“Un magnifique dimanche pour notre sport”, Maxime Livio

Le cross des Jeux olympiques de Paris 2024 a tenu ses promesses ce dimanche dans l’immense parc du château de Versailles. Non seulement tous les athlètes en sont sortis sains et saufs, offrant au public et au monde le meilleur du concours complet, mais cette épreuve de fond a aussi remodelé la hiérarchie issue du dressage. Avant la seconde inspection vétérinaire et les deux manches d’hippique d’aujourd’hui, l’Allemand Michael Jung et la Britannique Laura Collett gardent la corde, bien qu’ayant échangé leurs places avec Chipmunk (17,8 points) et London 52 (18,3 points). Quant au championnat par équipes, il s’est éclairci avec les échecs de l’Allemagne et de l’Australie. La Grande-Bretagne reste en tête, mais elle est talonnée par la France, qui précède le Japon et… la Suisse! Maxime Livio, le consultant de GRANDPRIX pour cette première épreuve équestre, analyse ce grand dimanche de sport.



“Nous avons vécu un très, très beau cross. Le parcours était parfaitement dosé, et le terrain a bien tenu, ne pénalisant aucune équipe. On savait que tout pouvait se passer avec cette formule à trois couples et où tous les scores comptent, et cela s’est vérifié avec le refus subi par Jonelle Price (avec Hiarado, ndlr) et l’élimination de Christoph Wahler (sur Carjatan S, ndlr), qui ont fortement pénalisé la Nouvelle-Zélande et plus encore l’Allemagne. Pas mal d’équipes favorites ont vu l’un de leurs trois couples connaître un incident. Même la Grande-Bretagne, qui reste en tête grâce à ses notes exceptionnelles au dressage, en a fait les frais avec la pénalité de quinze points infligée à Ros Canter et Lordships Graffalo (champions d’Europe en titre, pour ne pas avoir parfaitement franchi un obstacle, ndlr). À l’inverse, toutes les nations qui ont aligné trois tours sans pénalité en ont grandement profité au classement général, comme la France, le Japon et la Suisse (deux, trois et quatrième au provisoire, ndlr).

Dans l’ensemble, ce fut un magnifique dimanche de sport. Aujourd’hui, tous les athlètes ont pu s’exprimer, et le concours complet a démontré toutes ses qualités. Oui, c’est un sport extrême, mais il peut se pratiquer dans des conditions de sécurité optimales même avec un enjeu sportif maximal. Nous avons tous pu vibrer à fond, passionnés ou néophytes, sur un parcours sans risque trop important pour les concurrents. Il est donc tout à fait possible de vivre une épreuve intense sur le plan sportif et pas trop exigeante en termes de cotes et de longueur pour les chevaux. De ce point de vue, comme pour l’état du terrain, l’équipe organisatrice, et notamment Pierre Le Goupil (chef de piste, ndlr), méritent un grand coup de chapeau.

Les Français ont assuré trois beaux parcours dans une ambiance fabuleuse. Pour ma part, j’ai eu la chance une fois de monter un cross dans ces conditions-là (aux Jeux équestres mondiaux de Normandie 2014 avec Qalao des Mers, ndlr). Et c’était dingue! Même si l’on reste extrêmement concentré sur son sujet, on est forcément porté par ce public et ces encouragements. On ne peut pas en faire abstraction. Aujourd’hui, Karim, Stéphane et Nicolas en ont forcément profité avec Triton Fontaine, Chaman Dumontceau*Ride for Thaïs et Diabolo Menthe. Les trois ont produit des parcours techniquement sûrs et beaux à regarder. Ce sont trois couples expérimentés qui ont su mettre à profit cette expérience. Diabolo a montré des signes de fatigue en fin de parcours, mais Nicolas a su parfaitement gérer la situation, et je suis sûr qu’ils reviendront en forme demain, d’autant que Diabolo est un très bon sauteur.

Cette dernière journée comporte trois véritables épreuves: la seconde inspection vétérinaire et deux manches de saut d’obstacles. Il faut les envisager comme telles et les prendre l’une après l’autre. Nos trois couples français ont les qualités nécessaires pour réussir de beaux parcours et hisser la France sur le podium par équipes. L’ambiance devrait à nouveau être géniale et impressionnante, ce dont il faudra tenir compte. Individuellement aussi, ils auront leurs chances (Stéphane, Karim et Nicolas sont sept, dix ou onzième, ndlr). Parmi les leaders, seul Michael Jung (avec Chipmunk, ndlr) va monter les deux manches en ne pensant qu’à l’individuel. Tous les autres ne vont penser qu’à l’équipe jusqu’à la fin de la première manche. Quant à la visite vétérinaire, elle se prépare dès la fin du cross avec les vétérinaires et les grooms. On hydrate les chevaux et on les fait marcher pour les faire récupérer du semi-marathon qu’ils ont couru. Cette phase, les cavaliers la vivent tous ensemble. Chacun prend le plus grand soin de son cheval, et apporte son aide aux autres, quelles que soient les nations. On félicite ceux qui ont réussi et on réconforte ceux qui ont échoué. C’est vraiment une ambiance magique propre à notre sport.

Le Japon (troisième au général, ndlr) prouve une fois encore qu’il compte parmi les grandes nations. Nous l’avions vu aux Jeux équestres mondiaux de 2018 à Tryon, où ils avaient terminé quatrièmes. Ils avaient connu des Jeux olympiques plus difficiles en 2021 à Tokyo, mais il faut rappeler qu’ils avaient dû composer avec toute la pression liée au fait de concourir à domicile sans bénéficier du soutien de leur public, absent des tribunes en raison de la crise sanitaire. Cette année, ils sont de nouveau très forts.

À titre personnel, je suis ravi du parcours du Vitorio du Montet (que Maxime a monté jusqu’en CCI 5*-L, ndlr) avec l’Autrichien Harald Ambros (qui n’a concédé que 6,8 points de temps au cross, ndlr), mais aussi de la réussite de Dao de l’Océan (quatrième avec 22,1 points sous la selle du Suisse Felix Vogg), qui a de vraies chances de médailles, et de Nutcracker (34 points; le Saumurois a contribué à la commercialisation de ces deux chevaux, précédemment montés par Aurélie Gomez et Astier Nicolas, ndlr). C’est formidable de faire se rencontrer des cavaliers et des chevaux, avec des objectifs clairement affichés dès le départ, et de voir ces objectifs se réaliser aussi bien. Tous sont performants. C’est vraiment chouette, notamment pour Vitorio, qui est incroyablement généreux. Compte tenu de son potentiel au dressage, il n’aurait jamais pu être sélectionné aux JO avec la France, alors je suis ravi qu’il puisse les vivre pour l’Autriche et démontrer toutes ses qualités. Si l’on fait ce métier-là, c’est avant tout pour rencontrer des humains et des chevaux, et je trouve passionnant de faire se rencontrer ces athlètes, en tant que coach ou comme intermédiaire dans la vente d’un cheval.”

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Les résultats par équipes et individuels
La réaction de Thierry Touzaint
La réaction de Karim Laghouag
La réaction de Stéphane Landois
La réaction de Nicolas Touzaint
La réaction de Michael Jung
La réaction de Laura Collett

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