Concilier le logement et le bien-être de son cheval
Manger des fibres, bouger librement, avoir des contacts positifs avec des congénères: le bien-être du cheval semble facile à atteindre, en théorie. Qu’en est-il dans la pratique? Après avoir compilé les réponses et remarques de près de cinq cent quatre-vingts lecteurs grâce à un sondage en ligne, GRANDPRIX dresse un tour d’horizon des possibilités d’hébergement et du bien-être de notre compagnon.
Avec l’éthologie et ses études sur le comportement des chevaux, le bien-être ne repose plus autant sur des données subjectives. Le label environnemental et bien-être animal de la filière équine (EquuRES) s’est lié par exemple depuis peu à la Charte nationale pour le bien-être équin de la fédération nationale du cheval (FNC). Étymologiquement, on différencie la bientraitance – combler les besoins propres à l’espèce – du bien-être, qui représente ce que l’animal perçoit en tant qu’individu, dans la même situation de vie, selon son tempérament ou ses expériences passées. Autrement dit, il faut apprendre à nuancer le curseur entre la physiologie et le ressenti du cheval.
Box, paddock, et prairie, la triade du logement équin
Selon notre panel de lecteurs sondés, le box reste le logement le plus utilisé en France à l’heure actuelle, avec 16 % de chevaux qui vivent 100 % au box et 39 % qui alternent quotidiennement ou par saison entre box et paddock / prairie. 23 % des chevaux des sondés vivent au pré à temps plein et seulement 4 % vivent dans une écurie active ou apparentée (cette dernière est développée ultérieurement dans l’article). Parmi les chevaux vivant 100 % au box, 9 % n’ont jamais accès à un paddock, 32 % y ont accès partiellement – de moins d’une heure à quatre heures – et enfin 59 % n’y ont pas un accès quotidien mais plutôt hebdomadaire.
Si la pleine vie au pré, en troupeau, est idéale et peut couvrir 100 % des besoins du cheval en termes d’alimentation, de libre motricité et de relations sociales, la condition de l’équidé comme animal domestique nuance souvent cette réalité. Le choix de son logement peut être réfléchi ou par défaut, comme le soulignent respectivement Amélie et Emma, parmi les internautes ayant répondu au sondage : “Il est difficile de trouver dans sa région de bonnes pensions pâtures, c’est-à-dire avec nourriture matin et soir, surveillance, et des terrains corrects. Par défaut, j’ai choisi une pension box / paddock, avec bien sûr des sorties au paddock.” “Impossible pour moi également de trouver une pension 100 % avec des installations à disposition dans le secteur où je me trouve ; mon cheval est donc au pré lorsque cela est possible, sinon c’est box / paddock.” L’hiver, les pâturages sont souvent mis à mal, entre bourbier et herbe piétinée, et sont d’ailleurs souvent condamnés par les pensions, qui se rabattent alors sur les paddocks. Néanmoins, au grand regret de multiples sondés, ces derniers sont eux-mêmes la plupart du temps bien inférieurs en nombre aux chevaux présents sur la structure, impraticables et dangereux par leur sol boueux et glissant, ou encore tout simplement soumis au temps restreint du personnel chargé des manipulations. Ainsi, à la mauvaise saison, si certains chevaux passent huit heures par jour dans des paddocks, d’autres y séjournent de quatre heures à une dizaine de minutes, quand certains n’y ont pas accès tous les jours. À l’image de Pascaline, Virginie ou encore Jean-Baptiste, de nombreux propriétaires gèrent les sorties quotidiennes ou hebdomadaires de leur cheval par désir, budget ou manque de personnel d’écurie. Si ces interactions sont bénéfiques pour vérifier l’état de l’animal et renforcer sa manipulation, cela reste néanmoins des charges mentale et physique importantes pour le propriétaire.
La majorité des sondés appréhende néanmoins l’alternance entre pré / paddock et box comme un bon compromis. “Pendant les grosses chaleurs, mes chevaux restent au box en journée et sortent à l’extérieur durant la nuit, et inversement en hiver. Cela évite qu’ils soient continuellement dans un même pré et que l’herbe et les sols s’épuisent trop vite”, commente Julie. Pour Amanda, “ma jument perd vite de l’état en hiver malgré un abri et du foin à volonté, le box et le paddock durant la mauvaise saison lui assurent de garder un bel état.” Alicia, Camille et Mallaury préfèrent rentrer au box leur cheval pour la nuit par crainte de fuite due à l’irrespect des clôtures, de blessure et d’un manque de surveillance nocturne. Enfin, pour les compétiteurs Stéphane, Anna et Albane, le pré ou le paddock en journée permettent d’avoir des chevaux sains physiquement et psychiquement tout en gardant une proximité nocturne pour les soins particuliers, les compléments alimentaires ou les départs matinaux en compétition.
Si plusieurs propriétaires avancent que leur cheval aime rentrer au box pour s’y reposer et s’y sentir en sécurité la nuit, Claire Neveux, ingénieure de recherche en bien-être équin et dirigeante de l’agence scientifique Ethonova, nuance cette idée : “Qu’il soit sauvage ou domestique, le cheval a un budget temps relativement défini. L’alimentation est son activité principale, entre 60 à 80 % par jour, puis il consacre 20 à 30 % de son temps à se reposer, 4 à 8 % à surveiller l’environnement et 4 à 8 % à se déplacer. Son temps de repos n’est jamais effectué d’une seule traite mais par tranches de demi-heure, et plutôt en journée. Si les chevaux dorment – y compris allongés – plus longtemps au box, c’est davantage lié aux restrictions de mouvement et alimentaires qu’ils y subissent. Par ailleurs, un cheval peut très bien se reposer dans son pré à partir du moment où il a un abri adéquat et qu’il se sent à l’aise dans la hiérarchie de son groupe. Enfin, le cheval est grégaire ; il peut certes supporter plus ou moins d’être séparé des autres mais reste social.” Si le cheval exprime ainsi de la joie à rentrer dans son box, c’est parce qu’il y trouve les éléments qui lui faisaient sans doute défaut au pré ou au paddock, à savoir un endroit sec pour se rouler ou se prémunir des insectes, du foin ou du concentré – particulièrement appétant et donc motivant – ou encore la compagnie de chevaux qu’il préfère.
Si une pleine vie au pré est encore très souvent réservée aux chevaux dits de loisir en France, la balance commence doucement à osciller. “Mon cheval de sport est logé en groupe à 100 % dans une prairie”, détaille Milène.“Depuis qu’il n’est plus au box, son moral s’est amélioré et il est désormais bien plus calme et posé.” Un autre lecteur appuie ce changement de logement : “Après essai de l’alternance pré / box, je me suis rendu compte que c’est le 100 % pré avec au moins un autre cheval qui lui convient le mieux.” Depuis mi-mars, la complétiste française championne d’Europe par équipes et en individuel à Montelibretti (Italie) en 2016, Marie-Charlotte Fuss, a elle aussi sauté le pas d’un continuel logement au pré pour ses chevaux et en semble pleinement satisfaite. Via sa page Facebook Ekiway, Marie-Charlotte espère recueillir des données et mener des études sur les aspects physiologiques et psychologiques versus performances d’une gestion sans boxes et avec fourrage à volonté d’un effectif d’une quinzaine de chevaux de concours complet, du cheval de quatre ans à celui de haut niveau.
Les tics d’écuries
À la question “Avez-vous déjà remarqué des signes d’inconfort physique et émotionnel chez votre(vos) cheval(ux) au box?”, 53 % de notre panel n’en ont repéré aucun, 21 % ont indiqué des tics nerveux, et 13 % ont noté à égalité une dépression et de l’agres- sivité envers l’homme ou des congénères. “Les indices de mal-être sont encore mal appréhendés”, débute Léa Lansade, ingénieure de recherche en éthologie au sein de l’Institut national de recherche agricole (INRA) et l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE). “Avec ma doctorante Alice Ruet, nous avons récemment montré que les propriétaires et soigneurs – qui sont pourtant des professionnels avertis, et tous aux petits soins pour leurs chevaux – ne détectaient qu’une petite partie des tiqueurs, ce qui confirme des études antérieures.” Plus connus sous le nom de tics, les stéréotypies sont des mouvements répétitifs sans but ni fonction donnés. On distingue les stéréotypies orales, qui font intervenir la bouche, des stéréotypies locomotrices, type tic de l’ours, déambulation, etc. Malheureusement, elles sont plurielles et peuvent être propres à chaque cheval. “Empêcher le cheval de tiquer est néfaste et ne solutionne pas le problème”, critique Léa Lansade. “Il vaut mieux laisser faire, chercher les causes de ce comportement et les supprimer dans l’espoir que le tic cesse.” Ces comportements sont développés en réponse au stress, à l’ennui, à la privation d’espace et de contacts sociaux, au manque de fourrages, mais aussi à un stress aigu à un moment de la vie, comme un sevrage qui se passe mal. “Ces comportements anormaux sont plus visibles lorsque ma jument passe plus de temps au box, en hiver, et disparaissent complètement lorsqu’elle est au pré ou au paddock”, note Myriam, une des lectrices ayant répondu au sondage en ligne. Élodie relève la même chose pour son hongre, “qui tiquait et manquait d’appétit au box et a changé radicalement en vivant au pré”. Les stéréotypies très ancrées peinent à disparaître. “Le cheval peut les garder à vie, actives ou en latence, même si les conditions de vie redeviennent favorables”, souligne Léa Lansade. “Elles sont généralement réactivées lorsqu’il y a de l’inquiétude ou de l’excitation, typiquement au moment de la distribution de concentrés ou, pour certains chevaux, lors de la préparation à une séance d’équitation.” Encore trop souvent associée au caractère de l’animal, l’agressivité du cheval envers l’homme ou ses congénères – voire l’automutilation – est aussi pourtant un signe important de mal-être. Pour Élisa beth, Alexandrine, Julie on encore Béatrice, le passage au pré intégral, l’accroissement du nombre d’heures passées à l’extérieur ou encore l’arrivée d’un compagnon ont apporté un réel apaisement à leurs chevaux : “L’agressivité a totalement disparu, le cheval est plus calme, doux, et attentif à l’homme.” Moins spectaculaire et moins connue que l’agressivité, le manque aggravé d’attention est également un signal d’alerte sur la santé mentale de l’animal. “La dépression est un état de mal-être déjà très avancé”, détaille Léa Lansade. “La posture de dépression peut être confondue avec un cheval au repos mais il n’en est rien. Le cheval se fige et se positionne la plupart du temps face au mur, l’encolure à l’horizontal, les yeux bien ouverts, et refuse le contact visuel. À l’inverse, un cheval sans cesse en alerte – yeux écarquillés, encolure très relevée, oreilles pointées en avant – peut également refléter un état hyper anxieux, ce qui est un autre signe de mal-être.” Douce lumière Lorsque l’équidé séjourne en partie ou en totalité dans des bâtiments, les conditions lumineuses de son lieu de vie sont à prendre en considération. Pour 80 % de nos sondés, ces dernières influencent tout à fait sur le bien-être du cheval, 15 % n’en sont pas certains, 4 % n’ont pas d’avis et moins de 1 % ne le pensent pas. “Ce n’est qu’une intuition mais je pense qu’une lumière trop vive ou bien trop sombre peut perturber le cheval”, avance Charline, une des lectrices ayant répondu au sondage. En effet, les valeurs d’éblouissement sont définies par la norme NF EN 12-464-1 pour l’éclairage intérieur. Elles sont présentées en UGR (Unified Glare Rating). Sous 13 UGR, l’éblouissement est négligeable ; supérieur à 28, il est intolérable. Les données préconisées pour le cheval sont de tendre à un chiffre inférieur ou égal à 19 UGR pour les zones de logement et à une valeur UGR de 22 pour l’éclairage d’entraînement. “Concernant les variations de teinte, je suppose qu’une lumière blanche avec une certaine nuance peut être bénéfique pour le cheval, mais je n’ai pas pris connaissances des études à ce sujet”, poursuit Charline. Selon Bruno Duvault, dirigeant de la société normande Proximal, spécialisée dans l’éclairage dédié aux infrastructures équestres, “le cheval semble avoir ses propres préférences concernant le bénéfice de chaque teinte. Certains ont une meilleure récupération physiologique avec des teintes de froid et d’autres avec des teintes de chaud. Si l’on ne connait pas la spécificité du cheval, mieux vaut tabler sur un blanc neutre proche de 4200 K” (se reporter à ce sujet au dossier “Concilier sécurité et bien-être de son cheval lors du transport”, paru dans le numéro 117 de GRANDPRIX). Pour Amélie, l’éclairage nocturne pose problème : “Dans mes écuries, la lumière reste allumée parfois jusqu’à 22h00. C’est évident que cela bouleverse le rythme des chevaux!” Pour respecter le rythme circadien du cheval – processus biologiques cycliques d’une durée d’environ vingt-quatre heures – il est en effet important de pouvoir proposer jusqu’à huit heures d’obscurité. “Afin d’éviter les brusques changements lors de rondes nocturnes, il est intéressant de pouvoir basculer sur une lumière avec une longueur d’onde spécifique de rouge – que les chevaux ne perçoivent pas – qui va permettre à l’oeil humain de voir suffisamment si tout va bien et ne pas perturber subitement l’environnement lumineux voire la phase de sommeil de l’animal ”, répond Bruno Duvault à ce sujet.
Pour Johann, un des sondés, “il faut privilégier une luminosité plutôt faible pour apporter du calme tout en ayant des ouvertures et un contact visuel avec ses congénères”. Si le niveau d’éclairement recommandé est de 150 lx, ce sont surtout les contrastes de luminance qui sont à éviter, car “ils sont une source de stress et d’inconfort pour les chevaux”, comme l’indique Bruno Duvault, de Proximal. “Au sein d’une écurie, et en tenant compte de la lumière naturelle offerte par le bâtiment, il faudrait dès lors s’assurer d’une parfaite homogénéité à l’intérieur du box, avec le moins de contraste et d’ombres portées possible. On mesure cela en coefficient d’uniformité, sur une échelle de 0 à 1. Il est d’usage de viser une mesure de 0,5 pour les aires de logement et de s’approcher de 1 pour les aires de travail selon la norme NF EN 12193 pour l’éclairage des installations sportives – par exemple, 0,7 pour les compétitions nationalIes et internationales. Un box bien éclairé permet en outre de déceler d’un seul coup d’oeil toutes anomalies ou blessures éventuelles.” L’autre idée à mettre en place est de diriger la lumière directe du soleil dans les allées de déplacement plutôt que dans les boxes, pour éviter éblouissement et fortes chaleurs.“L’équidé est sensible comme l’homme aux troubles dépressifs saisonniers, il est néanmoins intéressant de pouvoir lui apporter entre quinze et seize heures d’éclairement par jour”, souligne Bruno Duvault. Pas question pour autant de bannir les fenêtres de box qui offrent un regard vers l’extérieur, “tant pour la luminosité naturelle apportée que pour l’aération et le mental du cheval”, conclut le spécialiste.
Estimer l'ambiance de vie
À la question “Comment estimez-vous les conditions d’ambiance de l’écurie ?”, les lecteurs sondés s’intéressent en premier à la présence et à la surface des paddocks, puis au système de distribution de l’alimentation puis à la qualité du sol des infrastructures. Viennent ensuite les critères des pensionnaires en bonne santé physique et morale, la possibilité des contacts sociaux, l’offre de pouvoir mettre l’animal quotidiennement en liberté, puis la bonne qualité des clôtures. Avec une très faible proportion – respectivement soixante-six et vingt-quatre clics de sondés –, les réponses concernant les paramètres techniques de l’écurie et la distance entre le lieu de repos et le lieu de travail ne semblent pas être des paramètres majeurs pour estimer l’ambiance d’une écurie. “Sans forcément connaître tous les détails des bons paramètres d’isolation, de température, de taux d’humidité, de ventilation ou de luminosité des écuries, je pense qu’il est important d’en avoir conscience”, analyse Nicolas Bischoff, architecte spécialisé dans les structures équestres. “Étudier les paddocks, les sols, les litières, ou encore s’assurer de la bonne santé des pensionnaires présents offre bien sûr de précieux indices sur la qualité de vie… mais cela ne fait pas tout. Chaque individu est différent et sera heureux en fonction de ses propres paramètres. Par exemple, un cheval tondu, un cheval de sport, ou encore un cheval de randonnée n’auront pas les mêmes besoins physiologiques.”
La distance entre le lieu de repos et le lieu de travail n’est pas toujours la plus agréable lorsqu’il s’agit de prairies éloignées ou d’écuries désaxées des carrières.“Il n’y a pas de distances idéales”, poursuit Nicolas Bischoff. “Je préfère pour ma part séparer le lieu de repos du lieu de préparation puis du lieu de travail. Par principe, le lieu de repos doit être au calme et ne pas recevoir d’agitation, que ce soit du public ou du mouvement des engins agricoles. Ce n’est pas forcément une question de distance mais plutôt de cloisonnement. Par ailleurs, chaque cheval a ses préférences. Quand l’un va aimer être plongé dans la vie active de l’écurie, l’autre va au contraire en souffrir. Il est intéressant de prévoir plusieurs typologies de box – plus ou moins ouverts ou isolés avec des parois pleines, grillagées, avec ouvertures sur l’extérieur, etc. – au sein d’une même écurie pour pouvoir contenter ainsi plusieurs types de personnalité.”
L’écurie active
Encore émergente en France, où l’on dénombre une vingtaine d’écuries – tandis qu’en Allemagne, son pays d’origine, le chiffre monte à huit cents –, l’écurie dite active repose sur l’organisation d’un grand espace commun, une automatisation de la distribution de l’alimentation et une répartition des points d’intérêt : zone d’affouragement, de repos, de roulades, DAC (distributeur automatique de concentrés), etc. Parmi nos sondés, 52 % n’ont pas testé mais aimeraient, 8,5 % l’ont fait et approuvent pleinement, tandis que 4,5 % ont encore des réserves. Enfin, 27 % et 8 % n’ont pas d’avis ou n’en voient pas l’intérêt. “En effet, quand le sol est portant toute l’année, que l’alimentation 100 % herbe convient à chaque individu et que les chevaux n’ont pas à être à proximité, le pré est idéal ; malheureusement, c’est rarement le cas”, souligne Arnaud Lallemand, expert aménagements équestres. “L’écurie active répond aux problèmes rencontrés par les propriétaires de chevaux hébergés en groupe, à savoir trop peu d’espace pour éviter boue et piétinement de l’herbe, ou au contraire une herbe trop riche pour des sujets fragiles, et un éloignement des installations.” L’écurie active, l’Equi-piste ou encore le Paddock Paradise sont des hébergements qui suscitent le déplacement, chacun à leur échelle. “Certains concepteurs sont très directifs et d’autres laissent plus de choix au cheval.” Parmi les inquiétudes des lecteurs, le risque de blessure et l’injonction à déferrer les postérieurs effraient.“À partir du moment où le groupe est stable et où les chevaux ont la possibilité de s’isoler provisoirement, la ferrure n’est pas un problème, certaines écuries actives accueillent aussi les chevaux ferrés”, répond l’expert. “La gestion par le gardien est très importante : c’est lui qui va évaluer les tempéraments et les risques.” Un groupe stable peut concerner des chevaux de sport ou d’instruction, mais exclut de fait les chevaux de commerce ou de passage ainsi que – pour le moment – les étalons, si ce n’est pour reproduire en monte en liberté. “Je pense avant tout au cheval dominé quand je conçois une écurie active”, détaille Arnaud Lallemand. “Tout est fait pour qu’il puisse atteindre facilement tous les points d’intérêt et s’isoler calmement des dominants sans conflit. Lorsqu’il va se nourrir dans un automate, le cheval est protégé de ses congénères. Les portions tombent peu à peu quand le cheval mange et s’arrêtent s’il vient à partir avant la fin de son repas. Tout est comptabilisé dans le logiciel et le cheval pourra se représenter à l’automate pour consommer sa ration plus tard.” Les DAC peuvent contenir jusqu’à six aliments, y compris liquides, voire même distribuer du foin si l’animal est rationné à ce sujet.
Si plusieurs sondés s’inquiètent de l’ambiance du groupe, l’expert se veut rassurant. “Il est préférable d’avoir un grand groupe hétérogène de chevaux pour que ces derniers puissent se regrouper selon leurs affinités, du jeune cheval actif au cheval plus calme. Les très vieux chevaux pourront néanmoins être logés dans un groupe exclusivement calme, pour leur confort et leur sécurité.” Dernière inquiétude des sondés, la taille du logement et la nature du terrain. “Pour un groupe de chevaux calmes et de petits gabarits, on compte 100 m² par animal. Pour des chevaux de sang, c’est plus 150 à 200 m² par tête.“ Le sol est stabilisé pour les zones à fort piétinement et peut être laissé naturel ailleurs s’il est assez porteur. “Le sable utilisé doit bien sûr ne pas générer de poussière, les sables lavés sont plus appropriés”, conclut Arnaud Lallemand.
Les jouets sont-ils utiles ?
À part presque égale, les propriétaires qui ont testé les jouets d’écurie – ballons, balle de nourrissage, friandises à lécher ou peluches – pour leurs chevaux ont reçu de l’intérêt ou de l’indifférence, respectivement à 31 % et 38 % des cas. De même, 16 % des sondés n’ont pas d’avis et 15 % n’en voit pas l’intérêt. À l’occasion de la Journée Éthologie organisée par l’IFCE en 2015, l’éthologiste Hélène Roche – dont le livre intitulé “Mon cheval est-il heureux à l’écurie ?”, aux éditions Belin, est sorti en 2014 – informe des dernières études et questionnement sur les jouets. En distribuant de petites quantités de concentré, la boule de nourrissage – à placer dans une mangeoire au sol et non dans la litière, qui amènerait trop de perte et d’ingestion de fumier – est intéressante mais peut devenir frustrante pour le cheval quand elle est vide. Si les friandises à lécher rencontrent généralement un franc succès, il faut garder à l’esprit que l’apport de sucre est important et que la position adoptée par le cheval pour les lécher si elles sont en hauteur ou suspendues peut générer, à force, des tensions.“Un fourrage varié, de provenance et de coupes différentes, sera bien plus intéressant et apprécié”, commente Claire Neveux. Quant au jeu avec des ballons, si ce n’est pas encore attesté, il semble plutôt correspondre à un simulacre – et donc un manque – de jeu social.
“Si cela aide certains chevaux qui s’ennuient, c’est déjà ça… mais le problème vient d’ailleurs et il serait plus raisonnable de le traiter à la source plutôt que le palier avec des artifices”, résumes-en quelques mots Sophie, une lectrice, la réponse majoritaire des sondés. Concernant l’aspect familier et rassurant des peluches avancé par certains lecteurs, Claire Neveux nuance : “Si l’on ne peut pas encore se prononcer avec certitude, l’attachement émotionnel à un objet inanimé me paraît néanmoins improbable. La valeur de cet objet pour l’animal est plutôt liée au sens olfactif s’il garde des traces d’odeur de son écurie, de son congénère voire de son cavalier”.
Confinement et services
Pour 72 % d’entre vous, le confinement des écuries décrété pour juguler la pandémie de Covid-19 n’a pas fait évoluer votre idée du logement, contre 28 %. Si les propriétaires ayant choisi un logement 100 ou à 50 % en pâture / paddock sont confortés dans leur choix, ceux dont le cheval était en box avec de petites sorties ont mal vécu la situation. Culpabilité de laisser son cheval trop longtemps enfermé, tension dans la communication avec l’écurie, à l’image de Milène, Sandrine et Marine, plusieurs propriétaires ont souhaité par la suite changer de forme d’hébergement, pour une dépendance équine moins forte à l’homme. Autre point de tension, les offres de la pension. 80 % des sondés considèrent que les services directement liés au bien-être des chevaux devraient être obligatoires dans la pension de base, en particulier le foin et la sortie au paddock. 16 % préfèreraient des services optionnels et 4 % n’ont pas d’avis. Entre tenue du budget et responsabilité du propriétaire, les avis divergent.“Les options incitent les propriétaires à ne pas faire sortir les chevaux car elles présentent des surcoûts de pension importants”, avance Marie. “Ils pensent pouvoir assurer les sorties mais la réalité est souvent autre et, petit à petit, le cheval reste enfermé 23h / 24h”, déplore aussi Aurélie. Pour la grande majorité des sondés, les rations de foin et la gestion des mises au paddock et des couvertures font intégralement partie du bien-être équin et devraient être compris dans le prix – donc plus élevé – de la pension de base. Dans la balance des pro-tarifs optionnels, on retrouve la gestion des coûts et une meilleure personnalisation des soins. “Le propriétaire connaît le mieux son cheval, l’alimentation dont il a besoin, s’il est frileux ou non, etc.”, note Marie-Sarah. Seul le contrat de pension et les discussions entre propriétaires et gérants pourront éviter conflits et désagréments à l’avenir, que l’on espère plus radieux.
-Cet article est paru dans le magazine GRANDPRIX n°118 du juillet 2020.