Sur quels éléments faut-il s'appuyer dans l'affaire Solitude au Vent ?

Mercredi, nous apprenions que Solitude au Vent, la jument montée par Nina Mallevaey avait été dérobée dans son box. Jimmy Vandeven, commanditaire de ce vol, se dit être propriétaire de moitié de l’alezane de onze ans. Une version contredite par Damien Pichon, qui affirme que la fille de Quaprice Bois Margot Quincy appartient en totalité à son fils, Louis. Sur quels éléments faut-il s'appuyer dans un tel litige ? Éric Giraud, président de la Chambre syndicale du commerce des chevaux de France, a donné à Grand Prix les éléments de réponse.



GrandPrix-replay.com : Lors d’un litige, quelles sont les preuves qui permettent de certifier de la propriété d’un équidé ? 
Éric Giraud : Juridiquement, la première preuve irréfutable est un document de vente facture établi en faveur de la personne propriétaire. La facture, le mode de paiement, la preuve du paiement sont des éléments incontournables et indiscutables, de la même façon que lorsque l’on fournit une facture aux services fiscaux pour une récupération de TVA. La facture peut être accompagnée d’un contrat de vente, mais elle constitue en elle-même une preuve suffisante. Il y a ensuite tout un tas d’éléments qui peuvent conforter ou pas cette preuve initiale. La carte d’immatriculation, si elle est endossée régulièrement, reste un élément qui peut démontrer la propriété. Mais il ne s’agit pas d’un élément irréfutable, c’est en réalité une présomption de propriété. Ce qui peut également faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre dans le cadre d’un litige, c’est la répartition des frais inhérents à l’entretien du cheval. Dans les écuries où se situe le cheval, qui se charge de payer ses soins, ses sorties, la maréchalerie, les frais de pension ou encore les frais vétérinaires ?
 
GPR. : Au même titre que la détention de la carte d’immatriculation, les frais engendrés par l’entretien d’un équidé peuvent donc peser dans la balance au moment de trancher pour le litige… 
E.R. : Complètement ! Sauf contrat spécifique, il incombe au propriétaire de régler les frais quotidiens. Cela a une certaine valeur lorsqu’un parti règle par exemples tous les mois une pension. De la même manière, si le cheval est assuré, il est intéressant de connaître le nom de la personne qui a souscrit à l’assurance. Toutes les autres attestations peuvent étayer le restant des preuves, mais cela reste tout de même tendancieux car discutable en termes d’irréfutabilité.
 
GPR. : Le ou les nom(s) inscrit(s) sur les registres fédéraux ont-ils une quelconque valeur dans la détermination d’une propriété ou non ? 
E.R. : Non puisqu’il n’est pas rare que les noms des propriétaires soient modifiés. C’est une pratique est extrêmement répandue. Les gens arrivent à détourner le système et à obtenir des numéros de cartes de cavaliers ce qui leur permet d’engager les chevaux alors qu’ils n’en sont pas du tout propriétaires. C’est simplement élément qui peut être considéré dans la présomption, dans le cas où la carte est régulièrement endossée. Mais cela ne constitue pas un élément indiscutable.
Il faut par ailleurs être très vigilant lorsque la carte d’immatriculation est remplie, j’ai eu un litige à régler à ce sujet récemment. En cas de copropriété, chaque parti doit être dûment mandaté afin que la personne à qui il a donné pouvoir puisse signer dans les règles. Pour le moment, le problème est que le Système d’information relatif aux équidés (SIRE) permet de faire les choses de façon un peu différente. Il part du principe qu’une simple déclaration sans production de document est suffisante. Nous avons un vrai litige là-dessus parce que c’est un principe de fonctionnement qui amène à des problèmes. Si le règlement était appliqué de façon claire, nous n’aurions pas à faire face à ce type de soucis. Que les gens achètent des chevaux seuls ou à plusieurs, il faut toujours qu’ils disposent des documents de vente établis de façon précise. Si le cheval est acheté à un privé, c’est ce dernier qui doit faire une attestation de vente.