Le consommateur est-il assez bien informé sur le transport équin ?
Occasion, location, estimation: sommes-nous assez informés des généralités et subtilités du transport de chevaux? Investissement à l’achat, concordance entre les besoins estimés et la réalité, réparation et pérennité, l’utilisation d’un véhicule ou d’une remorque pour chevaux requiert généralement de nombreux questionnements. Avec le concours de plusieurs acteurs du secteur, GRANDPRIX fait le point sur les informations nécessaires, les habitudes de consommation des équitants et l’avenir des transports équins.
La réglementation française des transports requiert de s’assurer avant tout déplacement de l’adéquation entre le permis du conducteur, la capacité de traction du véhicule et le poids maximal autorisé. À l’instar de Vans Barbot, constructeur domicilié à Lisieux, dans le Calvados, les carrossiers proposent parfois sur leur site des indications sur les spécificités de permis et d’assurance de leurs produits, avec les mises à jour qui s’imposent, car elles ne sont pas toujours évidentes. Le commun permis B permet de conduire un ensemble (véhicule et remorque) dont la somme du poids total en charge du véhicule (PTAC) – c’est-à-dire le poids maximal autorisé du véhicule et de ce qu’il transporte (personnes, marchandises, etc.) – est inférieure à 3 500 kg. Une formation B96 (sept heures en auto-école) permet de conduire un ensemble (voiture et remorque) dont le PTAC est supérieur à 3 500 kg, sans dépasser 4 250 kg. Enfin, le permis BE est nécessaire pour conduire un ensemble dont le PTAC est supérieur à 750kg, sans dépasser 3500kg si la somme des PTAC de l’ensemble (voiture+remorque) dépasse 4 250 kg, dans une limite de 7 000 kg pour le poids total roulant autorisé (PTRA)... En cas d’overdose de consultation de carte grise, un appel à son assureur et son concessionnaire peut être salutaire. Le permis C autorise la conduite des véhicules affectés au transport de marchandises ou de matériel dont le PTAC est supérieur à 3 500 kg, et il se décline lui aussi selon les poids en charge (CE, C1, C1E). La durée de validité du permis C dépend de l’âge du conducteur et son renouvellement s’obtient sous réserve d’un avis médical favorable.
Transports ponctuels
Encore assez sommaire il y a quelque temps – emprunt du van du voisin sans penser aux assurances, au contrat ou à la caution –, la location est aujourd’hui plus encadrée, et toujours autant plébiscitée. Sur le plan financier, elle ne nécessite pas d’investir une grande somme d’argent ou de devoir payer les charges annuelles liées à la possession du véhicule – parking, assurances, révisions, contrôle technique, etc. Sur le plan matériel, la location offre souvent la possibilité d’utiliser un véhicule récent, plus grand ou plus confortable.
Fruit d’un nouveau mode de consommation, la location entre particuliers poursuit son épanouissement, sous réserve d’être bien encadrée pour éviter les mauvaises surprises en cas d’incident et accident. Dès lors, plusieurs plateformes proposent aujourd’hui de mettre en relation des particuliers pour des prêts/locations de véhicules toutes marques confondues, ou via une société de transport exclusive, à l’instar de la plateforme collaborative Renteo, filiale du constructeur français Theault depuis 2013, lui-même sis dans la ville normande de Pont, aux portes d’Avranches. “Le proprié-taire peut amortir son achat via un service clé en main et le locataire bénéficie d’une mise en place rapide d’un contrat. Tous les véhicules présents sur la plateforme sont assurés spécifiquement pour la location courte durée, cela est compris dans le tarif de location”, détaille Angéline Chatellier, en charge de la plateforme France Renteo. “La large majorité de nos locations concerne les véhicules légers (VL), qui ne nécessitent qu’un simple permis B. La durée moyenne de location est de vingt-quatre heures, dans laquelle sont compris le temps de trajet pour déposer le véhicule, son nettoyage ainsi que son plein d’essence. Beaucoup de nos véhicules sont neufs ou très récents – moins de cinq ans et 150 000 km –, ce qui rassure le consommateur. En outre, si l’on fait appel à nos services, c’est précisément parce que nous collaborons avec une marque exclusive, Theault, ce qui nous permet de nous reposer sur le savoir-faire et la sécurité bien connus de cette marque bientôt centenaire. Conduire, encore plus avec un animal à l’arrière, reste une affaire délicate, et beaucoup de clients apprécient de pouvoir disposer d’un véhicule dont ils connaissent les capacités, le confort de conduite et le confort pour leurs chevaux.”
Heureusement moins courant mais souvent sous-évalué, le très redouté transport d’urgence fait également partie des déplacements ponctuels sur lesquels se renseigner. Cette éventualité d’urgence est par ailleurs une composante importante à la décision d’achat d’un véhicule tant elle est source d’impasse et de stress. Néanmoins, il existe des professionnels spécialisés dans ce domaine, à l’instar de l’entreprise Decoopman, basée à Lesquin, à neuf kilomètres de Lille, qui dispose d’une section urgence dans sa gamme de location de véhicules. “Nous réservons généralement les véhicules disposant d’espaces les plus grands pour un transport d’urgence”, détaille Clément Decoopman, fondateur de l’entreprise éponyme. “Les vans en stalle ou en oblique sont privilégiés afin que le cheval dispose d’une liberté souvent nécessaire à son calme. Néanmoins, nous nous adaptons; si le pro- priétaire nous informe que son cheval préfère être tenu par des parois, cela sera chose faite. Dans le cas où le cheval ne doit justement surtout pas bouger et être soutenu, nous proposons des véhicules ambulances qui disposent de treuil et de hamac pour maintenir le cheval et soulager ses appuis. Ce genre de transport est généralement requis dans les cas de fourbures ou de fractures.” Pour aider le propriétaire à faire rapidement son choix, les cliniques vétérinaires les plus proches sont indiquées sur le site et les contrats sont pré-imprimés pour être remplis avant le départ en moins d’une minute. “Nous collaborons avec plusieurs cliniques locales. Il est important d’avoir une bonne communication entre l’équipe de transport et l’équipe soignante, pour ne pas perdre une minute”, conclut le directeur de Decoopman Transports.
Évaluer la pérennité
Est-ce assez solide? Le véhicule va-t-il durer dans le temps? Outre la réputation d’une marque, le consommateur peut-il estimer lui-même la pérennité de son futur moyen de transport? “On peut commencer par se renseigner sur le châssis d’un camion, par exemple, demander si l’équipement intérieur est indépendant de la caisse extérieure – ce qui évite les éventuelles déformations ou fissures de la paroi extérieure quand la paroi intérieure subit des chocs –, si les parois sont renforcées et capitonnées, s’il y a un blindage pensé pour les coups de sabot (assuré dans le cas de l’entreprise Paillard par un com- plexe amortissant à base de caoutchouc, de bois et d’acier, ndlr) ou alors s’il y a un doublage et une étanchéité des sols fournis avec des bondes de vidange, car l’eau et l’urine stagnantes peuvent à la longue occasionner des dégât”, conseille à ce propos Stéphane Paillard, fondateur et directeur de la carrosserie industrielle Paillard, spécialisée dans la construction de camions sur mesure depuis près de trente ans, établie à Bédée, en Bretagne, à une vingtaine de kilomètres de Rennes. “Il est aussi judicieux de noter si le pont d’embarquement a une pompe manuelle de secours ou a minima une ouverture d’urgence manuelle en cas d’incident ou accident, et si les raccords électriques sont bien protégés. Un pont qui ne s’ouvre pas, c’est un camion inutilisable; mieux vaut surveiller d’un œil particulièrement critique cette partie du véhicule! Enfin, il faudra penser à la présence d’éléments de sécurité indispensables tels que des caméras de surveillance et de recul, une alarme incendie et des extincteurs éventuellement automatiques.”
“La pérennité est notre maître mot. Dès le début, nous avons souhaité investir dans des camions construits pour durer, qui conserveront longtemps leur valeur, y compris sur le marché de l’occasion”, commente Sophie, des Vans Chardron, concepteur de véhicules pour chevaux depuis 1964, sis à Percy-en-Normandie, dans la région sus-nommée. “Chaque camion est réalisé de A à Z par une équipe de collaborateurs afin de conserver toujours la même qualité. Nous personnalisons complètement le véhicule selon le souhait de notre client; nous établissons dès lors un dialogue constant avec ce dernier. Nous sommes là pour être à l’écoute, répondre aux questionnements, conseiller si nécessaire. Il ne faut pas oublier que notre secteur est originellement un travail artisanal, qui répond à une commande et, dans notre cas, à des mesures totalement personnalisées. Il y a donc un amour du travail bien fait et des matériaux rigoureusement sélectionnés pour le confort en respectant la morphologie du cheval. L’aménagement intérieur a été conçu et étudié pour que le cheval ressente le moins possible de vibrations et nuisances sonores afin d’apporter un vrai bien-être lors du transport. Un camion ainsi robuste absorbera le plus possible les chocs en cas d’accident, mais il faut malgré tout penser aux sorties de secours. Tous nos modèles en sont équipés.” La pérennité du véhicule routier se juge enfin aussi par l’entretien qui est porté à son ensemble: désinfections et nettoyages réguliers de la partie destinée aux chevaux, contrôle de l’état des fixations des bat-flancs et des joints, graissage des axes, entretien régulier de la carrosserie et de la mécanique, stockage à l’abri, etc. “Un suivi simple et fréquent permet d’optimiser la durée de vie de tout matériel. Le faire réparer sans attendre si besoin est indispensable pour aller dans ce sens”, conclut Stéphane Paillard.
Le marche de l’occasion
Selon un questionnaire effectué par GRANDPRIX auprès d’un panel de lecteurs en avril dernier, 33% des sondés ont acheté du neuf, 45% ont acheté un véhicule d’occasion à un particulier, et enfin 22% ont acheté un véhicule d’occasion auprès d’un professionnel. Ce dernier chiffre est compréhensible, du fait que les concepteurs produisent exclusivement du neuf. Néanmoins, certains mettent à profit leurs compétences et carnets d’adresses pour aider à l’estimation et à la revente d’un véhicule d’occasion. “Le marché de l’occasion se porte très bien actuellement; il y a souvent plus de demandes que d’offres”, relève Olivier Theault, président du constructeur Manche Techni Metal (MTM), installé à Avranches, dans la Manche, et établi sur le marché équestre depuis près de vingt ans. “L’achat d’occasion séduit car il ne nécessite pas de délai de construction, contrairement au neuf, et demande un budget moindre. Cependant, l’écart entre le prix du neuf et de l’occasion a tendance à se réduire, en particulier pour les véhicules récents qui ne restent jamais longtemps sur le marché. S’il est désormais plutôt aisé de contrôler l’entretien de la partie mécanique d’un véhicule grâce à la traçabilité établie par le réseau français de garagistes et réparateurs, contrôler l’état de la carrosserie requiert cependant une expertise. Attention, car il existe d’ailleurs encore malheureusement quelques cas de carrosseries “maquillées” par des personnes peu scrupuleuses, et cela se termine au mieux en poursuites judiciaires et au pire en grave accident! Seul un constructeur saura évaluer précisément l’état d’une carrosserie, que ce soit la sienne ou celle de ses confrères.” MTM propose à ce sujet une catégorie véhicules d’occasions dans laquelle chaque véhicule en vente a été examiné avec soin par l’équipe. “Nous avons une grande clientèle de professionnels qui renouvèlent régulièrement leur flotte et souhaitent ainsi vendre leurs anciens véhicules. Nous les vérifions, estimons et les proposons à la vente via notre site. Acheter d’occasion peut être attractif mais il ne faut pas lésiner sur l’exigence d’une bonne carrosserie et, en cas de doute, se tourner vers du neuf”, conclut Olivier Theault.
“Le marché de l’occasion est en effet en plein essor. Aujourd’hui, l’entrée de gamme pour un van neuf se situe autour de 6000 euros, et nombreux sont les acheteurs ayant un budget moins conséquent”, enchérit Marie-Pierre Boury, chargée de communication du constructeur Cheval Liberté, leader français du secteur vans. “Cet accroissement est appuyé par deux facteurs, la récente augmentation du prix du neuf en raison de la hausse du cours des matières premières et la tendance actuelle de la seconde main. En l’absence de compteur kilométrique et de contrôle technique imposé, il est préférable de s’adresser à un professionnel pour effectuer un diagnostic complet de l’état du van.” Un van peut parfois être immobilisé pendant une période plus ou moins longue et s’user et se gripper. Un entretien annuel et un check-up complet en cas de revente sont dès lors nécessaires. “Certaines pièces et accessoires comme les sols caoutchouc, les pneus, la tête d’attelage, et l’électricité peuvent présenter des usures classiques et doivent être changées. Cheval Liberté regroupe à ce propos sur sa boutique en ligne une large offre de pièces détachées concernant la carrosserie, le freinage, l’électricité, les accessoires de quincaillerie, etc. expédiées très rapidement sur l’ensemble du territoire”, reprend Marie-Pierre Boury. “Un van bien entretenu est gage de sécurité et de confort pour les chevaux comme pour le conducteur mais également un argument intéressant s’il s’agit de le revendre. À la revente, un van perd l’équivalent de la TVA la première année d’utilisation, ensuite il se déprécie peu et lentement. Seul son état général et la qualité des options proposées détermineront le prix. Les professionnels de la remorque du réseau de revendeurs sont en mesure d’estimer la valeur de reprise pour repartir sur un van neuf. Il est aussi intéressant de changer son van régulièrement pour profiter des dernières innovations en matière d’équipement et de matériaux. Et pourquoi pas le financer sur plusieurs mois, comme le propose aussi le réseau Cheval Liberté.”
Le marché des transports en 2021
Le marché des transports semble connaître un rebond après une interruption en 2020, causée par la pandémie de Covid-19. Plusieurs acteurs du secteur ont accepté de partager leurs connaissances sur les habitudes de consommation des équitants de cette année et leurs réflexions sur l’avenir des transports, à l’instar de Jérôme Verdier, représentant de la marque française Fautras, établie à Montcaret, en Dordogne, une des leaders du marché. “Les salons sont une bonne occasion pour rencontrer un large public et faire le point sur l’état de santé du marché”, note-t-il, interrogé après l’événement Longines Equita Lyon en octobre dernier. “Les professionnels y sont présents en début de semaine, et les amateurs le week-end. Ces derniers sont généralement bien renseignés sur les produits et les permis nécessaires, mais il y a encore un flou sur la capacité de traction de leur véhicule. En outre, l’arrivée des véhicules hybrides ou complètement électriques tend à faire baisser la capacité de traction, à l’heure actuelle moindre que celle procurée par le diesel, ce qui impacte forcément le poids autorisé à tracter. Bien que les vans deux places aient toujours la cote – notamment les obliques à deux, trois et quatre places, qui représentent quasiment 50% des ventes durant le salon Longines Equita Lyon –, nous constatons que les vans d’une place à une place et demie sont plébiscités dans les zones plus urbaines, où les véhicules sont généralement moins puissants et déjà électriques. En règle générale, le budget semble moins un frein, ou du moins a été mieux anticipé. Les attentes se concentrent davantage sur le confort du cheval et celui à l’usage. Enfin, le made in France est un avantage auquel les clients semblent encore plus sensibles cette année.”
“La concordance entre le poids tracté et la puissance du véhicule demande encore des éclaircissements pour certains consommateurs, en effet”, enchérit Anne-Claude Ja- nichon, responsable commerciale de la société Vans Laissac, basée à Laissac-Sévérac-l’Église, dans l’Aveyron, et également distributrice des vans Cheval Liberté. “Les normes anti-pollution réduisent souvent la puissance du moteur et donc le PTRA, et ce dernier n’est pas négociable! Rouler avec une voiture trop peu puissante pour une remorque est non seulement illégal mais également un facteur d’accident car le véhicule va louvoyer. Il reste la solution d’acheter un véhicule plus puissant et de monter dans la gamme des permis. Si les B96 et BE sont désormais bien connus pour tracter une remorque, le C1 est assez peu représenté. Il est pourtant intéressant car il permet de conduire un poids lourd (PL) dont le PTAC est compris entre 3 500 kg et 7 500 kg et auquel peut être attelé une remorque de moins de 750 kg. Pour ceux qui ne peuvent ou ne veulent pas dépasser le permis B, il existe néanmoins des solutions pour alléger les remorques via des matériaux légers, tels que l’aluminium ou des matières innovantes, comme des panneaux en nid d’abeilles. C’est notamment le cas de l’un de nos modèles, un van deux chevaux avec un home-car qui peut être immatriculé en 2 500 kg ou 3 000 kg en fonction du véhicule tracteur, et qui offre dès lors une charge utile de 840kg ou 1340kg. Il n’y a pas de vérité universelle, en résumé, car la même solution conviendra à un couple et pas à un autre, en fonction de leurs préférences et passé respectif.”
“Il est vrai que la question du moteur est encore à discuter. Cela conditionne tout de même la base du véhicule”, entame en conclusion Rémi Batut, distributeur français de la marque anglaise Bloomfields, établie à Quint-Fonsegrives, en Occitanie. “Le nombre de places requis pèse également dans la balance. La tendance actuelle recherche plutôt un véhicule deux chevaux avec cinq places assises, ce qui oblige à rallonger le châssis et prendre 350kg sur la charge utile. Avec cinq passagers, deux chevaux, ajoutés au matériel, il est quasiment impossible de rester dans le poids total, excepté si l’on table sur un transport de poneys et d’enfants. Le contrôle policier du poids du véhicule tend à s’accroître, y compris à la sortie de petits concours régionaux, tout comme les vérifications de carte grise d’origine bétaillère, désormais nécessaire à tout véhicule qui transporte des animaux. Il est important de sensibiliser le consommateur à l’adéquation entre poids, capacité et limites. Le budget est également à bien anticiper car, au final, il y a assez peu de marge et le prix affiché à la vente correspond dès lors à la qualité des produits! Il est néanmoins agréable de souligner que le bien-être du cheval est de plus en plus pris en compte, ce qu’on ne peut que féliciter.”
Cet article est paru dans le dernier numéro du magazine GRANDPRIX.