La France en bronze, la Grande-Bretagne et Rosalind Canter en or au Pin
Comme prévu, la Grande-Bretagne a décroché une énième médaille d’or par équipes aux championnats d’Europe de concours complet, cet après-midi au Pin-au-Haras, dans l’Orne. L’argent a fait l’objet d’un bras de fer terrible entre la France et l’Allemagne, gagné sur le fil par cette dernière. En individuel, ces Européens ont consacré (dans cet ordre) les Britanniques Rosalind Canter et Kitty King et l’Allemande Sandra Auffarth, trois femmes, ainsi qu’un SHBGB, Lordships Graffalo, et les Selle Français Vendredi Biats et Viamant du Matz.
Hier soir, au sortir d’un cross dantesque dont elle s’était collectivement extirpée avec brio, la France pouvait espérer décrocher deux médailles aux championnats d’Europe de concours complet du Pin-au-Haras. Ce soir, les Bleus ont quitté leur fief normand, alliage presque parfait de tradition et de modernité, avec une récompense. Ce fut le bronze par équipes, comme aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021 et aux Jeux équestres mondiaux de Tryon en 2018, pour ne pas plonger plus loin dans l’histoire du complet tricolore. L’argent était à la portée du collectif de Thierry Touzaint, mais le podium, qui lui avait échappé d’un rien aux Européens de 2019 à Luhmühlen, puis de 2021 à Avenches, et bien plus largement l’an passé aux Mondiaux de Pratoni, a satisfait le sélectionneur, ses cavaliers et leur entourage. On peut les comprendre.
Réduite à trois depuis l’élimination fracassante de Michael Jung et Fischer Chipmunk lors du test de fond, l’Allemagne, deuxième au provisoire loin derrière la Grande-Bretagne et suivie de près par la France, n’avait plus aucun joker aujourd’hui. Aussi, lorsque Malin Hansen-Hotopp et Carlitos Quidditch K ont concédé 5,2 points, la France a senti poindre l’odeur de l’argent. Et les Bleus ont peu à peu renforcé cette perspective grâce aux deux sans-faute ravageurs de Karim Laghouag et Nicolas Touzaint, impeccables capitaines de route d’un collectif renouvelé, avec Triton Fontaine et Absolut Gold*HDC, finalement dix et cinquième de la compétition individuelle. Le public, massé dans les tribunes, autour des lices et sur les buttes menant du Terrain d’Honneur aux superbes bâtiments de l’ancien Haras royal puis national, a explosé de joie pour célébré ses héros. L’ovation réservée au second nommé fut à la hauteur de la joie que lui-même a exprimé, au grand galop et poing levé. Frissons.
Entre-temps, Gireg Le Coz et Aisprit de la Loge, meilleur des deux couples sélectionnés uniquement en individuels, ont fauté sur le mur placé en 7 par Quentin Perney, terminant quinzièmes en raison aussi de deux secondes de temps dépassé. Le matin, Benjamin Massié, l’autre individuel, avait fauté avec Édition Fonroy, finissant trente-quatrième. Retour dans le money-time. Pour conserver l’argent, la France dispose alors d’une marge d’une faute et deux secondes de temps dépassé. Hélas, Gaspard Maksud et Zaragoza, sixièmes l’an passé à Pratoni, pèchent sur l’oxer 4b du triple vertical-oxer-vertical, se classant huitièmes. Pour l’Allemagne, Christoph Wahler signe un sans-faute sans émotion aucune sur l’époustouflant Carjatan S, que d’aucuns imagineraient voir en CSI 3*, maintenant l’Allemagne en embuscade, et se classant lui-même quatrième. Plus que deux secondes de marge, donc. En guise d’intermède, on a assisté à la rechute de l’Irlandaise Sarah Ennis et de son superbe quasi-poney Grantstown Jackson, remontés de quarante-neuf rangs lors du cross, qu’ils avaient ouverts, après un dressage calamiteux. Deux fautes, concédées sur le 4b et l’oxer 6 sur bidet, ont relégué le couple au quatorzième rang…
La Belgique et les Pays-Bas qualifiés pour Paris 2024
La pression est énorme sur les épaules de Stéphane Landois, qui portent le destin de l’équipe de France, la possibilité d’un podium individuel, mais aussi, peut-être, la volonté viscérale d’honorer l’ange Thaïs qui veille sur lui et Chaman Dumontceau*Ride For Thaïs, en ce lieu à jamais lié à sa mémoire. Les deux athlètes font de leur mieux, mais ne peuvent éviter une faute sur le vertical 5. La France repasse en bronze et Stéphane perd toute chance de podium individuel, mais il serre tout de même le poing, discrètement, exprimant un soulagement d’avoir bien fini ce championnat. Rêvant de Paris 2024, il pourra bientôt se remettre au travail, au dressage comme à l’obstacle, en se rappelant qu’il aurait pu finir sur le podium s’il avait obtenu au Pin une note de dressage aussi exceptionnelle que mi-mai à Chatsworth (22,8). Avec des si, on met Paris en bouteille… Et Versailles?
Le bras de fer collectif est donc remporté par l’Allemagne , en argent à près de trente points des Britanniques, la France finissant en bronze. Suivent l’Irlande, la Suisse, la Suède, ainsi que la Belgique et les Pays-Bas, qui ont assuré leur participation aux Jeux olympiques de Paris 2024. La fin du match est belle mais sans surprise. Ainsi, Sandra Auffarth sécurise parfaitement l’argent allemand et le bronze individuel avec Viamant du Matz, un valeureux Selle Français qu’on imaginait pas à pareille fête dans des championnats où le cross, dur et sélectif à souhait, a joué un rôle si crucial. Cela ne fait que surligner sa bravoure et ses qualités physiques, mais aussi la maestria et les talents de femme de cheval de celle qui fut sacrée championne du monde grâce notamment à un cross sublime dans des conditions dantesques déjà, aux Jeux équestres mondiaux de Normandie, il y a… neuf ans déjà, avec l’inoubliable Opgun Louvo!
Kitty King et Vendredi Biats, conscrit de Viamant, ont à leur tour bouclé leur hippique sans faute. Eux non plus n’étaient pas attendus en argent vu le parterre de stars anglaises en lice, mais ils n’en ont pas moins conclu leurs troisièmes Européens consécutifs dans le top dix après leur septième place à Luhmühlen et leur neuvième rang à Avenches, où il avaient déjà contribué à l’or collectif. En 2021, le score de Rosalind Canter n’avait pas compté dans le total de l’équipe 100% féminine du Royaume-Uni, alors qu’elle montait Allstar B, son héros des mondiaux de Tryon. Depuis, c’est avec Lordships Graffalo que sévit surtout cette discrète et redoutable gentlewoman farmer, deuxième l’an passé du CCI 5*-L Badminton, puis quatrième aux Mondiaux de Pratoni, et lauréate cette année à Badminton et donc au Pin en dépit d’une faute concédée cet après-midi sur le 4a. Championne du monde en 2018, championne d’Europe en 2023. Championne olympique en 2024? Paris ne s’est pas faite en un jour… mais “j’espère que mon cheval sera adapté au format des JO et au cross de Versailles. Y participer est un rêve et je vais travailler très dur jusqu’à l’été prochain pour tenter de le réaliser.” Rêvons aussi, plus largement, que le complet de Paris 2024 soit aussi réussi sportivement que celui du Pin 2023.
Le classement individuel
Le classement par équipes
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