Quelles spécificités pour assurer un étalon ou une poulinière ? (2/2)
Tous ceux qui se sont frottés à l’élevage savent qu’il s’agit d’un monde bien spécifique. Une activité qui apporte beaucoup de joie et de satisfaction certes, mais qui “traîne” aussi son lot de risques, de dangers, d’accidents et de désagréments. Voici donc quelques clés pour s’assurer spécifiquement lorsque l’on fait naître des poulains, que l’on détient un étalon ou que l’on est propriétaire d’une poulinière. En outre, quel que soit l’âge et le sexe du cheval, des contrats généralistes doivent également être mis en place. Explications.
La première partie de cet article est à retrouver ici.
Qu’en est-il du côté des étalons ? Un mâle, utilisé en tant que tel, sert à assurer la descendance d’une lignée… Il se doit donc d’être fertile. Ainsi les clauses dans le cadre d’un contrat d’assurance dédié vont jouer sur la couverture de sa fertilité, en l’occurrence de sa potentielle infertilité. Celle-ci peut alors être totale ou temporaire. “Il existe des contentieux sur des contrats concernant une infertilité constatée à plus de 60 % : lorsqu’il faut prouver l’origine de celle-ci (congénitale par exemple), c’est parfois compliqué, sachant que c’est à l’assuré de prouver que les conditions de la garantie sont réunies”, intervient Blanche de Granvilliers. À savoir qu’il existe également des garanties contre la perte de revenus inhérente à l’incapacité de saillir du cheval.
Du côté des poulinières, les spécificités en termes d’assurance vont concerner sa capacité à “remplir” et à mener la gestation à terme jusqu’à la naissance du poulain. “On peut établir deux contrats : assurer d’un côté la jument elle-même, avec une valeur qui est établie sans y intégrer la valorisation du foetus, et, de l’autre, le produit à naître. On peut aussi garantir le fait que la jument ne remplisse pas et faire durer la période de garantie de ce contrat jusqu’à la naissance du poulain et même au-delà”, détaille Géraldine Richshoffer. Des propos complétés par Patrick Herdhebaut : “Le poulinage n’étant pas un événement aléatoire, la jument pleine va pouliner ! Le propriétaire de la jument doit souscrire au moins le temps de la gestation et du poulinage un contrat spécifique.” Il est ainsi possible de démarrer un contrat une fois la jument pleine. Selon la période de la gestation à laquelle on choisit de souscrire, cela coûtera plus ou moins cher… “jusqu’au moment où l’on n’assurera plus du tout”, nuance Géraldine Richshoffer, “par exemple, un mois avant le terme, car c’est la période la plus risquée”. Autre cas de figure : souscrire en amont un contrat stipulant que si la jument ne remplit pas, toute saillie réglée auparavant sera remboursée. Pour ce faire, il faudra au préalable avoir demandé à un vétérinaire la confirmation que la jument est physiquement apte à être pleine et à pouliner. “Un jour, la jument d’un client a été transpercée lors d’une fouille gynécologique. Cela peut arriver, c’est une action risquée et le vétérinaire fait signer une décharge au propriétaire avant de procéder à l’acte. Elle a guéri, mais ne remplit plus depuis. L’assurance a pris en charge les frais chirurgicaux, mais dans la mesure où une décharge a été signée, il n’y a là aucun recours concernant l’impossibilité de pouliner induite”, illustre Géraldine Richshoffer.
La fameuse responsabilité civile…
Au-delà des spécificités dues à l’exercice de l’élevage, il est fortement conseiller de souscrire à une responsabilité civile (RC). Attention, la RC proposée par la Fédération française d’équitation (FFE), lorsque l’équitant prend sa licence annuelle, ne couvre que les actions en situation d’équitation, autrement dit à cheval. Toutefois, il existe de bien nombreuses situations dans lesquelles le cheval peut causer un accident à un tiers, ce tiers pouvant être un autre cheval, un humain, un véhicule, un bâtiment… Or, si la RC n’est pas obligatoire, en cas de sinistre, le propriétaire du cheval ayant causé les dégâts est bel et bien obligé de dédommager la victime. “C’est la responsabilité civile du gardien du cheval au moment de l’accident qui est engagée”, précise de son côté Blanche de Granvilliers. La nuance ? “On parle ici de RC de la structure qui héberge le cheval en pension. Lorsqu’un propriétaire met son cheval en pension quelque part, il faut donc bien vérifier que le gérant est couvert en conséquence. Si l’on revient sur le thème spécifique de l’élevage, cela va, par exemple, concerner un étalon qui s’échappe et que s’ensuit une saillie fortuite. Dans un tel exemple, la RC devra alors – si la “victime” le souhaite – couvrir les frais d’avortement de la jument sachant que le plus souvent, la gestation passe inaperçue et que la difficulté survient au moment où la jument pouline, avec, par conséquent, des préjudices et des frais bien plus importants.”
… sans oublier les frais vétérinaires
De même, foal, jeune cheval, reproducteur et poulinière peuvent être sujets à des problématiques et des risques concernant leur santé. Il est ainsi également conseillé de souscrire à des garanties couvrant les frais vétérinaires : chirurgies, maladies, etc. À titre d’exemple, les coliques, maux spécifiques aux équidés, peuvent parfois être fulgurantes et engendrer des frais chirurgicaux et de clinique très onéreux dans les cas les plus graves. Enfin, concernant le décès d’un équidé et suivant les garanties contractées, le souscripteur du contrat peut se voir rembourser les frais d’équarissage, et le propriétaire du cheval une somme correspondant à la valeur initialement annoncée de l’individu. Attention ici à la nuance entre la valeur agréée et la valeur déclarée. Mieux vaut donc vous couvrir ! Certaines compagnies facilitent la vie de leurs clients en pratiquant le tiers payant.
Pour conclure, du bon sens !
On l’aura compris : il est plus que vivement conseillé à tout propriétaire de cheval de souscrire non seulement à une assurance spécifique au statut d’élevage de l’animal (poulains, foetus, étalon, poulinière), mais également à une RC et à un contrat général d’assurance, quels que soient son âge, son sexe et son activité souhaitée (sportive, d’élevage ou de loisir). Mais pas n’importe lesquels ! Il est essentiel de bien identifier ses besoins, de comparer les offres… et de lire entre les lignes ! Blanche de Granvilliers insiste vraiment sur ce point : “Le constat est sans appel : les contentieux découlent toujours du fait qu’une condition de départ n’a pas été respectée. Dès qu’une condition du contrat, même sans rapport avec le sinistre, n’est pas respectée, les assurances ne couvrent plus ce dernier. Par exemple, les conditions prévoient régulièrement des clauses sur les vaccins, l’âge du cheval, sur le fait qu’une jument a, ou non, déjà avorté ou si elle est primipare, etc. D’une façon générale, si l’on ne remplit pas les conditions au moment de la souscription, c’est comme si l’on payait des cotisations dans le vide. C’est pourquoi il est impératif de se faire accompagner par un courtier, dont l’objectif est de conseiller jusqu’à la signature d’un contrat carré, en bonne et due forme, et le plus sur mesure possible par rapport à ses attentes et ses besoins. De la même manière, il est nécessaire de se faire aider pour la déclaration d’un sinistre : chaque mot a un sens et doit être pesé pour ne pas être mal interprété. À titre d’exemple, prenons simplement le cas d’un téléphone portable qui est assuré contre la casse, mais si l’on déclare une simple fissure, l’assurance ne la couvrira pas… ” En bref, un contrat d’assurance, oui, mais à condition de prendre le temps de le faire, main dans la main avec des professionnels qui savent parfaitement de quoi ils parlent et qui sauront traduire les clauses parfois obscures des contrats.