C’est une bien triste nouvelle que Richard Dick a publié sur les réseaux sociaux ce samedi. Le fondateur du haras d’Ick annonçait la mort de son étalon fétiche en ces termes : « C’est avec beaucoup de tristesse que nous vous annonçons la mort de By Ceira d’Ick. Victime d’une grosse pneumonie à l’automne il avait déclenché une fourbure. Stationné chez France étalons, nous avons uni nos forces, nous nous sommes entouré des meilleurs spécialistes pour le sauver, mais en vain. By Cera était un cheval singulier et très attachant, il laissera une marque indélébile au sein notre élevage, il a été, et sera encore à l’origine de nombreux succès. Merci à toutes les personnes qui ont pris soin de lui. »

De son côté, France Etalons, qui gère la carrière de reproducteur de By Ceira d’Ick, stationné au haras de Talma, publiait ce communiqué : “La journée est particulièrement sombre pour notre équipe. Le cœur lourd, nous devons vous informer du décès de By Ceira d’Ick. Les efforts sans relâche de nos équipes, à son chevet jour et nuit depuis plusieurs mois, ne nous auront malheureusement pas permis de sauver notre bien-aimé étalon. Nous partageons bien sûr la peine avec Richard et Audrey, ses naisseurs et toujours propriétaires. Nous les remercions de nous avoir confié leur crack dès ses débuts de carrière d’étalon. Ensemble, nous avons amené By Ceira parmi l’élite des étalons en Europe. Il n’est pas un éleveur ou cavalier qui n’a pas entendu parler de la qualité rare de sa production, qui ne manquera pas de continuer de faire briller By Ceira pendant de nombreuses années encore. L’intelligence, la gentillesse et l’incroyable force de caractère de ce cheval lui auront permis de se battre de manière exceptionnelle pendant plusieurs mois. Malheureusement la nature en aura décidé autrement. Nous remercions sincèrement toute l’équipe qui s’est battue autour de ce cheval si attachant, qui n’a jamais compté son temps et qui avait à cœur de le faire vivre dans les meilleures conditions possibles.”

Fils et petit-fils de gagnantes au plus haut niveau

By Ceira d’Ick est né chez Richard Dick, qui avait une grande admiration pour sa mère. Pour le numéro 121 de Grand Prix Magazine, il nous racontait: “J’ai toujours été à l’affut de la meilleure génétique possible, et j’ai toujours été influencé par les chevaux qui étaient des grands performers au moment où j’ai démarré l’activité d’élevage, dans les années 2000. Fein Cera (Holst, Landadel x Cor de la Bryère) est une jument qui m’avait particulièrement marqué. Bien évidemment par la finale de Jerez, où elle était la meilleure jument, mais elle a aussi gagné beaucoup d’autres grandes épreuves. C’est une jument qui faisait rêver et je me souviens d’interviews de Peter Wylde, où il disait que sa jument était extraordinaire, d’une finesse exceptionnelle, qu’il la montait sans éperons. Plus tard, j’ai croisé la route de cette jument, car elle avait été chez Keros, en Belgique, où j’emmenais également des juments. J’ai donc demandé s’il y avait la possibilité de faire des embryons ou d’avoir des embryons de la jument. Il y avait un poulain d’Atlantic et Fein Cera, qui ne me plaisait pas spécialement, un embryon avec Stakkato, mais également la possibilité de racheter Fein Cera. La jument était déjà âgée et je n’étais pas certain de pouvoir la remplir de nouveau, donc j’ai acheté l’embryon avec Stakkato. Le poulain est né chez moi, il était un très beau, avec beaucoup d’œil, de présence et un très bon galop. J’ai élevé le cheval et je me suis rendu compte que j’avais vraiment quelque chose hors du commun, aussi bien dans le papier que dans la qualité de saut.”

Meilleur cheval de la finale des JEM de Jerez 2002, où son cavalier Peter Wylde a obtenu le bronze en individuels, Fein Cera a obtenu l’or olympique par équipes à Athènes et a notamment remporté les Grands Prix de Bruxelles et Düsseldorf. Fein Cera était l’unique produit de Cera I, qui a gagné les Grands Prix de Seville et Barcelone avec l’Irlandais Paul Darragh, puis le championnat d’Allemagne et la Coupe des nations d’Aix-la-Chapelle avec Otto Becker. Dans cette famille maternelle, développée par le célèbre éleveur allemand Harm Thormählen, on trouve de nombreux gagnants au plus haut niveau tels Gera VI (Calando I) avec Michael Morrisey, Caracho 14 (Cento) avec Lucy Davis, Cero I (Calido I) avec François Mathy jr, Daron (Vleut) avec Ai Harada, Viktor R (Hors la Loi II) avec Connor Swail, ou encore le très bon étalon Lacapo (Landgraf I). Fein Cera a eu cinq produits, dont une fille, Kleine Cera (Calato), qui a eu une très belle descendance, étant notamment à l’origine de Capriccio 53 (Come On) gagnant sur 1,50 m avec Uwe Schmitz, Zera 23 (Cero I) ayant tourné sur 1,60 m avec le Slovaque Pato Muente, Ornellaia (For Pleasure) grande gagnante avec John Whitaker puis Anna-Julia Kontio et Peter Moloney, Castlefield Dream (Clinton I) avec Brian Cournane, ou encore Echo of Light (Come On) avec John Whitaker.

By Ceira d’Ick est donc né dans la pourpre, d’autant que son père, le Hannovrien Stakkato (Spartan x Pygmalion) avait également brillé au plus haut niveau avec l’Allemande Eva-Maria Bitter et a tracé sa propre lignée en Allemagne, engendrant de nombreux gagnants sur 1,60m et des fils et petits-fils étalons qui perpétuent cette lignée au plus haut niveau.

Une très belle proportion de produits classés à Fontainebleau

By Ceira d’Ick montre un très gros potentiel, mais se blesse à l’âge de trois ans et ne pourra jamais tourner en compétition. Vendu en partie au célèbre étalonnier belge Joris de Brabander (haras de Muze), By Ceira d’Ick saillit en Belgique et en France, mais n’a pas un énorme succès dans l’Hexagone, avec une trentaine de produits en trois ans, dont la majorité chez Richard Dick. Cependant, dès 2020, alors que ses premiers poulains n’ont que cinq ans, By Ceira d’Ick se fait remarquer à la Grande Semaine de Fontainebleau. Cette année-là, douze de ses produits avaient tourné en compétition et huit s’étaient qualifiés pour la finale du Cycle Classique. Cinq d’entre eux iront à Fontainebleau, dont quatre sans toucher aucune barre. Dans les quatre ans, Girl Power DK (mère par Cash) est vice-championne, Give Me One Reason DK (mère par Diamant de Semilly) est sixième, alors que Baby Face DK Z (mère par Mr Blue) obtient le Label SHF et termine neuvième dans la catégorie ASB des chevaux inscrits dans un autre stud-book que le Selle Français ou l’Anglo-Arabe. Chez les cinq ans, Funny Girl DK (mère par Kannan) termine à la septième place et aurait été vice-championne sans un point de temps dépassé lors de la deuxième qualificative. En 2021, Grande Dame DK (mère par Kannan) est Elite et troisième des cinq ans, puis en 2022, trois chevaux obtiennent la mention Très Bien : Ixe des As (mère par Diamant de Semilly) dans les quatre ans et Give Me One Reason DK et Grande Dame DK chez les six ans.

En 2022, By Ceira d’Ick avait cinquante et un produits indicés, dont seize au-dessus de 120, parmi lesquels Godiva DK (mère par Kannan) ISO 135, Grande Dame DK ISO 135, Girl Power DK ISO 136, Funny Girl DK ISO 140, Give Me One reason DK ISO 143 et Falling in Love DK (mère par Arko III) ISO 143 ont obtenu les meilleurs ISO. Signalons également Floralie DK*HDC (mère par Diamant de Semilly), achetée à Fences par le haras des Coudrettes, classée sur 1,40m avec Reynald Angot. Parmi ceux évoluant à l’étranger, signalons Jyrado vh Bovenhoekshof (sBs, mère par Baloubet du Rouet), Brazilia DK Z (ZANG, mère par Argentinus), Best in Time d’Ick Z (ZANG, mère par For Pleasure), Fein Lotta DK (SF, mère par Diamant de Semilly), ou encore Fashion Victim DK (SF, mère par Kannan), classés sur 140/145, ou Que Sera JW vd Moerhoeve, septième du championnat de Belgique des six ans. Le site Hippomundo classait By Ceira d’Ick à la quatrième place de père de chevaux de sept ans en 2022. Si l’on peut reprocher aux produits de By Ceira Dick de ne pas toujours avoir le dernier chic, en revanche, ils montrent souvent un potentiel certain et on devrait en retrouver quelques-uns au très haut niveau dans les années à venir, d’autant que By Ceira a beaucoup sailli depuis 2019.

Louant les qualités de son chouchou, Richard Dick avait également noué une véritable histoire d’amour avec By Ceira: “Au-delà du côté génétique et potentiel, j’ai un attachement très profond avec ce cheval et réciproquement. Je l’adore, il a un caractère incroyable. C’est un cheval extrêmement stable, mais d’une sensibilité phénoménale. Quand je lis les interviews de Peter Wylde concernant Fein Cera, on retrouve beaucoup de points communs avec By Ceira. C’est un cheval qui peut être très dominant avec les autres entiers, mais, à côté de ça, il a un respect de l’homme et est attentif à tout. J’ai des très bons chevaux dans mes écuries, dans lesquels je fonde de gros espoirs sportifs, mais avec By Ceira, il y a quelque chose en plus entre nous, c’est mon cheval de cœur. Pour un cheval qui n’a pas fait de concours et n’étant pas étalonnier, c’est une belle histoire. Il n’a que neuf ans, on voit ses produits sortir et le fait qu’il ne fasse pas de concours le rend encore plus disponible pour les éleveurs. Avec ce cheval-là, c’est vraiment le bouche-à-oreille qui a fonctionné et je ne pense pas que ce soit juste un effet de mode. Je suis vraiment très amoureux de mon cheval et très fier de la façon dont il produit.”

Une lourde perte pour le haras d'Ick et également une lourde perte pour l’élevage, mais By Ceira a déjà huit fils étalons, et de nombreux autres à venir, qui sauront perpétuer son sang et la lignée de Stakkato.