Ces derniers mois, le monde du dressage a été touché par de nombreuses polémiques. En novembre, d’abord, la chaîne de télévision publique danoise TV2 a publié un reportage donnant à voir des méthodes d’entraînement inacceptables dans les écuries d’Andreas Helgstrand, au Danemark. Plus récemment, c’est le cavalier olympique Cesar Parra qui a été et est au centre d’une affaire aux retentissement encore plus importants, puisqu’aux accusations de maltraitance envers les chevaux s’ajoutent, dans son cas, des allégations de trafic d’êtres humains qui ont poussé le FBI a ouvrir une enquête. Isabell Werth elle-même a été le sujet de plusieurs polémiques. L’arrivée dans son piquet de chevaux de Queenparks Wendy, ancienne monture d’Andreas Helgstrand avec laquelle elle a fait ses débuts en compétition le week-end dernier, lui a été reprochée par certains. De très vives critiques ont également été émises à son encontre après la diffusion d’une vidéo où l’on voit l’Allemande monter un cheval alezan lors d’un clinic donné au sein de la structure américaine de Heglstrand Dressage, cette monture ayant la plupart du temps un angle tête - encolure vraiment fermé sur les quelques minutes d'images. Enfin, une vidéo très courte et vieille d’une dizaine d’années et montrant Isabell Werth s’exprimer sur le sujet du rollkur, mais aussi monter Bella Rose dans une attitude également parfois très fermée, a suscité le débat. C’est à propos de tous ces sujets que la cavalière la plus médaillée de tous les temps s’est exprimée ce dimanche 18 février à travers un communiqué publié sur les réseaux sociaux, où elle est présente depuis quelques mois après y avoir longtemps été réfractaire.

“Celui qui connaît ses limites fait preuve de plus d’humilité lorsqu’il juge les autres”

“Il y a beaucoup de débats en ce moment entre les amoureux de chevaux, les cavaliers et les défenseurs des animaux”, introduit l’Allemande. “Il y a eu des images révoltantes, qui doivent avoir des conséquences. Je m’inquiète cependant que la controverse actuelle nous divise, alors qu’une chose nous réunit tous: l’amour des chevaux. C’est pourquoi il faut clarifier certains points.  

C’est une bonne chose que nous ayons de hautes exigences envers nous-mêmes. J’essaye toutefois de ne pas tomber dans des jugements hâtifs et à distance d’événements dont je n’ai pas été témoin personnellement. Durant les trente-cinq dernières années, j’ai remporté de nombreuses médailles et formé puis concouru avec des chevaux fantastiques. Après leurs carrières, ils ont vécu ou vivent encore bien des années à la retraite chez moi (c’est notamment le cas de Don Johnson, El Santo, ou encore Bella Rose, parmi d’autres, à l’heure actuelle, ndlr). Pour autant, et même en ayant les meilleures intentions, je fais moi aussi des erreurs, mais grâce à l’expérience, à l’évolution personnelle et à un bon entraînement, j’en fais moins que par le passé. Celui qui connaît ses limites fait preuve de plus d’humilité lorsqu’il juge les autres.”

“Ma décision d’animer un clinic au sein de la structure américaine de Helgstrand Dressage [...] était personnelle”

“Je me suis rendu pour la première fois dans les écuries d’Andreas Helgstrand il y a quatre ans. Grâce à Madeleine Winter-Schulze (fidèle mécène et amie d’Isabell Werth, propriétaire, entre autres, de Bella Rose, d’Emilio, ou encore de Quantaz en partie, ndlr), Joshua (un fils de Sezuan âgé de dix ans qui est jusqu’ici sorti à quelques reprises sur le Petit Tour et dont la multimédaillée semble penser le plus grand bien, ndlr) est arrivé chez moi. Je n’ai trouvé quelque chose à redire quant à l’équitation pratiquée ou un quelconque comportement envers les chevaux lors d’aucune de mes visites aux écuries Helgstrand. Au contraire, mes élèves et moi avons acheté chez lui des chevaux qui sont en bonne santé et connaissent déjà, pour certains, beaucoup de succès. Ils nous réjouissent tous beaucoup! J’ai moi aussi été choquée par les images et les dires des anciens collaborateurs de Helgstrand Dressage qui ont été diffusées (dans le reportage Operation X de TV2, qui donne également la parole à des personnes qui travaillaient encore au sein de la structure au moment du tournage, ndlr). Même si les faits ne se sont pas déroulés au sein de la structure où Andreas Helgstrand s’entraîne lui-même, ils font tout de même partie de son domaine de surveillance et de responsabilité. J’ai d’ailleurs eu des échanges francs et honnêtes avec lui à ce sujet. Il faut cependant garder une chose en tête: lui-même n’est pas montré à cheval (dans le reportage, ndlr).

Ma décision d’animer un clinic au sein de la structure américaine de Helgstrand Dressage à Wellington (le 29 janvier, ndlr) était personnelle, et non pas économique. À cette occasion, j’ai donné des cours à quelques très bons chevaux avec leurs cavaliers et ai moi-même monté un cheval. Certains d’entre vous ont vu la vidéo et l’ont commentée: non, je n’ai pas pratiqué le fameux ‘rollkur’, et le cheval n’allait pas mal. Je n’ai malheureusement pas réussi à conserver ce cheval que je montais pour la première fois en permanence bien devant mes aides et avec le chanfrein devant la verticale. Son encolure assez courte m’a par ailleurs compliqué un peu la tâche.”

Pour “une discussion [...] qui pose clairement la différence entre mauvaise équitation et maltraitance animale”

“En parallèle, une vidéo vieille de dix ans avec Bella (Bella Rose, ndlr) a refait surface. Bella a désormais vingt ans et profite de sa retraite chez moi. Son fils (Via Bellani, né en 2023, ndlr) grandit et se développe aussi chez nous. Peut-être aura-t-elle envie cette année - contrairement à l’an passé, ce que je comprends parfaitement - de porter un nouveau poulain? Certains d’entre vous le savent depuis longtemps, mais mes propos sur l’ancienne vidéo (où la cavalière s’exprime sur l’usage du rollkur, ndlr) ne correspondent pas aux images que l’on y voit. De fait, la possibilité d’émettre une critique sur la scène filmée ne m’a pas été donnée, et parce que cela donne une fausse impression à ceux qui visionnent la vidéo, la chaîne WDR (canal public allemand qui était le diffuseur originel de la vidéo, ndlr) a été condamnée par la justice à retirer ce montage. Cette ordonnance vaut encore pour tous ceux qui publient la vidéo (qui a d’ailleurs été supprimée du compte Instagram où elle avait été mise en ligne il y a quelques jours, même si la propriétaire de celui-ci clame ne pas avoir été contactée par qui que ce soit pour lui demander de retirer le contenu, ndlr). 

Il est important pour moi que nous ayons dans le futur une discussion honnête et juste, qui définit clairement la différence entre mauvaise équitation et maltraitance animale. Les fautes d’équitation peuvent et doivent être un sujet de discussion, c’est là la clef de mon sport et la condition pour que le cheval et l’humain progressent ensemble. Mais cela doit se faire de manière factuelle, objective et juste. Cela ne vaut pas pour des cas comme celui de Cesar Parra, qui relèvent de la justice publique, celle-ci s’étant d'ailleurs déjà saisie de l’affaire.”