Chaque année, le Grand Prix d’Aix-la-Chapelle est, en-dehors du grand championnat de la saison, le temps fort le plus attendu sur la planète jumping. Cette année encore, cette épreuve mythique et comparable avec aucune autre a procuré des émotions elles aussi inégalables à tous les spectateurs présents dans l’immense stade de la Soers, bien évidemment plein à craquer pour ce rendez-vous. Si les parcours construits par Frank Rothenberger pour la Coupe des nations de jeudi et l’épreuve majeure du vendredi avaient suscité quelques doutes chez certains observateurs, l’Allemand a su imaginer d’excellents tracés ce dimanche, qui ont fait de ce Grand Prix une épreuve au scénario quasi parfait.

Pour la première manche, le chef de piste avait notamment bâti deux doubles, placés en numéro quatre et douze, ainsi qu’une ligne associant des barres de spa à un triple vertical - oxer - vertical (numéro neuf), ou encore une ligne courbe associant rivière et vertical clair à cinq foulées. Finalement, huit couples ont réussi à conclure ce premier acte sans la moindre pénalité, et les duos ayant produit les dix parcours à quatre points les plus rapides se sont également qualifiés pour la deuxième manche. Kevin Staut a fait partie de ceux-là avec Visconti du Telman, qui n’a fauté que sur le dernier oxer, obstacle le plus fautif du parcours avec onze fautes. François-Xavier Boudant et Brazyl du Mezel, qui avaient livré un double sans-faute dans la Coupe des nations jeudi, ont quant à eux fauté en sortie de triple, puis également sur l’ultime obstacle du parcours pour terminer vingt-sixième.

Lors de la deuxième manche, le fameux double de bidets avait été transformé en triple, et les concurrents devaient également affronter onze autres obstacles, pour un total de quinze efforts. Au début de ce second acte, les sans-faute se sont enchaînés, puisque parmi les couples ayant déjà quatre points au compteur, deux seulement se sont de nouveau montrés fautifs. Kevin Staut et Visconti du Telman font, d’ailleurs, partie des duos ayant conservé leur score de la première manche, et leur chronomètre lors de leur second passage leur a permis de terminer septièmes, ex aequo avec Christian Kukuk et la géniale Just Be Gentle. La pression ayant joué son rôle, à partir du moment où les sans-faute du premier tour sont entrés en lice, les parcours parfaits se sont raréfiés. Ainsi, José Maria Larocca, que l’on pouvait considérer comme la surprise de la première manche, a écopé de douze points avec Abril Iconthon. Kendra Claricia Brinkop, Marcus Ehning, Lorenzo De Luca et Nicola Philippaerts ont, quant à eux, commis une faute chacun avec Tabasco de Toxandria, Coolio, Denver de Talma et Katanga van het Dingeshof. Le deuxième cité, vainqueur de cette épreuve l’an dernier et déjà à deux autres reprises auparavant, a d’ailleurs tenu le public en haleine jusqu’au bout, puisque c’est le dernier vertical qu’il a mis à terre.

Finalement, quatre couples se sont retrouvés au barrage pour tenter d’inscrire leur nom sur le fameux mur des gagnants. Premiers à s’élancer, McLain Ward et Ilex ont d’emblée signé un triple sans-faute et établi le chronomètre de référence à 41”02. Ce sont ensuite les vainqueurs du dernier Grand Prix de Calgary, Martin Fuchs et Leone Jei, qui sont entrés sur le gazon aixois. Tous deux ont franchi la ligne d’arrivée avec deux secondes d’avance sur leurs concurrents américains, mais le gris a commis une faute de couverture sur l’avant-dernière difficulté après un virage très serré. Le public s’est alors mis à applaudir en cadence pour encourager André Thieme et Chakaria, les champions d’Europe individuels de 2021, qui sont apparus de retour au sommet de leur art après une période moins faste. En retard après le passage du quatrième obstacle, le cavalier et son alezane se sont rattrapés par la suite, grâce notamment à un virage à 270° très efficace, pour couper les cellules en 39”77. Richard Vogel et l’extraterrestre, vainqueurs de l’étape du Grand Chelem Rolex de Genève en décembre 2022, se sont alors lancés aux trousses de leurs compatriotes. Utilisant au mieux l’immense amplitude de son étalon, le cavalier établi près de Francfort-sur-le-Main a réussi à achever son second parcours en 38”64…mais les postérieurs de United Touch S ont emmené la barre du tout dernier vertical. Le couple a ainsi dû se contenter de la troisième place et laisser la victoire à André Thieme et sa fidèle alezane.

“J’ai déjà connu des moments très émouvants auparavant avec cette jument”, s’est exprimé le vainqueur après son triomphe. “Elle m’a déjà donné énormément, et nous avons obtenu beaucoup de succès, mais gagner à Aix, c’est vraiment différent! Je me rappelle très bien de la Coupe des nations d’il y a deux ans, où j’étais le dernier à partir pour l’équipe d’Allemagne et nous nous sommes imposés. C’était déjà quelque chose de très spécial, et un moment que je n’oublierai jamais. Quant au Grand Prix, c’est le rêve de tout cavalier de le remporter un jour, mais je pensais que je n’aurais jamais cette chance! Je dois dire qu’aujourd’hui, j’ai réalisé un tournant vraiment serré vers l’avant-dernier, mais ensuite, sur toute la dernière ligne, j’avais l’impression que ma distance sortait mal. Finalement, je crois que ce sont les risques que j’ai pris en fin de barrage et la rapidité naturelle de ma jument qui m’ont permis de l’emporter.” Malgré leur performance du jour, Andre Thieme et son alezane ne feront pas partie du quatuor allemand envoyé à Paris. “Je l’ai compris dès jeudi soir, lorsque j’ai commis une faute dans chaque manche dans la Coupe des nations”, a admis le nouveau vainqueur du Grand Prix d’Aix. “Lorsque je l’ai su, cela a changé quelque chose en moi. Je suis redevenu la personne que j’étais avant de me focaliser sur les Jeux olympiques.”

Les résultats
Toutes les épreuves du CHIO d'Aix-la-Chapelle sont disponibles à la demande sur ClipMyHorse.tv, où ce Grand Prix a été commenté par Kamel Boudra et Fabienne Daigneux