“Porter la veste de l’équipe de France, c’est ce dont j’ai toujours rêvé”, Vérane Nicaud

Âgée seulement de vingt ans, Vérane Nicaud a pris part à sa première Coupe des nations à l’occasion du CCIO 4*-S de Strzegom, fin juin en Pologne. Avec Baron d’État, son hongre de treize ans, elle s’est classée neuvième, contribuant à la victoire l’équipe de France. La Tourangelle, qui ne concourt en complet que depuis deux ans et demi, revient sur cette première réussie et se livre également sur son quotidien de cavalière de haut niveau et d’étudiante en école de commerce.



De gauche à droite: Sébastien At, Camille Laisney, Vérane Nicaud et Marie Bouchanville, victorieux à Strzegom.

De gauche à droite: Sébastien At, Camille Laisney, Vérane Nicaud et Marie Bouchanville, victorieux à Strzegom.

© Libby Law Photography / FEI

Quel est votre sentiment concernant votre première sélection en Coupe des nations avec Baron d’État (SF, Damiro B x I Am Boy SFA), fin juin à Strzegom?   

La sélection en elle-même était vraiment inattendue. J’étais censée participer au Master Pro à Vittel ce week-end-là (qui a finalement été annulé en raison des intempéries). Dix jours avant, Michel Asseray (directeur technique national adjoint de la Fédération française d’équitation en charge du complet, ndlr) m’a demandé si j’étais toujours partante pour participer à un CCI 4* avec Baron. Je n’y croyais pas du tout, j’ai même dû lui faire répéter sa proposition plusieurs fois pour réaliser (rires). Disputer mon premier 4*, qui plus est en équipe de France et à seulement vingt ans, c’était vraiment une chance incroyable. Je ne me voyais pas participer à une telle épreuve avant la fin de l’année. 

C’est un premier aboutissement… 

Oui, c’est vraiment un cadeau. Porter la veste de l’équipe de France et pouvoir représenter mon pays, c’est ce dont j’ai toujours rêvé depuis que j’ai débuté l’équitation. Chaque jour, je monte à cheval en me disant que tout peut s’arrêter du jour au lendemain, car c’est un sport compliqué, donc je prends cela avec beaucoup d’humilité et de recul. Mon père a toujours voulu que je concours en complet, car il considère que c’est la seule discipline qui met autant en avant les qualités sportives du cheval, que celles du cavalier. J’ai commencé il y a deux ans et demi seulement en Amateur 3 au Mans, avec mon ancien cheval de saut d’obstacles. L’année suivante, en 2023, j’ai décroché ma première médaille d’argent au championnat des As Jeunes Cavaliers avec Baron, puis obtenu ma première sélection pour les championnats d’Europe, à Montelibretti, où nous avons terminé quinzièmes. C’était une grande nouveauté pour moi, autant sur le plan technique qu’en termes d’atmosphère. Et moins d’un an plus tard, me voilà sélectionnée pour participer à mon premier CCI 4* et ma première Coupe des nations Seniors avec à la clé une victoire de l’équipe de France. C’est incroyable! 

À Strzegom, vous terminez neuvième en individuel. Quel bilan tirez-vous de la saison de Baron d’État jusqu’ici? 

Je l’ai récupéré quatre mois après mes débuts en complet (formé par Arthur Bonneau et Mathieu Lemoine, sixième du championnat des six ans, puis neuvième du CCIO 4*-S du Pin-au-Haras en 2021 avec, Baron d’État a notamment été essayé par Cédric Lyard et Nicolas Touzaint, ndlr). C’était un vrai petit lion en cage qui n’attendait qu’une chose: galoper sur un parcours de cross. Jusqu’à présent, nous avons a été réguliers. À l’hippique, nous sommes toujours sans faute ou au pire à quatre points. Nous avons tous les deux progressé mentalement. Désormais, nous nous connaissons par cœur, et nos résultats cette saison l’illustrent assez bien. J’ai encore des progrès à faire en dressage: j’ai du mal à mettre en application tout ce que j’ai appris, parce que le stress et la pression prennent le dessus. Pour moi, notre parcours jusqu’ici est un rêve. Pour autant, j’aimerais pouvoir être encore plus complète sur les trois tableaux. Baron récupère bien après chaque concours. Il montre un bon état d’esprit et un bon œil, ce qui est positif. Il m’aide à progresser et me pousse dans mes retranchements. À Strzegom, j’ai découvert un cheval très bien dans son corps, à l’écoute et plein de bonne volonté. C’est de très bon augure pour la suite de la saison. 



“Former de jeunes chevaux, c’est la suite logique pour préparer l’avenir”

Ce week-end, vous participez à vos deuxièmes championnats d’Europe Jeunes Cavaliers, organisés également à Strzegom… 

Oui, et j’en suis très heureuse. J’ai emmené Baron au dernier concours de sélection, en juillet à Marnes-la-Coquette. Il n’a pas concouru, mais il été examiné par la vétérinaire de l’équipe de France, puis nous avons travaillé avec Alexandra Dillière, ma coach de dressage. Je suis fière d’être à nouveau sélectionnée, et nous allons faire de notre mieux pour l’équipe de France. 

Vous concourez également avec Eau Vive de Brenne (AA, Upsilon x Sarastro), dix ans, au niveau 3*. Qu’ambitionnez-vous avec elle? 

Eau Vive est une jument qui a du caractère, mais remplie de bonne volonté. C’est ce qui fait son charme et ce qui nous donne envie de continuer à progresser avec elle. Elle ne sera jamais une grande dresseuse, mais quand je vois comment ma coach la fait travailler, je me dis que nous pouvons encore évoluer. C’est plutôt une très bonne jument de saut. Nous croyons beaucoup en elle pour la suite, et j’espère pouvoir participer à un premier CCI?4* avec elle d’ici la fin de l’année.  

Vous avez également Jungle Tonic d’Aury, un hongre de cinq ans (SF, Mylord Carthago x Quick Star), avec lequel vous avez déjà participé à des épreuves du Cycle Classique. Comment évaluez-vous son potentiel? 

C’est notre premier jeune cheval de complet donc c’est une grande nouveauté pour nous. Pour l’instant, je dirais qu’il est un peu tardif, comme moi (rires). Nous voulons prendre le temps de le construire et de me construire, car je n’ai jamais formé de jeune cheval de complet auparavant. Il a un très bon mental, ce qui nous permet de progresser à notre rythme, sans nous faire peur. Vu mon inexpérience, je ne saurais pas vraiment dire ce qu’il vaut, mais il nous satisfait pour le moment. Nous verrons jusqu’où il nous mène. 

Sur vos réseaux sociaux, vous évoquez un projet autour des jeunes chevaux. Pouvez-vous en dire plus? 

Trouver des chevaux d’expérience, c’est d’autant plus compliqué que cela représente un gros investissement financier. Se tourner vers les jeunes chevaux, c’est la suite logique pour préparer mon avenir. Nous ne cherchons pas de cheval en particulier. Tous ceux qui sont dans notre écurie découlent de concours de circonstance: nous les avons trouvés sans vraiment les chercher. Aujourd’hui, nous sommes fiers d’être tombés sur eux, car nous construisons quelque chose de formidable. Ensuite, l’avenir nous guidera.  



“Je dis toujours que mon père ressemble un peu à Richard Williams”

La Tourangelle s'entraîne au quotidien avec son père dans les trois disciplines.

La Tourangelle s'entraîne au quotidien avec son père dans les trois disciplines.

© Libby Law Photography / FEI

Parmi les personnes qui comptent dans votre vie, votre père semble être très présent. Que vous apporte-t-il? 

Mon père, c’est mon inspiration. Depuis mes années à poney, nous nous débrouillons globalement que tous les deux. Notre volonté est de chercher des clés et des conseils auprès de tous les professionnels dont nous pouvons croiser la route. C’est un vrai autodidacte, qui aime apprendre et me transmettre en retour. Je dis toujours qu’il ressemble un peu à Richard Williams (le père des championnes de tennis Venus et Serena Williams, ndlr), car il est parti de rien et a tout fait pour que je ne manque de rien. Il me répète sans cesse qu’il faut prendre ce qu’il y a de meilleur chez chacun. Notre fonctionnement peut surprendre, mais c’est ainsi que j’en suis parvenue à ce niveau. Aujourd’hui, ce projet équestre est le mien, mais sans lui, je ne pourrai pas m’en sortir. Je lui dois beaucoup. L’équitation est devenue un véritable sport de famille. Mes parents n’étaient pas du tout dans le milieu, mais par conviction, par détermination et par travail, mon père a su me faire comprendre que je pouvais réaliser tous mes rêves si je m’en donnais les moyens. Nous avons soif d’apprendre. Le fait qu’il me connaisse par cœur permet de m’aider mentalement avant d’entrer en piste ou de m’élancer sur un parcours de cross. Il m’est indispensable! 

Avez-qui vous entraînez-vous pour atteindre vos objectifs??  

J’ai la chance d’avoir mes écuries à la maison (à Saint-Quentin-sur-Indrois,?entre Bléré et Loches, en Indre-et-Loire, ndlr) donc c’est mon père qui m’entraîne dans les trois disciplines. Pour le dressage, je prends des cours une à deux fois par mois avec Alexandra Dillière, avec qui nous nous entendons très bien et qui m’aide beaucoup. Depuis un an et demi, avec l’équipe de France, je suis très bien encadrée par toute l’équipe fédérale, notamment lors du cross par Pascal Forabosco, notre sélectionneur national, ce qui me permet d’acquérir de l’expérience.  

Certains cavaliers vous inspirent-ils particulièrement ?  

J’ai beaucoup d’admiration pour tous les cavaliers de haut niveau en général puisque je sais à quel point cette discipline est compliquée. Je pourrais difficilement n’en citer qu’un seul, mais j’admire particulièrement la carrière de Michael Jung (triple champion olympique individuel et multiple champion du monde et d’Europe, ndlr). C’est un cavalier qui évolue aussi bien à haut niveau en complet qu’en saut d’obstacles, les deux disciplines qui me font vibrer aujourd’hui. J’aimerais moi aussi pouvoir un jour concourir sur ces deux tableaux. 

Poursuivez-vous des études ou êtes-vous cavalière à plein temps? 

Je gère ma carrière sportive tout en continuant mes études. Je suis en première année d’école de commerce à l’EDHEC, intégralement en distanciel. C’est ce qui me convient le mieux. C’est une belle opportunité pour une jeune de pouvoir étudier tout en ayant l’occasion d’évoluer dans le sport. Je partage donc mes journées entre mes cours et mes chevaux. Ce n’est pas simple tous les jours, parce que ça requiert beaucoup d’organisation et d’autonomie. De fait, il n’est pas de tout repos de concourir sur trois circuits différents: le saut d’obstacles, car j’ai conservé mes deux chevaux de tête (Bandy d’Ors, SF, Dandy du Plapé x Attila III et Frenchstar Helau, SF, Wodan x Narcos II, ndlr), le complet et le Cycle classique, tout en continuant mes études. Mais c’est vraiment un apprentissage de vie. Le commerce est un aspect essentiel pour réussir dans le monde équestre, donc mes études apportent beaucoup à mon quotidien de cavalière. 



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