Gérer ses infrastructures au rythme des saisons
Maintenance des clôtures, entretien des extérieurs, des abris, des boxes et des barns, gestion de l’éclairage, suivi de l’état des abreuvoirs et des espaces d’alimentation… Au fil des saisons, tout propriétaire ayant son cheval à la maison doit veiller à la bonne tenue de ses infrastructures, le bien-être de sa monture passant en bonne partie par un lieu de vie optimisé. Comme souvent, l’anticipation est le maître mot!
Les chevaux ne sont pas tous logés à la même enseigne : certains vivent en boxes et barns, d’autres au pré ou au paddock, d’autres encore alternent box et extérieur… Tout dépend des convictions de leurs propriétaires, de leurs moyens financiers et de l’espace dont ils disposent. Quoi qu’il en soit, un certain nombre d’actions sont indispensables si l’on veut que la structure fonctionne de façon optimale, c’est-à-dire avec des chevaux évoluant dans le bien-être et la sécurité, et des personnes dont le quotidien s’organise de manière fonctionnelle. On pense ainsi aux sols – des espaces de travail comme de détente –, à la préservation de l’eau, à la lumière, aux abris, aux clôtures, aux abreuvoirs, aux espaces d’alimentation… Quel que soit l’espace disponible pour l’équidé, et tout en tenant compte du budget de chacun, la règle d’or pour maintenir ses infrastructures fonctionnelles et de qualité est l’anticipation! De fait, un entretien régulier et un suivi quotidien sont de rigueur.
Gérer ses intérieurs en fonction des températures
Quelle que soit la fréquence de sortie quotidienne des chevaux et leur possible vie en extérieur, une rangée de boxes, voire un barn, s’avère très utile dans une écurie. Jean-Bernard Trinquet, responsable commercial pour la partie constructions équestres chez Cheval Liberté, rappelle les enjeux liés à ces constructions: “Nous construisons toutes sortes de projets pour nos clients, grâce à une large gamme standard, totalement personnalisable, notamment celle concernant la taille des boxes pouvant aller jusqu’à quatre mètres sur quatre. Les ensembles de boxes et les barns peuvent disposer d’avancées de toitures, de volets en bois ou en Plexiglas, avec barreaux pour permettre aux chevaux de passer la tête dehors, d’accès directs à une terrasse ou un paddock (individuel ou partagé) via des portes fermières, de séparations mixtes pour favoriser les interactions, de façades ou de séparations mécanisées sur double rails s’ouvrant totalement pour un curage au tracteur… De nombreuses choses sont possibles. Nous accompagnons les clients avec des conseils et des produits sur mesure, tant au moment de la conception que des futurs entretiens. Je conseille de profiter de la belle saison pour nettoyer les espaces de vie, tout désinfecter et vérifier s’il y a des réparations à prévoir : planche à remplacer, verrou, roulette de porte, traitement du bois… Mais aussi pour lancer des travaux tels que la pose de portes fermières ou de nouvelles séparations! D’une façon générale, nous nous occupons des extérieurs l’hiver et des intérieurs l’été, selon l’endroit où se trouvent les chevaux et de manière à les importuner le moins possible.”
En été, on peut ainsi réfléchir à la façon d’optimiser, avant l’hiver, le fonctionnement de l’écurie. Par exemple, Fanny Pierard, responsable des sols équestres et des écuries actives chez ECOECURIE, parle de certaines innovations faciles à mettre en place: “Nous proposons des matelas de couchage en caoutchouc dotés d’un cœur en mousse, ce qui, en plus d’apporter confort et sécurité de couchage au cheval, permet de mettre moins d’épaisseur de litière. Par ailleurs, nous proposons des litières en miscanthus, à très fort pouvoir absorbant et au pH neutre, ce qui est idéal pour la qualité du fumier et la biodégradabilité. Elles sont dépoussiérées pour favoriser la respiration des chevaux et faciles à nettoyer.”
Jean-Bernard Trinquet insiste sur la nécessité d’anticiper: “Trop souvent, des clients nous appellent au moment où leur besoin est imminent. Nous essayons alors de faire le maximum pour répondre favorablement à leurs demandes grâce aux nombreuses références disponibles en stock et à nos équipes de montage qui se déplacent dans toute la France.”
Prolonger la lumière des belles saisons
L’été est une saison agréable : il fait souvent beau et jour longtemps ! Mais au fur et à mesure que les journées raccourcissent, les plages horaires durant lesquelles il est possible de s’occuper des chevaux s’amenuisent, et l’on se résout à rallumer la vieille ampoule blafarde à l’intérieur de l’écurie et le spot à effet boîte de nuit sur la carrière… Cette gestion de la lumière est non seulement très inconfortable pour tous, mais peut même s’avérer néfaste pour le cheval! C’est ce qu’explique Bruno Duvault, fondateur et directeur général de Proximal: “Notre approche vise à proposer la bonne lumière au bon moment. Notre métier consiste à optimiser, par différents types d’éclairages, le bien-être et donc, par extension, la performance et la sécurité des chevaux autant que celle des humains. Et dans les espaces de vie comme de travail! Les chevaux sont dotés d’une vision plus sensible aux contrastes de lumière que nous. C’est ce qui explique, par exemple, certains comportements surprenants, voire dangereux, vis-à-vis des ombres portées sur une aire de travail. Contrairement au cavalier, qui possède une vision trichromate (basée sur la perception des trois couleurs fondamentales – le rouge, le vert et le bleu – et leurs nuances), l’équidé a une vision dichromate et ne perçoit pas le rouge, qu’il visualise dans des tons de gris. Ainsi, nous proposons des lumières LED avec des longueurs d’ondes spécifiques à la couleur rouge permettant de favoriser les phases de récupération des chevaux, d’apaiser les juments au moment du poulinage et de sécuriser les rondes de nuit sans perturber les équidés. Il y a également les longueurs d’ondes bleues qui, elles, vont permettre d’optimiser les périodes de chaleurs des juments en venant compléter l’insuffisance de lumière naturelle en hiver, nécessaire à la pérennité d’un bon cycle. Pour des aires de travail extérieures, nous proposons des solutions offrant un éclairage au sol parfaitement uniforme grâce à des projecteurs munis d’optiques asymétriques. Positionnés à l’horizontal, ils permettent d’aller chercher le plus loin possible sur la largeur et la longueur de la carrière en évitant les halos –contrairement aux projecteurs traditionnellement positionnés à faible hauteur qui éclairent la faune alentour et génèrent un effet d’éblouissement néfaste. Pour ces projets d’éclairage des carrières, nous nous basons sur la réglementation des complexes sportifs. Dans ce cadre, nous allons tenir compte, entre autres paramètres, du niveau d’ensoleillement, qui varie selon les régions, de la couleur du sol et des objectifs d’usage en nocturne et semi-nocturne (entraînements, compétitions). Pour chaque projet, nous réalisons une étude de la lumière afin de proposer la solution d’éclairage la plus adéquate, en tenant compte des besoins et des particularités des infrastructures et de l’environnement. Globalement, je dirais donc qu’il faut faire appel à nous au moins une saison en amont, par exemple au début de l’automne pour les mises à la reproduction des juments, ou à la fin de l’automne en prévision de la saison des poulinages.”
Prendre soin de ses clôtures et de ses pâtures
Fort heureusement, loin est le temps où les chevaux étaient parqués au box vingt-trois heures sur vingt-quatre. Aujourd’hui, à l’heure où le bien-être animal est au cœur des préoccupations, ce phénomène est devenu minoritaire. De fait, cela nécessite un aménagement de l’espace, donc la pose de clôtures pour le structurer. Jean-Baptiste André, qui dirige désormais la marque de clôtures et portails en bois De Sutter Naturally en France, après avoir longtemps œuvré en tant que directeur technique d’un important haras d’élevage de Pur-sang, fait parler son expérience: “Pour les paddocks et prairies, nous recommandons une clôture de trois lices avec une hauteur de 1,40m pour la lice du haut et un entraxe plutôt serré (2,50 m ou 3 m). Nous proposons des bois tropicaux exotiques, magnifiques, très durs et résistants, ou du pin rouge du Nord, traité pour un emploi classe 4 selon un procédé labellisé Densiforce, garantissant la qualité du traitement. Les deux options sont extrêmement durables, avec une garantie anti-pourriture de vingt ans pour la première et de quinze ans pour la seconde, le prix n’étant pas le même. Dans les deux cas, je recommande de protéger les lices avec un discret petit fil galvanisé électrifié. Car les chevaux sont parfois étranges: même s’ils disposent de la meilleure herbe dans leur prairie, ils peuvent avoir une fâcheuse tendance à grignoter le bois des clôtures s’ils s’ennuient! Cet ajout électrifié est alors indispensable, en particulier dans les petits paddocks où l’herbe peut venir à manquer. Cette protection complémentaire n’est pas très onéreuse et augmente la durée de vie de l’investissement. Nous pouvons également apporter notre aide pour l’aménagement des paddocks: disposition, orientation, circulation… L’idéal pour mener à bien ce type de projet est de réfléchir à la conception durant l’hiver et de planter à la sortie du printemps. Attention: dans certains endroits très secs, il ne faut pas attendre trop longtemps dans la saison, car le sol devient alors trop difficile à pénétrer. Un autre créneau idéal pour planter les clôtures est situé aux mois de novembre et décembre. La sortie de l’hiver est également le moment opportun pour procéder à une vérification globale de l’état des clôtures et réaliser les éventuelles réparations nécessaires avant la saison de pousse de l’herbe: retendre les fils, remplacer une lice cassée par une branche, vérifier le réglage des barrières d’entrée… La maintenance, c’est la base! Il faut, quoi qu’il en soit, faire le tour très régulièrement.”
En effet, avoir de belles et bonnes clôtures ne suffit pas… Il faut les entretenir! Elles doivent, notamment, être dégagées. Jean-Bernard Trinquet apporte ses conseils: “Le Gyrobroyeur est une machine incontournable, par exemple. Pour l’utiliser, il faut toutefois que les abords des clôtures ne soient pas encombrés de branches, et ce, d’autant plus s’il y a un fil électrique, car rien ne doit perturber le passage du courant.”
Sols en tous genres
Il faut, par ailleurs, vérifier que les sols des paddocks soient prêts à recevoir des chevaux. Et comme la majorité de ces derniers sont mis au vert à partir du printemps, il faut anticiper. Pour Fanny Pierard, “stabiliser les sols est plus sain pour les équidés et facilite l’accès aux humains. Cela représente, certes, un budget, mais c’est plus avantageux et sécuritaire à long terme. En cas de budget restreint, on peut chaque année stabiliser un bout de terrain, en commençant par les zones stratégiques, autrement dit les endroits particulièrement piétinés tels que les abords, les abreuvoirs, les râteliers et les entrées de abris.” Guillaume Derolez, directeur de Valisol, complète: “Se lancer dans le projet de pose de dalles stabilisatrices peut nécessiter un travail de terrassement en amont afin d’égaliser les sols. Des travaux peuvent également être nécessaires sur des sols peu ou pas drainants, car trop calcaires, par exemple. Tout dépend des régions! En tout cas, poser des dalles sur un sol abîmé ne sert à rien, à part masquer la misère. Cela doit se faire à la belle saison, en prévision de l’hiver. Trop souvent, malheureusement, les clients attendent d’être au pied du mur pour intervenir… Une fois les dalles posées, on ajoute par-dessus une couche de sable ou de terre végétalisée. Cela n’exclut en rien l’entretien régulier et minutieux de l’espace en question. Il est à noter que nous posons également des dalles en intérieur, aux propriétés antidérapantes et isolantes, en plus du confort qu’elles apportent.”
Bon nombre de paddocks sont tout de même équipés d’un abri, utile en temps de grosses rafales de vent, par exemple. Car, comme le rappelle Fanny Pierard, “les chevaux ne craignent ni le froid ni la pluie. En revanche, ils ont besoin de se protéger du vent, de la chaleur et des insectes.” Jean-Baptiste André nuance, considérant que l’on a “construit des abris davantage pour se rassurer que pour répondre à un besoin de nos chevaux, car ceux-ci s’accommodent parfaitement des abris naturels”. Tout en ajoutant: “Malgré tout, un abri s’avère très utile l’hiver pour mettre une boule de foin au sec, prodiguer un soin ou permettre au maréchal-ferrant de travailler dans de bonnes conditions. Dans ce cas, je préconise plutôt un abri de six mètres sur trois; ainsi, tout le troupeau (jusqu’à six chevaux) peut se réunir autour de la boule de foin.” “Le bon compromis est parfois d’opter pour des stations de mise à disposition de foin, comme un nourrisseur de parc couvert (statique), ou une remorque, complètement mobile”, ajoute Jean-Bernard Trinquet.
Mais attention : pour que les paddocks demeurent des endroits agréables pour les chevaux, il ne faut pas négliger le travail annexe à réaliser tout au long de l’année! “Un chaulage est parfois utile pour lutter contre l’acidification des sols; il peut être réalisé dès que ces derniers sont porteurs”, indique Jean-Baptiste André. “Si l’on sait qu’une pâture ne va pas être utilisée durant plusieurs mois, il est également recommandé d’apporter du compost (riche en sels minéraux et en matière organique) à hauteur de dix à quinze tonnes par hectare à l’automne. Et lorsque la terre a séché à la sortie de l’hiver, il faut la herser afin de l’aérer, arracher la vieille herbe et niveler le sol piétiné par les sabots. Parfois, un coup de rouleau peut même s’avérer utile, par exemple dans les futurs paddocks des juments suitées ou pour les parcelles que l’on prévoit de faucher.” “À cette époque de l’année, il faut passer la lisseuse pour enlever les mottes et les taupinières”, ajoute même Jean-Bernard Trinquet. Dernière recommandation de Jean-Baptiste André: “Idéalement, après avoir hersé un herbage ayant servi tout l’hiver, il faut offrir un temps de repos à la prairie. Pour ma part, je n’y mets plus de chevaux jusqu’à une première fauche précoce, vers la mi-mai: cela stabilise le sol et permet aux graminées de repousser et à la flore de se diversifier. Il faut profiter de cette période de repos pour remettre en état les entrées des paddocks. Il peut être intéressant de les sécuriser avec une bonne couche de sable compacté. Bien sûr, cela implique d’avoir plusieurs prairies pour pouvoir procéder à un roulement. Je préconise ainsi le système à trois: une prairie avec des chevaux, une autre au repos, et une troisième dans laquelle je mets des bovins, qui mangent ce qui a été refusé par les chevaux.”
La question de l’eau, de plus en plus cruciale
Du fait du réchauffement climatique, l’eau est devenue une denrée rare et chère qu’il faut économiser et gérer au mieux. Il s’avère donc très utile de mettre en place des moyens de récupération de l’eau de pluie. “Le choix d’équiper ses boxes ou son barn de gouttières reliées à un système de récupération de l’eau de pluie s’avère souvent payant! Avec de grandes surfaces de toiture, on canalise beaucoup de liquide”, souligne Jean-Bernard Trinquet. Mais Fanny Pierard prévient: “Récupérer l’eau est utile tant pour l’abreuvement que pour l’arrosage des pistes. Pour ce faire, il est possible de mettre en place un système de forage ou des cuves enterrées. Mais attention: si les abreuvoirs sont reliés à une cuve de stockage, il faut penser à régulièrement contrôler la qualité de l’eau et vérifier les filtres. Il peut en effet arriver que l’eau soit salie, par des crottins par exemple.” On peut également opter pour des bassins, mais ceux-là occuperont nécessairement davantage de place. Sauf si l’on choisit de mettre les bassins en question dans les paddocks pour permettre aux chevaux d’en profiter! Quant à l’option d’une toiture végétalisée, elle permet de stocker temporairement l’eau de pluie, évitant ainsi le phénomène de ruissellement et d’inondation, tout en ayant un effet isolant l’hiver et rafraîchissant en cas de canicule. L’hiver est la bonne période pour mettre en place les cuves en prévision de la belle saison et des périodes de sécheresse.
Concernant les pistes, l’arrosage aérien, via des arroseurs ou tout type de jet, induit des dépenses d’eau considérables pour un résultat mitigé: les gouttes se dispersent avec le vent, des flaques se forment par endroits alors que d’autres zones, notamment les coins, demeurent sèches ou presque, ce qui se conclut par un gaspillage de ressource pour une couche de travail hétérogène. Fanny Pierard conseille donc “de fibrer sa piste afin d’améliorer la portance du sol et retenir l’humidité, et / ou de mettre en place un système de subirrigation ou des dalles à réserves d’eau intégrées permettant de maintenir un sol de bonne qualité et stable”. Il faut aussi considérer l’emplacement de la carrière. “Si elle se trouve en plein vent, nous conseillons de planter des haies à feuilles persistantes autour pour éviter que le sol ne sèche trop vite. Il faut faire cela avant le début du bourgeonnement qui a lieu en avril, ou après la fin du mois d’août”, explique encore Fanny Pierard, indiquant enfin que, “d’une façon générale, il faut bien observer la façon dont l’eau s’écoule naturellement afin d’optimiser l’agencement de son espace.”
Force est donc de constater qu’il est capital de réaliser certains investissements, à la hauteur de son budget, afin que les chevaux puissent évoluer dans un environnement agréable et sécuritaire, et que les humains puissent travailler dans de bonnes conditions, voire même réaliser des économies à long terme. Rappelons que tous ces aménagements doivent être effectués à des périodes de l’année opportunes. L’anticipation est toujours la meilleure recette!