’après la première manche du mercredi. Nous étions soulagés que tout se déroule bien. J’aimerais beaucoup courir à nouveau avec la veste tricolore, prendre part à des CSIO avec l’équipe est à chaque fois une super expérience. 

Quels sont vos objectifs avec Canabis d’Albain ? 

M.B. : Nous aimerions prendre part à la finale des Coupes des nations avec l’équipe fin septembre à Kronenberg et essayer de prendre part à des épreuves à 1,35m en fin d’année prochaine. Plus tard, en fonction de la façon dont les choses se déroulent, je voudrais concourir en Juniors.

A.B. : Il reste encore une année chez les Enfants à Mélina avant d’attaquer le circuit des Juniors pendant quatre ans. Un des objectifs de l’année prochaine serait de remporter le titre de championne de France en Cadets. Cela fait deux années de suite qu’elle est championne de France minimes alors nous préférons la passer dans la catégorie des Cadets à 1,30m. Ces championnats seraient une bonne préparation pour les Européens. Ensuite, nous verrons année après année, il peut se passer tellement de choses et d’autres chevaux vont arriver.  

Comptez-vous conserver Canabis ou y a-t-il un but commercial ? 

M.B. : Nous avons eu des demandes à Oliva mais nous voulons le garder pour que je puisse concourir avec lui longtemps et pour qu’il fasse de la reproduction dans notre élevage. 

Quelles sont ses principales qualités ? Cet étalon a été vice-champion de France des cinq ans avec les meilleurs indices de sa génération à cinq et six ans… Jusqu’où pourra-t-il aller ?

M.B. : Il est déjà très gentil et facile pour un étalon. Il a un bon respect de la barre et est particulièrement impressionnant avec la marge qu’il met. 

A.B. : Il est extraordinaire. Il a une qualité, un respect et une envie de bien faire incroyables. Parfois, certains chevaux extrêmement respectueux ne veulent pas sauter tandis que d’autres manquent un peu de respect. Lui allie à la fois respect et envie. Quand il participe à un barrage, nous sentons que ça lui plaît. Ses moyens sont difficiles à cerner. Je l’ai déjà engagé dans des épreuves à 1,45m à sept ans, ce que peu de chevaux font aussi tôt. Le problème est qu’il est presque trop respectueux. Il met tellement de marge que je ne sais pas s’il pourrait concourir à 1,60m… Nous avons encore le temps, il reste un an à Mélina avant de passer sur 1,40m dans les Juniors. Canabis est tellement gentil, il n’y a eu aucun problème lors de la transition entre mon équitation et celle de mes enfants. Mon fils l’a monté un petit peu et a été troisième du critérium Cadets l’année dernière avec lui. Mélina l’a ensuite récupéré et ils se sont vite entendus. Il a un peu perdu confiance en début d’année lorsque Mélina ne voyait pas trop ses foulées mais tout est rentré dans l’ordre en début de saison. Il s’est remis en confiance et se montre vraiment très disponible. 



“Si elle souhaite en faire son métier, le système est lancé”

Mélina Bouillot et Eolia d'Albain au CSI2* de Vichy

Mélina Bouillot et Eolia d'Albain au CSI2* de Vichy

© Agence Ecary

Comment avez-vous préparé cette échéance ? 

A.B. : Mélina a commencé à monter Canabis au mois de septembre 2021. Pendant la période hivernale, ils se sont présentés à un stage de détection de la fédération pour l’équipe de France. Par la suite, il y a eu deux stages à Lamotte-Beuvron et le couple a débuté les épreuves à 1,25m et 1,30m pour espérer intégrer l’équipe Enfants. Nous avons pu aller au CSIO de Fontainebleau où Mélina a remporté le Grand Prix et à Hagen où elle s’est aussi imposée dans une épreuve à 1,30m. Après avoir couru une épreuve moins importante au CSI de Vichy, nous sommes partis au stage de préparation la semaine avant les championnats d’Europe. Le stage se déroulait à Toulouse où tous les cavaliers ont pu faire une sorte d’étape avant de se rendre à Oliva et commencer à créer un bon esprit d’équipe.

Pourquoi n’avez-vous pas concouru au championnat de France Poneys avec Barbotine ? Continuerez-vous à la monter l’année prochaine ? 

M.B. : Les championnats de France poneys étaient la semaine d’avant les championnats d’Europe lorsque nous étions au stage, ce n’était pas possible de faire les deux. 

C’est compliqué de concourir à haut niveau à poney et à cheval puisque je ne peux pas prendre part aux meilleures échéances avec les deux. Nous ne pouvons pas être partout ! J’ai trois chevaux et un jeune que nous allons débourrer, cela fait déjà beaucoup de chevaux en parallèle de l’école. J’aimerais concourir à 1,25m avec Barbotine afin de la vendre cet hiver.

Concernant Eolia d’Albain (SF, Quick Star x Vas Y Donc Longane), est-elle destinée à épauler Canabis d’Albain ? 

M.B. : Nous pensons qu’elle a moins de moyen que Canabis. Pour le moment nous souhaitons l’engager jusqu’à 1,30m l’année prochaine, hauteur sur laquelle elle pourra être vraiment compétitive afin que je compte une deuxième monture dans le cas où Canabis se blesserait. Pour le moment, elle manque d’expériences pour un circuit tel que les Enfants et ces grosses échéances. 

Comment organisez-vous votre quotidien entre le cours et l’équitation ? 

M.B. : En vacances, j’arrive à monter mes chevaux tous les jours. C’est parfois plus difficile en période scolaire. Je vais rentrer en quatrième et après le lycée je pense rester dans l’élevage et les concours. 

Comment s’organise le système ? 

A.B. : Presque tous nos chevaux viennent de notre élevage. Nous en faisons naître entre dix et quinze par ans, que nous dressons et qui sont vendus par la suite. Si Mélina souhaite en faire son métier, le système est lancé et nous savons que cela peut marcher. Nous évaluons les chevaux que nous voulons garder ou vendre en fonction de leur qualité et leur potentiel. Ceux que nous gardons pour l’instant sont les étalons et les meilleures pouliches pour qu’elles soient destinées à l’élevage.