“Je ne réalise qu’à moitié, c’est juste un truc de fou !”, Zazie Gardeau

Pour sa dernière participation aux championnats d’Europe Jeunes Cavaliers de concours complet, Zazie Gardeau est rentrée d’Hartpury avec le plus beau des métaux, l’or individuel décroché grâce à César de Commarin LA. Installé au sein des écuries Chev’El, dans la région toulousaine, la cavalière de vingt-et-un an et étudiante à l’INSA de Toulouse revient sur cet exploit, ses années jeunes qui se terminent et son avenir.



Zazie Gardeau est ici entourée de l'Allemande Paula Reinstorf en argent et de la Britannique Alice Casburn en bronze à droite.

Zazie Gardeau est ici entourée de l'Allemande Paula Reinstorf en argent et de la Britannique Alice Casburn en bronze à droite.

© Kevin Sparrow/FEI

Vous rentrez d’Hartpury où vous avez remporté le titre de championne d’Europe Jeunes Cavaliers de concours complet. Dans quel état d’esprit êtes-vous ? 

Je suis encore sur mon petit nuage, je ne réalise qu’à moitié, c’est juste un truc de fou ! Ce qu’il s’est passé à Hartpury est vraiment incroyable. Cette médaille, c’est l’aboutissement d’énormément de travail, d’efforts et de sacrifices. C’est vraiment incroyable. Y parvenir avec mon petit cheval César est encore plus spécial car notre histoire n’a pas toujours été simple. J’en suis très fière ! 

Par quelles étapes César de Commarin LA et vous êtes-vous passés avant d’en arriver là ? 

César a de très grandes qualités pour les trois tests. Il est extraordinaire, a tout pour réussir et beaucoup de moyens. Son seul défaut, c’est le mental car il peut être un peu précieux. On m’a souvent dit qu’il était un cheval d’hippique et qu’il ne passerait pas le cap sur le cross à cause de cela. Nous avons traversé des moments difficiles mais je vois qu’il a passé un véritable cap. Il aime ce qu’il fait, donne tout pour moi et il est devenu l’un des chevaux les plus courageux du circuit sur le cross. Je suis très heureuse de voir à quel point lui et moi avons évolué ensemble. 

Vous semblez avoir eu un bel accueil de votre équipe aux écuries Chev’El… 

Oui absolument, je suis infiniment reconnaissante envers l’équipe Chev’El. Olivier, Sophie, Jeanne et Loulou (Louise, ndlr) Sadran font beaucoup pour moi. Ils ont toujours cru en César et moi, cette victoire est aussi la leur. Les voir m’accueillir ainsi me fait énormément plaisir. Je dois aussi beaucoup à mes entraîneurs Ugo Provasi, Marie-Pierre Sangleboeuf, Christian Weerts, à Clémence Galé qui fait en sorte que mes chevaux soient aussi en forme que possible grâce à sa thalasso, ma groom Lourie ainsi que mes parents. 

Avez-vous prévu de célébrer ce titre ? 

Oui, nous avons prévu d’organiser une grande fête mi-août pour arroser cette médaille. 

Parmi les messages de félicitations que vous avez reçus, y en a-t-il un qui vous a particulièrement marquée ?

La première personne à qui j’ai écrit après l’hippique est Corinne Meheust (la maman de Thaïs Meheust, tragiquement disparue en septembre 2020, ndlr). J’ai reçu beaucoup de messages très touchants, je les ai tous appréciés à leur juste valeur, mais la réponse de Corinne m’a particulièrement émue car Thaïs est toujours présente dans nos cœurs et nos pensées. Cela m’a fait extrêmement plaisir de recevoir un message de sa part. Sur le podium, j’ai pensé à Thaïs. Elle a toujours été un exemple et une amie. Elle m’a tirée vers le haut, vers mes premiers championnats d’Europe. J’ai beaucoup appris à ses côtés, donc j’ai forcément eu une grosse pensée pour elle. 



“Fontainebleau 2018 a déclenché mon envie de concourir à haut niveau”

À vingt-et-un ans, il s’agit de votre dernière année de compétition en Jeunes Cavaliers. L’envie de revenir avec un titre était-elle encore plus forte ? 

Oui, il s’agit d’une motivation supplémentaire. Depuis l’annonce de la sélection, nous ne pensions qu’à cela et étions pleinement mobilisés pour cette échéance. Sachant que je courrais en individuel, il fallait que je me donne à deux mille pourcents car je n’avais pas le droit à l’erreur. Je ne voulais rien lâcher, rester dans ma bulle. Pour ce dernier championnat jeunes, j’ai eu un peu plus de pression que les années précédentes, mais cela a plutôt été une pression positive. 

Savez-vous pourquoi le staff fédéral a choisi de vous faire concourir en individuel plutôt qu’en équipe ? 

C’est leur choix, je le respecte. Je pense qu’il faudrait plutôt poser la question au staff, je n’ai pas trop de réponse. J’ai en tout cas été très heureuse de cette sélection, de pouvoir montrer ce dont j’étais capable. C’est ce qui compte le plus ! 

Comment s’est déroulée la compétition épreuve après épreuve ? 

J’étais un peu moins stressée pour le dressage que pour les deux autres épreuves. César est de nature plutôt froide et a des allures magnifiques. Il et super en dressage et je suis très heureuse de la reprise que nous avons déroulée. La note est à peine moins bonne que celles qui nous sont habituellement attribuées. En regardant le classement, les écarts sont assez homogènes car les notes ont été un peu moins bonnes pour tout le monde. J’étais très contente de notre classement après le dressage (le couple pointait à la quatrième place avec 29,3 points, ndlr). Le cross était l’épreuve que nous appréhendions tous le plus, car un cross en Grande-Bretagne est souvent très difficile. Lors de la première reconnaissance, nous avons été très surpris de voir à quel point le tracé était vallonné. Il y avait aussi des obstacles très impressionnants donc je craignais un peu ce test. Finalement, je me suis vraiment régalée, c’était un moment de dingue ! Mon cheval a été incroyable, tellement courageux, et n’a douté à aucun instant. Lorsqu’il ne doute pas de lui, il fait partie des plus rapides donc nous avons obtenu l’un des meilleurs chronomètres de l’épreuve. J’étais très heureuse et fière après le cross, j’ai pris mes coachs et mes parents dans mes bras (la Toulousaine pointait alors au troisième rang avec 32,1 points, ndlr). Lors de l’hippique, César a très bien sauté, j’étais très contente de le voir aussi en forme au lendemain d’un cross de huit minutes trente très éprouvant physiquement. Il était en pleine forme et je n’ai rien à lui reprocher. Il est resté très calme et n’a pas trop absorbé ma pression, que j’ai essayé de transformer en énergie positive. Il a été fidèle à lui-même et nous avons réussi à rester dans notre bulle. 

La pression a été de mise même après votre parcours puisque vos concurrentes britanniques Phoebe Hughes et Millie Juleff se battaient pour l’or et l’argent, respectivement sur Top Biats et All We Need…

Dès que j’ai franchi la ligne d’arrivée, j’étais déjà sûre d’avoir une médaille. Dès lors, j’étais déjà la plus heureuse du monde. Le scénario est finalement parfait pour moi (avec 4,4 et 4 points lors de l’hippique, les Britanniques ont laissé filer l’or à la Française, ndlr), mais j’aurais quand même signé pour une médaille de bronze ! L’attente n’a pas été si difficile à vivre car j’étais déjà occupée à serrer mes proches dans mes bras. J’étais déjà tellement heureuse de décrocher au moins le bronze que je n’ai même pas vu les parcours de mes deux concurrentes. J’ai appris qu’elles commettaient des fautes à mesure que des gens se jetaient sur moi pour me féliciter (rires). J’avais fait mon job et j’étais fière de nous, c’était déjà le plus important. 

“J’étais un peu moins stressée pour le dressage que pour les deux autres épreuves”, affirme la Toulousaine.

“J’étais un peu moins stressée pour le dressage que pour les deux autres épreuves”, affirme la Toulousaine.

© FEI/Kevin Sparrow



“J’adore l’équilibre que j’ai réussi à trouver”

“Le cross était l’épreuve que nous appréhendions tous le plus”, raconte Zazie Gardeau.

“Le cross était l’épreuve que nous appréhendions tous le plus”, raconte Zazie Gardeau.

© FEI/Kevin Sparrow

Vous avez écrit “Udine, on s’est vengées”. Cette victoire a-t-elle été une belle revanche sur les Européens 2021 où vous aviez dû jeter l’éponge avec Udine Jolimon Bearn ? 

L’an passé, Udine était en effet très bien lancée pour réussir une super performance aux championnats d’Europe car elle était cinquième après le cross. Elle s’était malheureusement blessée lors de cette épreuve. Depuis j’avais donc gardé ce goût amer. Cette année, je nous ai vengées grâce à César, ce qui me fait vraiment plaisir. 

Comment se porte Udine Jolimon Bearn depuis sa blessure ? 

Elle va beaucoup mieux, cela va bientôt faire un an. Nous avons pris le temps et son membre blessé va très bien. Elle a le moral, reprend doucement le travail. Nous verrons où cela nous mène. 

Vous clôturez donc vos années Jeunes Cavaliers avec une quatrième médaille chez les jeunes, la plus belle. A posteriori, quel regard portez-vous sur ces années ? 

J’ai vécu des choses extraordinaires ! Je pense notamment à mes premiers championnats d’Europe à Fontainebleau (en 2018, ndlr) où nous avons été sacrés champions d’Europe par équipes (les Bleus avaient été médaillés d’or en Juniors et Jeunes Cavaliers, Zazie Gardeau courant alors encore dans la première des deux catégories, ndlr). Ce souvenir restera dans ma mémoire à tout jamais. C’était fou et je pense que ce championnat a déclenché mon envie de concourir à haut niveau par la suite. Toutefois, la marche entre les épreuves Juniors et les épreuves Jeunes Cavaliers n’est pas facile à grimper. Ce dernier circuit m’a apporté énormément d’expérience et m’a beaucoup faite progresser. À ce niveau, les cross sont presque comparables à ceux des CCI 4* et nous tirent vers le haut. J’ai eu la chance de pouvoir courir ces épreuves jeunes. L’expérience engrangée devrait me porter plus loin par la suite. 

Justement, comment envisagez-vous la suite ? 

Nous verrons comment César se remet des Européens mais j’aimerais courir en 4* d’ici la fin d’année s’il se remet très bien. Si je sens qu’il a besoin d’un peu de vacances, nous attendrons le début d’année prochaine. Pourquoi pas espérer faire de l’équipe de France pour une Coupe des nations Seniors l’an prochain ? Ce serait déjà très chouette ! 

Quelles sont vos ambitions avec Daiquiri, la fille d’Argento ?

Nous avons acheté Daiquiri en avril. Elle était jusqu’alors montée par Alexis Gomez et a couru le Mondial du Lion l’an dernier à sept ans. Je l’aime beaucoup ! Elle est très intelligente, a beaucoup de moyens et se montre très studieuse. Je crois beaucoup en elle en vue du haut niveau ! 

Comment se déroulent vos études d’ingénieur ?  

Je suis à l’INSA de Toulouse. Grâce à cette école, je bénéficie d’un cursus aménagé qui me permet d’allier études et sport. Je suis très reconnaissante car je ne pourrais pas autant monter et concourir sans ces adaptations. Je suis vraiment heureuse de pouvoir dissocier ma passion et mes études car je ne souhaite pas travailler dans le monde du cheval à terme. Je veux tout de même continuer à monter donc j’adore l’équilibre que j’ai réussi à trouver, je souhaite le conserver le plus longtemps possible.