DANS LE RÉTRO : Alexandra Ledermann raconte sa consécration européenne de 1999
C’était il y a vingt et un ans. En 1999, à Hickstead, en Grande-Bretagne, Alexandra Ledermann avait remporté les championnats d’Europe avec le fabuleux Rochet Rouge M. Une décennie plus tard, la cavalière s’était remémorée de l’une de ses plus belles médailles…
Elle fut la première femme sacrée championne d’Europe en saut d’obstacles. Elle fête cette année les vingt et un ans de sa victoire à Hickstead. Pourtant, les statistiques et les anniversaires, elle s’en moque. Alexandra Ledermann préfère se souvenir du parfum de son triomphe. “C’est la plus belle victoire de ma vie, la plus importante”, avoue la championne française. Hickstead 1999, c’est une multitude de souvenirs pour la cavalière toujours installée à Huet, non loin d’Évreux, dans l’Eure. D’abord, le lieu. “Hickstead, c’est très anglais, très typique… Je pense que c’est l’un des plus beaux spring gardens au monde avec Aix-la-Chapelle”, reconnaît-elle. “Hickstead est une institution. Un temple du saut d’obstacles.”
Lors de ces championnats, Michel Robert, Thierry Pomel et Jacques Bonnet étaient aussi de la partie. Et pour l’équipe de France, l’aventure européenne ne commence pas au mieux. “Nous avons terminé quatrièmes. Or, sur le papier, nous étions favoris. J’ai été hyper déçue par ce résultat collectif”, souligne la cavalière normande. Mais Alexandra Ledermann parvient à se re-concentrer pour la suite. “Grâce à mon double sans-faute dans l’épreuve par équipes, j’étais cinquième au provisoire”, rappelle-t-elle. Tout restait donc possible pour Alexandra Ledermann et son Rochet Rouge M. Sans faute en première manche de la finale, elle remonte à la première place au provisoire avant l’ultime tour, avec une barre d’avance. Mais elle utilise son joker dès le début de tour en fautant sur l’obstacle numéro trois. “En deuxième manche, Rochet M était chaud comme la braise. Je me suis même inquiétée pour son état. Je me suis demandé comment j’allais faire pour le calmer et aborder le triple. Finalement, c’est passé. Restaient deux obstacles, dont un près de la porte. Quelques années plus tôt, Rochet M s’était montré rétif à cet endroit. Et là, j’ai senti qu’il recommençait à quatre ou cinq foulées de l’oxer. Il n’avait pas droit de le faire! Pas là! Alors je le lui ai fait fermement comprendre!”, raconte Alexandra Ledermann. Et c’est passé ! Le couple a ainsi été sacré champion d’Europe.
Gagner aux championnats d’Europe était donc une belle revanche !
“Quand j’ai franchi le poteau, c’était un moment de transe. C’était génial. Contrairement aux Jeux olympiques d’Atlanta (où le couple avait été médaillé de bronze, ndlr), je n’ai pas eu à attendre la fin de l’épreuve pour être sacrée”, se souvient la championne d’Europe. “Ma victoire était symbolique dans le sens où un Français qui gagne en Angleterre, cela ne laisse jamais indifférent…”, plaisante-t-elle. Surtout, la victoire de Rochet et Alexandra Ledermann n’était pas le fruit du hasard, mais le résultat d’une longue préparation. “Gagner aux championnats d’Europe était très prémédité. Rochet était enfin arrivé à maturité, à seize ans. C’était un cheval très compliqué. Mais là, il a été très fin, très subtil, très aux boutons. À Hickstead, j’ai senti qu’il était invincible. La veille du championnat, j’ai même dit à mon sponsor que j’allais gagner”, se rappelle la cavalière.
La conférence de presse qui a suivi la compétition compte toujours parmi les souvenirs de la cavalière française. “C’était assez amusant de se trouver là, avec la Suissesse Lesley Mc Naught (troisième, ndlr). Quelques mois auparavant, il y a avait eu un concours à Hickstead, une répétition générale de ces championnats d’Europe, mais les femmes étaient toujours exclues du Grand Prix du dimanche (la King George V Cup, ndlr). Une autre épreuve, moins haute et moins bien dotée, leur était réservée (la Queen Elizabeth II Cup, ndlr). Je l’avais boycottée, et Lesley aussi. En ce sens, gagner les championnats d’Europe était une belle revanche !”, souligne Alexandra Ledermann.
Dans sa boîte à souvenirs, la cavalière normande pioche aussi une autre anecdote. Peu avant le début du championnat, elle s’était retrouvée sans groom, et avait dû recruter in extremis Alexandre Arthaud, l’ancien groom de Quito de Baussy, le crackissime d’Éric Navet. “Il s’est très vite attaché au cheval. Il a vécu ces championnats avec une vraie intensité, comme si nous nous connaissions depuis longtemps”, raconte-t-elle. “Gagner un championnat d’Europe, c’est l’euphorie. Rien que pour cela, rien que pour revivre ces moments-là, j’aimerais retrouver un cheval de championnats, et affronter à nouveau ces parcours très techniques.” A bon entendeur.
Cet article d'archive est paru dans le n°52 de GRANDPRIX International.