Si l’univers équestre fait figure de refuge, la réalité nous rappelle que nul n’est à l’abri des bouleversements du monde

Les mots de Stéphane Hessel, grande figure de la Résistance et artisan de la paix, résonnent aujourd’hui avec une acuité troublante.



“Le message d’un Mandela, d’un Martin Luter King, trouve toute sa pertinence dans un monde qui a dépassé la confrontation des idéologies et le totalitarisme conquérant. C’est un message d’espoir dans la capacité des sociétés modernes à dépasser les conflits par une compréhension mutuelle et une patience vigilante. Pour y parvenir, il faut se fonder sur les droits, dont la violation, quel qu’en soit l’auteur, doit provoquer notre indignation. Il n’y a pas à transiger sur ces droits. 

Je vous souhaite à tous, à chacun d’entre vous, d’avoir votre motif d’indignation. C’est précieux. Quand quelque chose vous indigne comme j’ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint ce courant de l’histoire et le grand courant de l’histoire doit se poursuivre grâce à chacun. Et ce courant va vers plus de justice, plus de liberté mais pas cette liberté incontrôlée du renard dans le poulailler. 

Comment conclure cet appel à s’indigner? En rappelant encore que, à l’occasion du soixantième anniversaire du Programme du Conseil national de la Résistance, nous disions le 8 mars 2004, nous vétérans des mouvements de Résistance et des forces combattantes de la France libre (1940-1945), que certes, le nazisme est vaincu, grâce au sacrifice de nos frères et soeurs de la Résistance et des Nations unies contre la barbarie fasciste. Mais cette menace n’a pas totalement disparu et notre colère contre l’injustice est toujours intacte. Non, cette menace n’a pas totalement disparu. Aussi, appelons-nous toujours à une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l’amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous.” 

Entre les conflits armés qui endeuillent l’est de la République démocratique du Congo, les bombardements incessants de l’État d’Israël réduisant les territoires palestiniens en ruines, les assauts répétés contre la démocratie en Turquie, et bien sûr, la guerre en Ukraine, dont l’issue semble chaque jour plus sombre pour cet État souverain, l’état du monde n’avait pas semblé aussi terrifiant depuis des décennies. Nous sommes à un point de bascule, un moment où l’histoire hésite entre progrès et chaos. 

Face à cette réalité brutale, provoquée par de puissants dirigeants semblant s’inspirer des heures les plus sombres de notre passé, jusqu’à ressusciter des pratiques que l’on espérait révolues, peut-être devrions-nous raviver les lumières qui ont guidé nos prédécesseurs. Dans ce contexte, les mots de Stéphane Hessel, grande figure de la Résistance et artisan de la paix, résonnent aujourd’hui avec une acuité troublante. Il nous appelait à l’indignation, non comme un cri vain, mais comme un engagement à refuser l’inacceptable. 

Et si l’univers équestre fait figure de refuge, détaché des tumultes du monde, la réalité nous rappelle que nul n’est à l’abri des bouleversements en cours ou à venir. S’indigner et agir, même à notre échelle, même dans notre sphère, c’est refuser l’indifférence et choisir la paix.