Quelle règlementation pour la construction des obstacles disposés au paddock?

Si la plupart des protagonistes d’un concours de saut d’obstacles évoluent dans le cadre des règlementations précises, aussi bien à l’échelle nationale que sur la scène internationale, qu’en est-il exactement de l’organisateur, du chef de piste et des commissaires en ce qui concerne les obstacles disposés au paddock? De récents accidents ont suscité des questions quant aux droits et devoirs des uns et des autres. Et après un examen approfondi des règlements, enrichi d’éclaircissements de personnalités chevronnées, il n’apparaît pas toujours évident de répondre précisément à toutes les questions.



Commissaires au paddock, juges, vétérinaires et bien évidemment cavaliers, tous les principaux acteurs d’un concours de saut d’obstacles international sont soumis à des règlementations précises, élaborées par la Fédération équestre internationale (FEI), qui les publie sur son site à qui voudrait – devrait – les éplucher. Mais qu’en est-il de l’encadrement du paddock et des obstacles qui y sont disposés ? Dans le règlement de saut d’obstacles de la FEI (disponible ici), ainsi que dans le guide du steward (disponible ici), quelques obligations sont spécifiées. “Les éléments constitutifs d’un obstacle doivent être tels qu’ils peuvent être renversés, sans être si légers qu’ils tomberaient au moindre contact, et sans être lourds au point de faire tomber ou blesser des chevaux. […] Il doit y avoir, au minimum, un vertical et un oxer. […] Tous les obstacles doivent être construits de la manière habituelle et munis de drapeaux rouges et blancs. […] L’utilisation (par les cavaliers, ndlr) de matériel d’obstacles non fourni par le comité d’organisation est interdite sous peine de disqualification et/ou d’amende.” 

Selon l’un des deux chefs de piste interrogés, “la seule chose qui est communément interdite pour les obstacles disposés au paddock, ce sont les chandeliers pleins, car on doit pouvoir voir à travers un chandelier afin de protéger les piétons qui pourraient se trouver de l’autre côté. Cependant, en ce qui concerne la hauteur ou la largeur des obstacles (qui devraient pourtant être proportionnelles au niveau de l’épreuve, ndlr), ou quoi que ce soit à propos des chandeliers, il n’y a rien d’obligatoire. Selon moi, ce pourrait être un sujet à travailler à l’avenir. Par exemple, nous pourrions instaurer une taille minimale pour les chandelles (plus fines et moins hautes que les chandeliers, elles peuvent être dangereuses, notamment placées en deuxième plan d’un oxer, car moins visibles par un cheval ndlr), qui peuvent occasionner de graves accidents, pour les chevaux comme pour les cavaliers d’ailleurs.” Même son de cloche du côté de René Billardon, éminent juge français de niveau 4*, officiant régulièrement dans les plus grands événements français et internationaux. “C’est une question intéressante”, commence-t-il. “Il est vrai qu’il n’existe pas de règlement spécifique pour les chefs de piste. Toutes les règles relatives aux obstacles sont inscrites dans les guides de la FEI: les cotes, la vitesse, etc. En ce qui concerne la construction des parcours, tout est de plus en plus précis et les règlementations laissent de moins en moins place à l’improvisation. À une époque, on pouvait afficher une épreuve à un certain niveau et le chef de piste pouvait prendre la liberté de construire en fonction du plateau présent, par exemple. Aujourd’hui, ils doivent respecter les cotes. Il existe également un certain nombre de codes pour le paddock, comme le droit de mettre des barres d’appel, la règlementation de barres sèches, ou encore l’interdiction des faux appels.”



Quel règlement en la matière?

Qui est garant de la sécurité des obstacles du paddock? Si les chefs de piste sont responsables de la construction des parcours des épreuves, et garants de la sécurité des obstacles qu’ils disposent en piste, c’est le chef des commissaires au paddock qui a la charge de l’espace d’échauffement des chevaux, qu’il s’agisse de sa surveillance ou de la construction des obstacles. “Pendant longtemps, au niveau national, on a dit que le chef de piste devait aussi s’occuper des obstacles du paddock”, explique René Billardon. “Avant, il arrivait même parfois que le chef de paddock s’engueule avec le chef de piste pour savoir lequel des deux devait s’en occuper! Aujourd’hui, c’est le domaine du chef de paddock. C’est à lui veiller à la sécurité ou à la qualité du matériel. Depuis un an, ils sont de plus en plus formés sur tout un tas de thèmes, dont des sujets très techniques comme la construction des obstacles, et participent régulièrement à des séminaires de rafraîchissement pour rester au niveau. Globalement, tous les officiels sont de mieux en mieux encadrés et moins libres qu’avant. Il y a de moins en moins de place pour l’improvisation, et le reste relève du bon sens. Si jamais un chef steward, comme n’importe quel autre officiel, voit qu’un chandelier ou une barre sont défaillants, il doit le signaler. D’ailleurs, dans le rapport final du juge étranger, il y a systématiquement une question sur la qualité du matériel des obstacles. En outre, celui-ci est fourni par l’organisateur du concours, et les officiels en ont la gestion.” 

“C’est effectivement l’organisateur qui fournit le parc d’obstacles utilisé pour le paddock”, confirme l’un des deux chefs de piste interrogés. “Personnellement, avant d’arriver à un concours où j’officie, j’envoie systématiquement moi-même six chandeliers et une dizaine de barres très colorées pour le paddock.” Évidemment, chaque concours est différent, et certains organisateurs disposent de parcs d’obstacles plus fournis, récents ou de meilleure qualité que d’autres. “Il faut noter qu’il y a quand même eu un certain nombre d’avancées en termes de sécurité, comme la disparition des chandeliers ouverts (donc sans protection, souvent en plastique ou en caoutchouc, ndlr), ou les chandeliers ayant des pieds trop saillants. Il est vrai que les chandelles, par exemple, sont de moins en moins utilisées car elles sont d’une part instables, et peuvent aussi être dangereuses. Même si elles ne sont pas interdites, les chandelles sont peu utilisées dans les paddocks d’échauffement. Elles peuvent exister un peu plus en piste car on peut les habiller ou les décorer. Le matériel relève d’une responsabilité conjointe de l’organisateur qui le met à disposition, et du chef de paddock, qui est garant de sa qualité.” 

Contactée par GRANDPRIX, la FEI tente de clarifier les responsabilités de chacun. “Comme indiqué dans le règlement de saut d’obstacles de la FEI, l’article 201.7 stipule que les zones d’échauffement doivent toujours être surveillées par un steward lorsqu’elles sont utilisées. Les stewards FEI veillent à ce que la configuration, les dimensions et l’utilisation des obstacles d’entraînement soient conformes aux règles, lesquelles sont décrites aux articles 201.4 - 201.6 du règlement de saut d’obstacles. Comme indiqué à l’article 210, des fiches de sécurité approuvées par la FEI doivent être utilisées pour le chandelier arrière de tous les oxers et pour les chandeliers central et arrière des triples-barres. Cela s’applique également aux obstacles du paddock. Le président du jury est chargé de s’assurer que les règles à propos des fiches de sécurité sont respectées, et il en va de la responsabilité du juge étranger de signaler tout non-respect de ces règles à la FEI.” 

Quel que soit son statut, il appartient à chacun de redoubler de vigilance. Et à l’avenir, le comité de jumping de la FEI aurait peut-être intérêt à règlementer certaines notions demeurant un peu floues.