''Il faut se réinventer, être créatif et prendre des risques'', Jessica Gordon

À partir de demain, le Parc des expositions de Paris Nord-Villepinte accueille le Salon du cheval de Paris, qui se tiendra jusqu'au 2 décembre 2018. Jessica Gordon, directrice de l'événement, explique ce que nous réserve cette quarante-septième édition, haute en couleurs et en sabots.



GrandPrix-Replay : Jessica Gordon, vous êtes la directrice du Salon du cheval depuis 2016. Pour renforcer l'importance du sport dans ce bel événement, vous avez souhaité représenter l’ensemble des disciplines équestres pratiquées, du saut d’obstacle, au dressage, en passant par le concours complet, la voltige, le hunter, les pony-games, l’equifeel ou encore le western. Cette année, deux nouvelles disciplines font leur entrée, l’equifun et le tir à l’arc. Autant de disciplines pour un seul événement?
Jessica Gordon :
Je suis une boulimique du cheval, j’ai l’insatiable envie d’explorer toutes les possibilités équestres! Il est vrai que cela fait beaucoup de disciplines, mais il ne faut pas oublier qu’il y a neuf jours d'événement. Nous sommes d’ailleurs l’événement équestre qui dure le plus longtemps en France. En tant que "Salon du cheval", notre rôle est justement d’être le représentant de toutes les disciplines diverses et variées qui s’effectuent avec un équidé. C’est compliqué pour les équipes et pour la logistique mais, selon moi, il faut se réinventer, être créatif et prendre des risques.
 
GPR : Le Salon du cheval de Paris accueille également l’étape des Longines Masters, qui réunit l’élite mondiale du saut d’obstacles lors d’un CSI 5*. Les billets d’entrée du Salon et du Longines Masters concordent dans une certaine mesure et il est possible pour les visiteurs de se mêler aux deux univers, séparés en deux halls. Pensez-vous que ce mélange est nécessaire et bénéfique aux deux parties?
J.G. :
Le mélange est nécessaire, évidemment. Le Salon et le Longines Masters sont très complémentaires l’un de l’autre. Un CSI 5* a besoin de se raccrocher à un événement comme ça. Le Salon du cheval représente beaucoup de visiteurs, qui sont pour la plupart des pratiquants et qui viennent rêver ici devant les parcours des grands cavaliers. De plus, le Longines Masters est extrêmement bien monté et très qualitatif. Pour moi, c’est un peu la cerise sur le gâteau! Le Salon du cheval s'achève par des épreuves de haut niveau, reconnues dans le monde entier. Nous avons besoin de l’un et de l’autre, et nous offrons ainsi au public un large éventail de niveau sportif.
 
GPR : Le Salon du cheval est bien sûr indissociable des spectacles et des animations. La Nuit du cheval regroupe d’ailleurs sport et performances artistiques en proposant le Devoucoux Derby Cross Indoor ainsi qu’un spectacle mêlant art équestre et danse. La Nuit rencontre-t-elle toujours le même succès année après année ?
J.G. :
En 2015, je pense que nous étions arrivés au bout d’une Nuit du cheval 100% pur spectacle équestre. Le public – composé de nombreux pratiquants – veut voir du sport, ce qui s’inscrivait parfaitement dans notre virage sportif global pour le Salon. J’ai fort heureusement croisé le chemin de Laurent Duray (président des entreprises CWD et Devoucoux, qui sponsorisent également le cross indoor du Jumping de Bordeaux, ndlr) qui m’a fait confiance et qui m’a permis de mettre une épreuve sportive à la une de la Nuit. J’ai bien sûr été inspirée par le Cross Indoor de Bordeaux, qui est magnifique. Je suis très enthousiasmée par cette discipline, qui est difficile à suivre quand on est à pied sur des terrains de complet. Le cross indoor est un format resserré sur 1 km, ce qui permet au public de pouvoir suivre tout le parcours. Les gens sont exaltés, les chevaux et les cavaliers aiment ça. La Nuit du cheval a explosé depuis que nous avons mis en place cette épreuve. Nous sommes d’ailleurs à guichet fermé depuis la première édition, en 2016!
 
GP : Le Salon dédie de même un espace au bien-être et à la santé animale. Les meilleurs spécialistes de la santé équine se donnent rendez-vous pour les Equirencontres afin de débattre sur des sujets qui touchent tous les acteurs de la filière. En outre, les équitants pourront découvrir les Trophées de l’innovation, qui mettent chaque année en lumière de nouveaux projets encore inconnus du grand public. Peut-on dire que le Salon met l’accent sur la pédagogie?
J.G. :
Cette année, nous avons ouvert en effet une zone bien-être qui va cibler tout le côté pratique de l’équitation. Nous allons amener le public à participer à des ateliers pratiques, comme par exemple "comment vérifier l’état de santé de mon cheval, comment lui mettre des bandes de repos, comment je choisis ma selle, comment je selle, comment je fais des pions", etc. Il y a beaucoup de cavaliers de club qui débutent et qui aimeraient en savoir plus. Nous nous adressons à tous les niveaux, il faut que chacun puisse poser ses questions à tous les intervenants présents sur place. Je pense que le Salon est le terrain idéal pour que la communauté équestre puisse s’y mélanger et échanger. Les Equirencontres vont débattre de sujets importants, et les vétérinaires de l'AVEF (Association vétérinaire équine française, ndlr) seront également présents pour expliquer les avancées de la médecine. Le Salon du cheval est mis en place pour que les équitants – et non équitants – puissent venir toucher, comprendre, et découvrir le plus de choses possible.


GPR : Enfin, le Salon se consacre à l’élevage, en regroupant diverses associations de races et d’éleveurs français. Le public pourra découvrir de nouvelles races et pourquoi pas trouver sa monture de rêve. Que souhaitez-vous répondre à ceux qui déplorent que les éleveurs, base de la filière équine, ne sont généralement pas assez représentés lors du Salon ?
J.G. : 
Je suis tout à fait d’accord avec eux! C’est l’un de mes grands désespoirs. Nous souhaitons mettre en lumière toutes les belles races de chevaux françaises. C’est malheureusement assez difficile à concrétiser, nous sommes encore en cours de discussion pour pouvoir agrandir notre pole élevage. Venir à Villepinte est compliqué pour les éleveurs, c’est généralement loin pour eux et c’est long – ça représente tout de même neuf jours de mobilisation. J’espère avoir un peu plus d’associations d’élevage pour l’année 2019 et présenter au public davantage de chevaux, de poneys, de poulains… Représenter mieux la filière élevage correspond à mon gros chantier pour l’année prochaine.
 
GP : En débutant par le championnat du monde du cheval arabe, l’un des incontournables du Salon qui célèbre ici sa trente-huitième édition, et en se concluant sur les Longines Masters de Paris, le Salon du cheval a pour ambition de couvrir tout l’univers équin en neuf jours de festivités. Avec près de 140 000 visiteurs attendus, 270 exposants et 2 500 chevaux, les halls de Villepinte vont vibrer aux sons des hennissements et des clameurs du public. Le Salon pourrait-il s’enrichir davantage pour l’année 2019?
JG :
Je ne rêve que de cela! Je ne suis d’ailleurs pas facile à vivre pour mes équipes, car je ne m’arrête jamais et je suis très à l’affut de tout, je ne recule devant aucun projet. En 2019, j’espère pouvoir proposer une nouvelle discipline, une nouvelle approche, une nouvelle façon de s’amuser avec son cheval et de progresser, que ce soit en loisir ou en compétition. Logistiquement, c’est lourd, mais mes équipes sont formidables car elles ne disent jamais non. Chaque année, j’essaie de repartir sur une copie blanche et de me réinventer. Il faut que le visiteur vienne pour quelque chose. Nous souhaitons lui dire "ce que vous allez voir là, vous ne le verrez pas ailleurs". Tout m’intéresse et je souhaite proposer le plus large éventail équestre possible… Ce n’est pas fini!