Qui sont les nouveaux licenciés de la FFE, seule fédération à en avoir gagné à la rentrée?

Alors que presque toutes les fédérations sportives ont annoncé une baisse de leur nombre de licenciés entre octobre 2019 et octobre 2020, la Fédération française d’équitation affiche un chiffre en hausse de près de 27.000 sur cette période. Même si rien n’est gagné puisque de nombreuses licences sont renouvelées après le mois de novembre, et non en septembre et octobre comme dans la majorité des autres sports, on ne peut que se réjouir de voir ainsi récompensés les efforts des dirigeants de centres équestres et poney-clubs, épaulés en cela par Lamotte-Beuvron et les comités régionaux et départementaux. Qui sont ces nouveaux cavaliers et équitants? GRANDPRIX a sondé plusieurs dirigeants de structures en différentes régions de France.



Tous les dirigeants d’établissements équestres (recevant du public) sondés depuis trois mois s’accordent à confirmer que la rentrée 2020 a été plutôt positive en termes de nombre de licenciés et pratiquants. D’ailleurs, GRANDPRIX s’en était déjà fait l’écho il y a un mois et demi. De fait, à l’inverse de toutes ses consœurs dans l’Hexagone, la Fédération française d’équitation (FFE) est la seule qui comptait plus d’adhérents en octobre 2020, 26.991 pour être précis, qu’en octobre 2019. Chapeau aux dirigeants de centres équestres et poney-clubs, aidés depuis le déconfinement du printemps par une campagne de communication sans précédent de la FFE. Qui sont ces nouveaux cavaliers et équitants? Plutôt urbains ou ruraux? Jeunes ou plus âgés? Néo-pratiquants ou anciens de retour? Difficile de répondre à toutes ces questions sans une fine enquête statistique. En valeurs, la FFE relève toutefois que les régions les plus dynamiques sont l’île de France, puis l’Auvergne-Rhône-Alpes, les Pays-de-la-Loire et la Bourgogne-Franche-Comté. “Il y a plus de primo mineurs que de majeurs, ce qui est logique au regard de la répartition des classes d'âge des licenciés”, dit encore la fédération. Pour prendre le pouls du terrain, GRANDPRIX a sondé plusieurs dirigeants de structures équestres en différentes régions de France.

Karine Boué, centre équestre de la Scie, à Longueville-sur-Scie, en Seine-Maritime: “Malgré la situation sanitaire, le club connaît une hausse de 15% du nombre de licenciés de tout âge, mais je constate aussi une croissance du nombre de cavaliers âgés de quatre à douze ans. Cette crise a encouragé des sportifs à se tourner davantage vers l’équitation que d’autres activités, car la distanciation sociale se fait naturellement entre chaque personne juchée sur son cheval. De plus, les centres équestres, dans leur immense majorité, ont vraiment joué le jeu pour rattraper ou rembourser les cours et je pense que cela a rassuré les personnes qui se sont ensuite réinscrites. Cela a peut-être même attiré de nouvelles personnes qui ont pu constater que nous prenions la crise au sérieux. Après le deuxième confinement, nous avons repris nos activités dès le samedi 28 novembre. Tous nos cavaliers ont pu revenir. Je crois que le fruit de notre travail a permis d’établir une relation de confiance réciproque qui se traduit aujourd’hui dans l’augmentation du nombre de licences.”



Sofian Chetioui, enseignant au centre équestre de Rouelles au Havre, en Seine-Maritime : “Certes, la crise sanitaire n’est pas facile à vivre, mais nous avons vécu l’une de nos meilleures rentrées en matière de nouveaux adhérents. Aujourd’hui, les gens ont tendance à favoriser un sport extérieur comme l’équitation plutôt qu’un sport en salle. Je crois que ce facteur a permis de redynamiser notre club et de renouer avec une forte croissance en termes de licences. À cette heure, je compte beaucoup de nouveaux adhérents âgés de cinq et onze ans, mais aussi des cavaliers qui viennent redécouvrir le plaisir de se remettre en selle après de nombreuses années d’arrêt. À la suite du deuxième confinement, la reprise est intervenue dans le calme début décembre. Nos licenciés, autant les habitués que les nouveaux, n’ont pas été perturbés car les gestes barrières n’ont jamais cessé de s’appliquer depuis le printemps, qu’il s’agisse des sens de circulation, de signalétique, du port du masque ou de l’application de gel hydroalcoolique. Je n’ai pas ressenti d’inquiétude chez les cavaliers qui se sont remis à cheval. Au contraire, ils étaient comblés de retrouver leur cheval ou poney. Depuis octobre 2019, de nombreux licenciés viennent monter régulièrement, une fois par semaine, notamment grâce aux aides financières accordées par le département de la Seine-Maritime pour favoriser la pratique sportive. C’est une vraie tendance, qui ne devrait pas se démentir l’année prochaine.”

Alexia Deveautour, enseignante au Haras des Peupliers à Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne) : “Notre nombre de licenciés a connu une forte hausse entre octobre 2019 et novembre 2020. À l’heure actuelle, je compte plus de cent adhérents contre soixante l’an passé. Le bouche-à-oreille nous a permis de faire adhérer de nouveaux cavaliers, qui sont pour la plupart très jeunes ou adolescents et qui viennent découvrir l’équitation comme n’importe quelle autre année. Quelques anciens se sont aussi remis en selle, par soif d’équitation. Pour de nombreux licenciés, s’inscrire à l’année n’a pas fait peur. Au contraires la majorité de nos adhérents ont fait ce choix. J’ai donc pu compter sur leur confiance pour l’année 2020 et j’espère que cela continuera ainsi l’an prochain.”

Aude Bouvier, dirigeante et monitrice du centre équestre de la Gailleste, à Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) : “Le centre que je dirige a connu une hausse des licences cette année. Cela s’inscrit dans une tendance générale. J’ai repris la direction de ce centre depuis deux ans et les gens affluent depuis. La pandémie de Covid-19 n’a pas eu un effet dévastateur comme nous aurions pu nous y attendre. De fait, nous en avons eu une dizaine de licenciés de plus cette année par rapport à 2019, sur quatre-vingt-dix licenciés en tout. Les nouveaux se répartissent plutôt équitablement entre enfants, pour nos poneys, et adultes, pour les chevaux, ce que je trouve plutôt étonnant comparé aux autres régions où j’ai enseigné. À Paris, nous voyions beaucoup plus d’adultes débutants. Dans le Maine-et-Loire, c’était plutôt les enfants qui débutaient tandis que les parents avaient peur de commencer à pratiquer l’équitation. Ici, beaucoup de nouveaux licenciés sont des enfants débutant à poneys et les adultes reviennent après quelques années de césure pour se remettre en selle. J’ai beaucoup plus de néo-cavalières que de néo-cavaliers, ce qui ne m’étonne pas outre mesure. Par ailleurs, en termes de catégories sociales, c’est assez divers, bien que l’équitation ait encore une réputation de sport pour gens aisés. La pratique s’est démocratisée, et ici j’ai autant d’enfants d’agriculteurs que d’adultes issus de la classe moyenne.”



Sabrina Zampolini, dirigeante du centre équestre de Luchon à Bagnères-de-Luchon (Haute-Garonne): “Nous avons exactement le même nombre de licenciés cette année qu’en 2019, mais ce sont toutefois des cavaliers différents de l’an dernier, soit parce qu’ils viennent de se remettre à l’équitation soit qu’ils débutent. Nous avons surtout des enfants, en majorité des petites filles, qui viennent commencer à poney. Il y a même tellement de demandes pour le baby-poney et les cours jusqu’à douze ans que nous devons refuser du monde, sinon les cours ne seraient plus gérables. Nous connaissons depuis notre ouverture il y a cinq ans une hausse du nombre de licenciés, surtout grâce au bouche-à-oreilles, et cette tendance ne s’est pas démentie cette année.”

Christophe André, dirigeant du centre équestre du Mont-Blanc à Chamonix (Haute-Savoie): “Si nous n’avons pas connu de grosse augmentation cette année, nous n’avons pas eu de baisse non plus, ce qui est plutôt réjouissant en dépit de la situation qui pouvait laisser penser que nous connaîtrions une grosse baisse en termes de licenciés. Nous avons reçu légèrement plus d’enfants et d’adolescents que d’adultes, ce qui porte notre nombre de licenciés à environ cent cinquante. Ce chiffre englobe les nouveaux licenciés du Club des Sports de Chamonix, qui viennent monter dans notre centre tout en ayant une licence à prix réduit au vu de leurs conditions financières. Bien que Chamonix soit une ville à la population relativement aisée, je compte aussi dans mes nouveaux cavaliers des enfants dont les parents sont des saisonniers qui travaillent l’hiver sur les remontées mécaniques du domaine skiable et qui peuvent quand même inscrire leurs enfants à l’équitation. En tout cas, j’essaie de tout faire pour qu’ils n’aient pas à se priver d’un sport qu’ils aiment. Outre ces enfants, mes nouveaux cavaliers sont surtout des femmes adultes, qui avaient dû arrêter pour leur travail ou lors d’une grossesse et qui ont repris l’équitation cette année.”

Anonyme, dirigeante d’une structure située dans les Vosges: “En 2019, j’avais eu nouveaux onze inscrits. Cette année, il y en eu vingt-trois, en plus de nos cavaliers habituels. La majorité sont des petites filles et pré-adolescentes qui n’avaient jamais monté auparavant. Néanmoins, je retrouve aussi beaucoup de cavaliers adultes qui avaient arrêté l’équitation et ont décidé de reprendre cette année, parce qu’ils avaient plus de temps libre comme leurs enfants sont retournés à l’école. J’ai aussi été quelque peu surprise de voir que les gens continuaient à s’inscrire, au vu de l’année que nous avons passée, car je pensais que les finances des familles ne pourraient pas suivre l’envie des enfants de pratiquer l’équitation. Les adultes qui sont arrivés m’ont aussi dit qu’ils n’avaient pas envie d’arrêter de vivre à cause de la pandémie et que prendre une licence leur permettait aussi de nous soutenir financièrement, ce pour quoi je leur suis très reconnaissante.”

Valérie Moras, dirigeante du centre équestre de Thônes (Haute-Savoie) : “Chez nous, les nouveaux licenciés sont pour les deux tiers de jeunes enfants qui débutent et pour un tiers des adultes qui reviennent à l’équitation. Ces quarante nouvelles licences font donc monter le nombre total de nos cavaliers à deux cents. Bien que nous ayons en effet plus de nouveaux cavaliers que l’an dernier, ils ne peuvent malheureusement pas monter actuellement chez nous. En effet, notre manège est complètement couvert donc considéré comme un ERP (établissement recevant du public) classé X, donc nous ne pouvons accueillir de public à l’intérieur. Comme nous sommes en Haute-Savoie, il neige aussi actuellement et notre carrière est gelée, donc nous ne pouvons pas l’utiliser non plus…”