“Le Paris Eiffel Jumping se tiendra à côté de la tour Eiffel pour conserver son ADN”, Virginie Couperie-Eiffel

Annulé en 2020 à cause de la situation sanitaire, le Longines Paris Eiffel Jumping reviendra bien en 2021! Prévu du 23 au 27 juin, l'événement organisé par Virginie Couperie-Eiffel et le Longines Global Champions Tour, circuit dont il sera l'une des étapes, se tiendra l'année prochaine aux pieds de la tour Eiffel, sur la place Jacques Rueff. Entretien avec l'organisatrice.



Comment allez-vous et comment vivez-vous ce deuxième confinement? 

Le deuxième confinement est quand même beaucoup plus facile à vivre pour tout le monde je pense car nous avons un peu plus de liberté que pendant le premier. Une partie de la filière équestre peut continuer à travailler puisque les compétitions professionnelles sont autorisées. Personnellement, je ne suis pas à plaindre car je vis de ma passion. J’ai la chance d’être à la campagne, dans un cadre sauvage que j’adore, au milieu des chevaux. J’ai l’impression de revenir un peu à mes racines comme je suis née et que j’ai été élevée à la campagne. Je fais ce que mon père faisait jadis: replanter des arbres, recréer et préserver la faune naturelle, et respecter la biodiversité. J’ai pu rester auprès de mes chevaux et faire connaissance avec toutes les jeunes générations de poulains. Une vente en ligne de vos chevaux de l’élevage de Bacon est organisée pour clôturer la Semaine digitale du cheval. Compte-tenu de la situation sanitaire, le digital vous est paru évident? 

Cette crise nous pousse à nous réinventer et à faire autrement. C’est dans ce contexte que j’ai par exemple décidé de proposer la vente de nos chevaux de Bacon en ligne. Les événements indoor ayant tous été annulés pour des raisons sanitaires et économiques, et notamment le CSI 5*-W de Bordeaux, lors duquel nous organisons habituellement notre vente de chevaux, j’ai pu m’appuyer sur la Semaine du cheval digitale. Je n’avais jamais fait de vente digitale auparavant, même si je me suis toujours appuyée sur la communication digitale pour le Longines Paris Eiffel Jumping que j’organise, ou mes écuries. Cette période nous oblige à redoubler d’idées et d’initiatives. Tout le monde dépense deux fois plus d’énergie pour deux fois moins de résultats. Pour tenir financièrement, il faut savoir être créatif et s’adapter, même si cela constitue un risque car rien n’est plus certain. 

Quand et où se tiendra la septième édition du Longines Paris Eiffel Jumping? 

Cette période nous a laissé plus de temps pour penser à l’organisation du LPEJ, savoir comment nous pourrions innover et s’inscrire encore plus dans une démarche d’écoresponsabilité. En 2021, le concours se tiendra sur la place Jacques Rueff, à quelques mètres du lieu habituel (entre le champ de Mars et la Tour Eiffel, à quelques mètres seulement de celle-ci, ndlr), puisque le Grand Palais éphémère est installé sur la place Joffre (à la suite des travaux réalisés au Grand Palais, ndlr). Cela a été un peu compliqué de trouver un endroit où installer une piste qui soit assez grande pour les chevaux, et des écuries conformes à ce qu’on voulait, c’est-à-dire spacieuses, ombragées et assez proches de la piste. Nous avons pensé au bien-être de tout le monde: les chevaux, les cavaliers, les grooms, les spectateurs, etc. La piste sera d’une taille plus classique, c’est-à-dire plus longue et moins large que d’habitude, et se rapprochera davantage d’un rectangle. Et surtout, elle sera dans le même axe, donc face à la tour Eiffel! Quant aux dates, nous avons repris notre date initiale, c’est-à-dire du 23 au 27 juin, puisque Monaco a libéré cette date. 

Pourquoi avoir choisi ce lieu? Les jardins de Bagatelle, où s’était tenu le Longines Paris Eiffel Jumping en 2016, ont-ils constitué une option? 

Les jardins de Bagatelle sont un magnifique lieu, mais je trouvais que nous perdions un peu l’identité du concours, qui s’appelle quand même Eiffel Jumping. Je dois dire que cela été une option, mais j’avais envie de rester proche de la Tour Eiffel. Le concours se tiendra à côté d'elle pour conserver son ADN. En plus, pour le public, l’affluence est plus importante si l’on est au cœur de la ville car l’accès est beaucoup plus facile. Le luxe était de rester à la tour Eiffel, c’était le premier choix! Je dois même dire que la place Jacques Rueff est peut-être mieux située que la place Joffre car elle est plus ombragée, et il fait très chaud à Paris à cette période.



Donc le Longines Paris Eiffel Jumping restera encore une étape du Longines Global Champions Tour?

Oui, notre concours reste une étape du LGCT. Nous avons parlé avec les organisateurs du circuit, qui devraient d’ailleurs annoncer les étapes de l’année 2021 très prochainement. C’est un rendez-vous qui marche donc il n’y a pas de raison de s’arrêter! Le concours, qui se tiendra une nouvelle fois au cœur de Paris et que vous souhaitez depuis toujours rendre populaire, sera-t-il gratuit et quelles animations les spectateurs pourront-ils y retrouver? Comme chaque année, l’accès au village et aux tribunes seront en partie gratuites, notamment grâce à la mairie de Paris avec qui nous collaborons. Nous allons pouvoir accueillir du public, même si les tribunes seront peut-être un peu moins grandes que d’habitude, et les flux seront modulables - ce qui n’est pas négligeable vu la crise sanitaire que nous traversons. Du côté des animations, en plus du sport de haut niveau, nous organiserons une année encore le pavillon Eiffel, avec nos deux fameux restaurants qui prônent l’art de vivre à la française et le “made in France”. Nous mettrons également en avant l’art, la culture et l’ingéniosité française grâce à des expositions et des spectacles. 

Vous êtes probablement l’organisatrice de concours de haut niveau la plus engagée pour la lutte contre le dérèglement climatique. Allez-vous mettre en place de nouvelles initiatives éco-responsables?

Pour l’instant, seuls le lieu, les dates et la configuration sportives sont arrêtés, donc je ne peux rien dire de précis à ce stade. Ce qui est sûr, c’est que la vedette du concours sera le cheval, et que l’événement aura pour valeurs cardinales le bien-être animal, la biodiversité, et la solidarité. Même si l'événementiel ne peut pas être neutre en carbone, nous tenons vraiment à nous engager pour l'écologie, ce que nous faisons déjà depuis plusieurs années. Dès le premier LPEJ, j’ai ancré cette notion avec le ramassage des ordures, le tri sélectif, les chevaux de trait qui passent la herse sur la piste. Toutes ces petites choses qui marquent une volonté, et c'est comme ça que l'on donne envie de faire aux autres. C’est facile de dire que l’on veut être écoresponsables, mais c'est encore mieux de montrer concrètement comment on peut l'être. Nous sommes entourés d'experts pour nous aider à aller dans le bon sens. Nous veillerons à la qualité gastronomique et aurons une véritable exigence sur la traçabilité des produits, qui seront issus de circuits courts ou du terroir. Nous allons continuer à travailler sur la réduction de nos déchets, en collaboration avec plusieurs associations, et poursuivrons la lutte contre le plastique avec l’association No Plastic notamment. Cela veut dire que nous distribuerons des gourdes, et pas des bouteilles en plastique, et que des fontaines d’eau potable seront accessibles. D’ailleurs, la gestion de l’eau sera aussi gérée intelligemment et va devenir un vrai sujet. En parlant d’écologie, nous avons d’ailleurs offert des tickets d’entrée pour le LPEJ à une tombola organisée par la fondation GoodPlanet (fondation créée et présidée par Yann Arthus-Bertrand, photographe et porte-parole de l’écologie en France, dont un entretien exclusif est d’ailleurs à retrouver dans le dernier numéro du magazine GRANDPRIX, ndlr). 

Pour ce qui est de la solidarité, nous allons réitérer notre partenariat avec des collectifs d’éducateurs et des associations d’écoles, avec qui nous avons déjà travaillé par le passé. Plusieurs dizaines de jeunes avaient pu assister au concours, découvrir un autre monde et faire connaissance avec le cheval à travers des ateliers de pansage et des séances à poney. S’ils le souhaitent, ils peuvent même profiter de quelques cours d’équitation gratuits par la suite. L’idée n’est pas de faire une animation isolée, mais de faire germer des graines. Ces enfants, qui vivent tous en ville, partent du concours en ayant appris quelque chose et découvert la relation avec le cheval. Le cheval soigne, éduque, prend soin de l’autre, et l’idée est d’en faire profiter ceux qui n’y auraient jamais pensé. Si nos initiatives écoresponsables peuvent être inspirantes et donner des envies et des idées à d’autres organisateurs d’événements, j’en serais ravie! Nous essayons de travailler avec des marques et des sociétés qui ont les mêmes aspirations que nous. 

Cette année, qui a été difficile à vivre pour tout le monde, a permis de parler davantage d’écologie et d’économie entre autres, et d’évoquer un “monde de demain” à inventer. Qu’en pensez-vous?

Nous avons vu que le monde était capable de s’arrêter pour des raisons de santé publique, ce que l’on comprend tous très bien, et que la nature a immédiatement repris ses droits. C’est incroyable que l’on n’arrive pas à faire ça en temps normal, alors que le dérèglement climatique est aussi dangereux... Je pense que cette crise a servi de prise de conscience pour certains, et que le monde d’après va être plus responsable. Les années 1980 ont été synonymes de la réussite par l’argent ; aujourd’hui, nous parlons de la réussite synonyme d’épanouissement. Beaucoup de gens, et en particulier la jeune génération, n’ont pas pour but d’amasser beaucoup d’argent. Nous sommes obligés d’avoir de l’argent pour vivre, mais nous nous sommes créés nous-mêmes beaucoup de besoins qui n'en sont pas. Le bonheur n’est pas dans la consommation, il est ailleurs. Et nous l’avons bien vu pendant ces confinements car nous avons été heureux, dans le malheur, de passer davantage de temps avec nos proches, de s’écouter davantage, de vivre à un rythme plus raisonnable. Au-delà de l’écologie, je pense que le monde de demain doit être et sera plus solidaire. Cette crise va affaiblir les plus fragiles, et les choses vont devenir très dures socialement car les écarts se creusent un peu plus. Donc j’estime que quand on a un peu, il faut être solidaire. Parce que ça fait du bien aux autres mais aussi du bien à soi. On ne peut être heureux que si les autres sont heureux ; on ne peut pas être heureux tout seul. Le bonheur est fait pour être partagé! Quand je pense au nombre de gens que nous laissons au bord de la route, cela m’attriste beaucoup... Les nouvelles générations ont de nouvelles aspirations et j’espère qu’elles nous aideront à les adopter!