“Mon lien avec Lightning Star est un véritable moteur pour ma carrière”, Mathilde Juglaret
À vingt et un ans, Mathilde Juglaret s’impose comme l’une des figures montantes du dressage français. Le 6 avril dernier, la jeune cavalière a remporté l’épreuve d’ouverture et la Libre du CDIO Jeunes cavaliers d’Aix-la-Chapelle avec Lightning Star, une jument qu’elle monte depuis l’été 2024 et avec laquelle elle s’était déjà imposée à deux reprises lors du CDIY d’Ornago. La fille d’Anne-Sophie Serre, qui s’entraîne avec l’époux de celle-ci, Arnaud, revient sur ses premiers succès de l’année, et en dit plus sur le processus de création de sa Reprise Libre en Musique ainsi que ses objectifs à venir.
Début avril, vous avez remporté deux épreuves au CDIO Jeunes Cavaliers d’Aix-la-Chapelle avec Lightning Star. Comment avez-vous géré la pression inhérente au fait de concourir dans ce mythique stade?
J’étais particulièrement motivée pour ce concours. Je ne m’étais plus rendue à Aix-la-Chapelle depuis longtemps, ma dernière visite remontant aux championnats d’Europe de 2015, auquel Arnaud (Serre, l’époux de la mère de Mathilde, Anne-Sophie, ndlr) avait participé. À Aix, l’ambiance est toujours incroyable, et l’expérience acquise lors des concours précédents, comme le CDIY d’Ornago (où la cavalière s’était déjà imposée à deux reprises avec sa jument, ndlr) m’a permis de rester concentrée sur l’essentiel. Je savais que ma jument était prête, et notre confiance mutuelle facilite beaucoup les choses. Le terrain, bien que mythique, n’a pas changé grand-chose à ma manière d’aborder la compétition: il s’agissait simplement de performer. Par contre, en phase de préparation, je reste bien sûr attentive à mes concurrents et aux enjeux du concours.
La relation que vous entretenez avec votre jument joue un rôle central dans vos réussites. Comment nourrit-elle vos performances?
Lightning Star, que je surnomme Lilly, est vraiment une partenaire exceptionnelle. Elle appartient à Françoise Niclaus, fidèle soutien de notre famille. Elle est toujours à 100% avec moi, prête à donner le meilleur d’elle-même. Monter cette jument chaque jour est un véritable plaisir. Parfois, elle peut se montrer un peu espiègle, voire capricieuse, mais cela fait tout son charme. Elle est incroyablement curieuse, attentive, et cherche toujours à comprendre ce que je lui demande. À la maison, elle est facile à vivre, mais tout comme moi, elle a des exigences alimentaires et ne tolère que des repas sains et équilibrés. En fait, je pense que nous nous ressemblons beaucoup. Notre complicité est unique. En concours, je tiens à m’occuper d’elle de A à Z pour respecter cette proximité. Globalement, je passe le plus de temps possible avec elle, et notre lien est un véritable moteur pour ma carrière.
“J’ai la chance de disposer d’une musique qui nous correspond parfaitement”
Comment avez-vous conçu la Reprise Libre en Musique qui vous a permis de vous imposer à Aix-la-Chapelle?
Je travaille en étroite collaboration avec mes parents (Anne-Sophie et Arnaud Serre, ndlr), qui ont beaucoup d’expérience jusqu’au plus haut niveau. Pour nous, une Libre doit respecter le cheval, mais aussi lui permettre de prendre du plaisir. Nous mettons un point d’honneur à imaginer une chorégraphie fluide, sans temps mort, et à garantir une symétrie parfaite, tout en intégrant des tracés techniques peu communs dans les jeunes catégories. De plus, pour ma Libre avec Lilly, j’ai la chance de disposer d’une musique qui nous correspond parfaitement, sur le thème d’Alice au pays des merveilles. Elle été composée par Jean-Baptiste Marcant (qui crée notamment les bandes-son de publicités, documentaires, séries ou court-métrages, ndlr). Nous lui avions déjà confié la réalisation de mon accompagnement musical lorsque je montais Caporal de Massa, et cela m’avait permis de décrocher le bronze aux championnats d’Europe Juniors de Hartpury, en 2022. Dans les catégories Jeunes, il est rare de bénéficier d’une musique aussi personnalisée. D’ailleurs, après ma médaille, Carl Hester himself m’avait félicité pour cette initiative! En outre, je prends beaucoup de plaisir à présenter une reprise parfaitement adaptée à ma monture et moi. En concours, je n’entends alors plus que ma musique, dont l’importance est capitale pour obtenir du succès dans cet exercice.
Avant le CDIOY d’Aix-la-Chapelle, vous n’aviez jamais présenté cette reprise. Comment vous êtes-vous préparée à cette première?
Je connais ma musique par cœur, mais je ne déroule presque jamais ma reprise libre en intégralité à la maison. Avec Arnaud, qui m’entraîne, nous nous concentrons plutôt sur des exercices spécifiques, le travail des bases et des enchaînements. Ensuite, l’important est de m’approprier mon tracé sur le terrain. À Aix, j’étais plutôt contente de noter performance pour une première. Nous prévoyons simplement d’ajuster quelques détails pour la suite de la saison.
“Le niveau des jeunes cavaliers est en constante progression”
Quels sont vos objectifs pour la suite de la saison?
Je vais disputer le CDIY de Compiègne (qui a lieu cette semaine, ndlr), où je vise trois bonnes performances. Ensuite, je participerai à la Coupe des Nations de Hagen, mi-juin, qui constituera un concours clé avant les championnats d’Europe. Traditionnellement, les résultats de ce concours allemand préfigurent assez bien ceux des Européens. J’ai donc pour but de bien figurer à Hagen, et si tout s’y déroule comme prévu, je serai confiante pour les championnats d’Europe de Kronberg (prévus du 8 au 13 juillet, ndlr). Pour autant, étant très superstitieuse, je préfère ne pas me fixer d’objectif chiffré pour cette échéance.
Quel est votre regard sur l’évolution du dressage chez les jeunes cavaliers à l’international?
Je la trouve rapide. Le niveau des jeunes cavaliers est en constante progression grâce à un meilleur accès à des chevaux de qualité, et à des entraîneurs de plus en plus performants. Pour l’heure, les pays dominants continuent à faire la course en tête, et leur cavaliers sont souvent difficiles à rattraper. Désormais, il faut obtenir autour de 71% pour se qualifier pour une finale européenne, alors qu’auparavant, ce score suffisait à se classer parmi les meilleurs de la compétition. En parallèle, on continue tout de même à voir des cavaliers réussir en dressant eux-mêmes leur chevaux depuis le départ. C’est un bel exemple d’humilité et de travail, même si leurs chances de médailles sont moindres.
En quoi pensez-vous que des victoires comme celles décrochées à Aix-la-Chapelle vous aident dans votre progression vers le plus haut niveau?
J’ai toujours admiré une cavalière comme Cathrine Dufour, qui a su décrocher des médailles dans toutes les catégories d’âge, et je m’efforce de suivre un parcours similaire. Bien que je change de monture à chaque étape, toutes m’apportent énormément, tant sur le plan technique que mental. Les grandes victoires contribuent à façonner un cavalier, à renforcer sa confiance, mais aussi à développer sa “cote” dans le monde du dressage. C’est important pour moi, mais aussi pour le regard des autres sur mon parcours. Parallèlement, je m’entraîne aussi au Grand Prix, que je présente dans des concours locaux, pour intégrer les mouvements techniques propres à ce niveau.
