“Après cette seconde annulation, la meilleure thérapie consiste à rebondir en vue de 2023”, Sabine Zaegel

En cette première semaine de février, les regards du monde équestre auraient dû se braquer sur le Jumping international de Bordeaux, traditionnel premier grand événement français du calendrier. Hélas, ce beau rendez-vous sportif, commercial, agricole et populaire a été annulé pour la deuxième année consécutive, au même titre que les étapes de la Coupe du monde Longines programmées à Helsinki, Stuttgart, Malines, Bâle, Amsterdam et Göteborg, en raison des incertitudes sanitaires liées à la cinquième vague de Covid-19. Sabine Zaegel, directrice du Jumping au sein de Congrès et expositions de Bordeaux (CEB), évoque l’ensemble des contraintes qui ont provoqué cette difficile décision, et se fixe pour objectif d’organiser “une très belle fête du sport et du cheval” du 2 au 5 février 2023.



Au-delà des soubresauts de la pandémie de Covid-19, avec toutes ses conséquences sanitaires, le calendrier de prise de décision du Gouvernement n’a vraiment pas été favorable aux organisateurs d’événements prévus début février…

Effectivement, c’est le pire calendrier que nous pouvions espérer, dans la mesure où nous savions que les annonces effectuées le 27 décembre par le Premier ministre (Jean Castex, ndlr) allaient nous contraindre jusqu’à deux semaines de notre événement. Durant le dernier mois de production, beaucoup d’éléments doivent se concrétiser. L’ampleur de nos engagements financiers se déclenchent véritablement à ce moment. Dès lors, nous ne pouvions pas attendre le 20 janvier pour prendre notre décision…

Vous avez eu affaire à une préfecture compréhensive, mais qui n’a pas pu prendre d’engagements quant aux mesures qu’allaient prendre l’État… 

Effectivement, je tiens à souligner nous avons été entourés d’énormément de bienveillance, de la part des pouvoirs publics comme de tous les acteurs de notre filière et de nos clients, exposants, partenaires et visiteurs, qui ont été très patients durant cette période d’incertitude. Vis-à-vis de la préfecture, à partir du 27 décembre, nous nous sommes démenés à trouver toutes les solutions permettant d’adapter autant que possible notre événement aux contraintes sanitaires. Nous étions alors soumis à une jauge de 2.000 personnes, ce qui était véritablement contraignant. Les conséquences financières du maintien de notre événement auraient été très lourdes. D’habitude, nous en réunissons jusqu’à 8.000 en même temps. Nos tribunes et loges installées en bord de piste comptent précisément 7.600 places, et le Jumping de Bordeaux fait généralement salle comble durant tout le week-end. D’une part, il y aurait donc eu un impact immédiat sur la billetterie. D’autre part, même si les foires et salons n’étaient pas soumis à une jauge, notre Salon du cheval n’aurait pas été du même niveau que d’habitude. Il s’agissait donc d’un impact financier à double détente.

Nous nous préparions d’ailleurs à une très belle édition, d’autant que les préventes affichaient une avance de 20% par rapport à d’habitude, ce qui traduit l’attachement du public au Jumping international de Bordeaux. Nous espérons désormais le retrouver dans le même état d’esprit pour la prochaine édition. 

En début d’année, vous avez envisagé un report en mars, qui a redonné de l’espoir à bien des acteurs de la filière. Pourquoi n’avez-vous finalement pas pu le faire? 

Il y avait deux options de report à l’étude: le premier et le dernier week-end de mars. Cependant, comme la jauge de 2.000 spectateurs n’impactait que les événements sportifs, les spectacles et les congrès, et que tous les salons et foires en ont immédiatement été exemptés, toutes les réservations du Parc des expositions de Bordeaux pour de salons prévus en mars ont été maintenues. Cela nous a confronté à des problèmes logistiques, liés aux temps de montage et de démontage que nécessite un tel événement, qu’il s’agisse des pistes, des tribunes, des loges et des boxes. Nous partons toujours d’une page blanche, et certains délais sont incompressibles. Par exemple, on ne peut pas installer une piste de la qualité nécessaire la veille de la première épreuve. Globalement, pour les deux options de report envisagées, il nous manquait quelques jours décisifs. En travaillant en étroite collaboration avec toutes les équipes de CEB, y compris son directeur général (Stéphane Kintzig, ndlr), nous avons tout fait pour nous adapter, pour tenter de déplacer certains événements ou modifier leur configuration, mais cela n’a malheureusement pas été possible… Dans ces négociations, il y avait des points positifs mais aussi des points bloquants. À un moment donné, il faut savoir rendre les armes.

Nous remercions la préfecture, qui s’est montrée très compréhensive, ainsi que la Fédération équestre internationale, qui avait répondu positivement à notre demande de report, et la Fédération française d’équitation, qui a été particulièrement réactive et bienveillante à notre égard.



“L’organisation d’une finale nous poserait une vraie question de calendrier”

Combien de personnes œuvrent à l’organisation du Jumping international de Bordeaux de façon permanente?

Une dizaine de personnes, dont je fais partie, sont directement associées à l’organisation de l’événement. Le dernier mois, d’autres équipes de CEB interviennent dans des domaines de compétences tels que le contrôle, la sécurité, la billetterie, etc. Au-delà de la déception de nos équipes, je mesure bien évidemment la déception de nos cavaliers, meneurs et tous ceux qui les entourent, mais aussi de nos exposants et visiteurs. Face à cette déception, la meilleure thérapie consiste à rebondir en vue 2023. De fait, nous travaillons déjà avec un temps d’avance pour cette prochaine édition.

Dans un contexte de crise sanitaire sans précédent, malgré les conséquences de cette seconde annulation, le fait d’être organisé par un acteur de l’envergure de CEB ne constitue-t-il pas une chance pour le Jumping?

Depuis mars 2020, les activités de CEB sont particulièrement ciblées puisque que notre métier consiste à réunir nos publics, professionnels et grand public. Toutes les expériences virtuelles que nous organisons représentent de nouveaux champs d’exploration, mais notre vocation première reste de nous réunir en présentiel. La précédente levée des jauges, en juillet dernier, nous avait permis d’envisager l’organisation de cette édition 2022 avec beaucoup de confiance. Nous n’imaginions pas que la cinquième vague de cette pandémie, si soudaine et forte, conduirait à une nouvelle annulation. Alors certes, avoir des activités plurielles est une chance qui nous permet d’envisager l’avenir de notre événement, mais les deux années écoulées nous ont posé bien des défis.

Organiser une finale à Bordeaux fait-il toujours partie des réflexions de CEB, à moyen ou long terme? 

L’organisation d’une finale poserait une vraie question de calendrier. Le Jumping de Bordeaux est organisé en février de 1996, car cela correspond bien avec le programme des événements de CEB et convient parfaitement à notre public. Quant à la finale, elle intervient très tardivement dans le calendrier européen, après une rupture entre la saisonindoor et les concours extérieurs, qui fleurissent notamment dans le sud de l’Europe. Nous devons penser à notre public, qui n’a pas forcément envie de s’enfermer dans un hall pour un événement organisé en avril. La date a été avancée de la deuxième à la première quinzaine d’avril, ce qui est déjà positif, mais il faudrait encore l’anticiper d’un mois pour que nous puissions nous positionner. Pour cela, cette question devrait être prise en considération par la FEI et les parties prenantes de notre sport.