“Le plus important est que ma jument aille très bien”, Alexandre Ayache
Présent à Madrid où il devait disputer l’étape de la Coupe du monde de dressage avec Jolene, Alexandre Ayache n’a pas pu prendre le départ du Grand Prix hier après-midi. En effet, un commissaire au paddock du concours aurait perçu de la bave rosée dans la bouche de la jument juste avant son entrée en piste, ce qui a abouti à l’élimination du couple. Après avoir porté réclamation face à cette décision, sans succès, le Niçois livre sa réaction.
“Juste avant notre entrée en piste, il y a eu une confusion. Le commissaire FEI qui était au paddock m’a dit: ‘Arrêtez-vous, j’ai un doute quant à la bouche de votre jument’, alors que j’avais effectué toute ma détente sans problème. Il m’a dit qu’il n’était pas sûr de lui, donc il est parti voir la présidente du jury, qui a déclaré, sans même venir vérifier ce qui se passait, que je ne devais pas prendre le départ de l’épreuve. Comme cela s’est passé à mon horaire de passage, le cavalier précédent était sorti et elle aurait pu – sinon dû – venir constater elle-même ce qui se passait, mais elle ne l’a pas fait.
Je suis donc reparti vers les écuries, car il y a des règles à suivre lorsqu’on est éliminé, que j’ai respectées même s’il n’y avait pas de sang dans la bouche de ma jument. Bien évidemment, personne n’entrerait en piste avec un cheval ayant la bouche en sang. Ce n’est même pas imaginable. Leur bien-être passe toujours avant la compétition! Nous sommes là d’abord parce que nous aimons les chevaux, en tout cas me concernant. À mi-chemin vers les écuries, le commissaire a couru vers moi pour me dire que je pourrais finalement entrer en piste. J’ai donc rebroussé chemin vers la piste. Et après quelques instants, il a reçu l’ordre de ne pas me faire partir. Durant tout ce temps, aucun juge ni vétérinaire n’est venu voir ma jument pour confirmer ce qu’avait perçu le commissaire, qui était d’ailleurs plus désolé qu’autre chose et qui aurait fait les choses autrement s’il avait su quelle tournure prendrait cette histoire. Avec lui, nous avons cherché partout dans la bouche de la jument, pour voir si elle ne s’était pas mordue, par exemple, mais il n’y avait rien du tout.”
“En tant que cavalier, porter réclamation auprès d'un juge nous met toujours dans une situation très inconfortable”
“La Fédération française d’équitation m’a demandé de porter réclamation. Si c’était à refaire, je ne le ferais pas. Cela m’était déjà arrivé à deux reprises par le passé, dont une fois il y a quelques années en période de qualification olympique, car une juge n’avait pas vu une double pirouette dans ma Libre à Francfort, et cela n’a jamais abouti à autre chose qu’à passer pour l’enquiquineur de service. Or, ce n’est pas du tout pour cela qu’on porte réclamation! Il s’agit de demander pourquoi le règlement n’est pas appliqué (dans ce cas précis, le règlement de dressage de la FEI n’évoque pas le cas d’une suspicion de la présence de sang dans la bouche d’un cheval constatée au paddock avant l’entrée en piste d’un couple, ndlr). Cette fois, je ne voulais donc pas porter réclamation à la base, mais je l’ai fait car Jean Morel m’a dit que si personne ne s’exprimait, on ne pourrait jamais faire évoluer les règlements. En tant que cavalier, porter une réclamation auprès d'un juge que l'on risque de recroiser en compétition nous met toujours dans une situation très inconfortable, qui que l'on soit. Je pense qu'il serait d'ailleurs préférable que ce soient les fédérations qui le fassent, plutôt que les cavaliers.
Nous rentrons donc à la maison un peu déçus, mais le plus important est que ma jument aille très bien, ce qui est le cas. Ce qui s’est passé est très frustrant, d’autant plus quand quelqu’un comme Ton de Ridder (célèbre entraîneur allemand, ndlr) vient vous vous voir pour vous dire ‘Ce qui vient de t’arriver est inadmissible; si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis là.’ Nous nous sommes rendus à Madrid pour que Jolene prenne du métier étant donné qu’elle n’évolue en compétition que depuis neuf mois. À l’heure actuelle, il y a encore plein de choses à régler, mais elle évolue très bien et nous avons besoin qu’elle prenne de l’expérience en vue de la saison prochaine. À Lyon, après s’être inquiétée lors du Grand Prix, elle s’est beaucoup mieux comportée dans la Libre. Ce week-end, j’ai senti dès le premier jour qu’elle était aussi connectée avec moi que dans un concours extérieur. La familiarisation s’est très bien passée, tout comme ma détente d’hier.”
“J’espère pouvoir sortir Jolene à Francfort”
“Nous avons demandé à participer au CDI 5* de Francfort (qui se tiendra du 15 au 18 décembre, ndlr), mais il est compliqué d’obtenir des places dans des événements de ce niveau car les organisateurs s’appuient sur le classement mondial. Or, ma jument est classé cent quarante-sixième. J’espère pouvoir présenter Jolene dans ce concours où il y a beaucoup d’ambiance, car elle est en très grande forme et cela permet de faire prendre beaucoup d’expérience aux chevaux (c’est notamment à Francfort que se tiennent les finales des circuits allemands réservés aux espoirs âgés de sept à dix ans, ndlr). Notre objectif est d’être plus que prêts si nous pouvons prendre part à de grandes échéances, ce que j’espère vraiment, car ma jument a toutes les qualités pour le faire de très belle manière. L’idée est donc la faire mûrir intelligemment afin de pouvoir compter sur elle le moment venu.”