La sécurité à travers vos expériences (1/2)
Indispensables, optionnels, dispendieux, protecteurs, incommodants… Les équipements de protection individuelle (EPI) en équitation sont à l’aune de chacun. En ai-je besoin? Quelle est la nature du risque? Suis-je libre de mes mouvements? Puis-je m’en permettre l’achat? Plus de huit cents lecteurs de GRANDPRIX ont accepté de répondre à un sondage en ligne concernant la sécurité à cheval. Si le casque est désormais considéré comme primordial, les gilets de protection et airbags, ainsi que les étriers de sécurité, n’ont pas (encore?) ce même statut.
“Mon rapport à la protection? Bonne question!” Le sentiment de devoir être protégé à cheval a largement évolué ces dernières décennies. Des enfants qui montent cheveux au vent, en sandalettes, à cru dans les champs, il n’en existe plus. Des adultes qui choisissent d’assumer tous les risques liés à l’équitation quitte à les outrepasser, il en existe moins. Les cavaliers de loisir et de compétition vissent (presque) tous un casque sur leur tête, désormais, et son absence pose un problème moral. D’ailleurs, sur les réseaux sociaux, très rares sont aujourd’hui les équitants à publier des clichés d’eux-mêmes sans bombe sur la tête, au risque de se faire réprimander par les internautes! Les gilets de protection thoraciques, plus récents, ont gagné du terrain dans l’esprit des cavaliers, talonnés de près par les étriers de sécurité. Entre sentiment de besoin, neutralité et ressentiment, les lecteurs ont choisi de se dévoiler au sein d’un sondage en ligne effectué en mars en partenariat avec Horse Development, agence de conseil en marketing et en stratégie spécialisée dans le monde du cheval.
LE CASQUE, POUR UN PORT OCCASIONNEL OU SYSTÉMATIQUE?
Au sein du panel de sondage effectué par GRANDPRIX et Horse Development, auquel plus de huit cents personnes ont répondu, 93% des cavaliers mettent systématiquement leur casque dès qu’ils montent à cheval. Les 7% qui ne l’utilisent pas du tout ou de manière occasionnelle –monte d’un jeune cheval, séance de saut, alternance de travail à pied et monté, sortie en concours, etc.– le font par habitude ou par évaluation personnelle d’une absence de risque. Si l’appréciation de celui-ci est propre à chacun, il est tout de même important de rappeler qu’une fracture du crâne ou une commotion cérébrale sont de graves blessures, pouvant même souvent entraîner la mort. Organe fragile s’il en est, le cerveau baigne dans le liquide céphalo-rachidien, dont l’une des fonctions est d’assurer une protection mécanique en absorbant et amortissant les mouvements ou les chocs. Si le choc et/ou le mouvement dépassent les capacités de protection du cerveau, ce dernier entre en collision contre la boîte crânienne, ce qui peut endommager le tissu cérébral et engendrer des lésions plus ou moins graves. En outre, ce violent choc peut faire éclater des vaisseaux sanguins et entraîner une hémorragie cérébrale. Par mécanisme de protection, le cerveau diminue souvent ses fonctions: la victime présente alors des troubles de la vue, de la coordination, des maux de tête, des nausées, etc. Seule solution possible: une hospitalisation au plus vite! Constitué de deux couches de protection minimum, le casque d’équitation est ainsi notre liquide céphalo-rachidien supplémentaire et assure une protection salutaire. Le port du casque est à ce jour très ancré en Europe –et particulièrement dans les pays du Nord– et, désormais, le non-port choque l’opinion publique et est vu comme une prise de risque inconsidérée. Les professionnels sont moins nombreux à porter systématiquement une bombe (88%, dans notre panel de sondage), ce qui est souvent déploré par les cavaliers amateurs qui souhaiteraient que ces derniers donnent l’exemple en matière de bonne conduite. Il est à noter que certains cavaliers professionnels restent réfractaires au port du casque au sein de leur installation, même s’ils disposent d’un contrat de sponsoring avec une marque de casque haut de gamme.
LE PRIX DU CASQUE : UN FREIN AU RENOUVELLEMENT
Les casques sont les équipements de sécurité qui connaissent la plus forte variation de prix, passant d’une trentaine d’euros à mille euros et plus. Les lecteurs de notre sondage ont indiqué, quant à eux, un achat de 337 euros en moyenne par casque. Il est à noter que les cavaliers de meilleur niveau sont également ceux qui investissent le plus; un temps plus long passé à cheval, une recherche de confort et d’esthétisme, une prise de risque plus grande, etc., les raisons sont multiples. “Les casques ont de très grandes différences de prix, sans que l’on sache si cela est justifié en termes de sécurité”, s’interroge Lucie. En effet, tous les concepteurs sont unanimes: quel que soit son prix, un casque ayant violemment touché le sol est caduc. Si, dans de rares cas, le produit est réparable par la marque, la très large majorité, pour ne pas dire la quasi-unanimité, des casques choqués connaît la même fin de vie: le rebut! Si la notion de renouvellement après une chute est connue par la majorité des équitants, elle n’est, pour autant, pas forcément appliquée. Ainsi, seuls 64% des répondants ont déjà changé ou ont prévu de changer leur casque à la suite d’une chute. Pour le pourcentage restant, le prix du casque et/ou l’estimation d’une absence de détérioration sont les arguments avancés en faveur d’un non renouvellement.
LE NON PORT DU CASQUE EST AUJOURD’HUI VU COMME UNE PRISE DE RISQUE INCONSIDÉRÉE
“Dans le secteur de la moto et dans tous les autres sports en général, les pratiquants ont la notion de renouvellement d’un casque chevillée au corps”, introduit une responsable produit et marketing d’une grande marque de casques travaillant dans les secteurs de la moto et de l’équitation. Contrairement aux autres sports, notamment les sports mécaniques, est-ce parce que les cavaliers tombent souvent sur du sable et ne voient pas, de fait, de gros dégâts sur leur casque? “La calotte est la partie externe du produit. Elle a pour rôle de disperser l’onde de choc sur la surface de celui-ci. Certaines calottes sont en matériaux très résistants aux rayures et peuvent avoir subi un choc sans en montrer les traces, ce qui peut fausser le sentiment de sécurité de l’utilisateur. La coque intérieure, le calotin, est celle qui va absorber l’énergie en se rétractant. C’est elle qui montrera systématiquement l’endroit et la puissance du choc! Elle n’est pas toujours, visible par l’utilisateur, à moins de découper le casque. Un calotin choqué est, dans tous les cas, non réparable.” Quelles solutions pour cette problématique? Pour Barbara, l’une des sondées, la clé est d’avoir deux casques qu’elle porte en alternance, l’un de grande marque et l’autre provenant d’une entrée de gamme, afin de diviser par deux l’usure et le risque de choquer le casque onéreux. Certaines marques proposent de changer la calotte et le calotin de leurs modèles, sous conditions. “À la demande des clients, nous avons développé un service après-vente de réparation pour nos casques”, reprend la même responsable marketing produit. “Nous pouvons changer (une seule fois, ndlr) la calotte et le calotin. Il est toutefois fortement conseillé de changer son casque après une chute, comme le recommande la norme et le règlement européens sur les équipements de protection individuelle. Si le casque est tombé de vos mains sur le sol, par exemple, il n’y a, a priori, pas de dommage. Néanmoins, si la hauteur est supérieure et le sol dur à la réception, attention! La réparation des casques ayant subi un choc est soumise à des réglementations strictes. Ces dernières seront faites dans le cadre des normes de sécurité, dans le même atelier qui aura produit le casque et suivant un procédé de production identique.”
NORME ET DURÉE DE VIE D’UN CASQUE, EST-ON ASSEZ INFORMÉ?
Tous les fabricants avancent une durée de vie de cinq ans hors chute pour leurs casques, à moduler au cas par cas (utilisation quotidienne, températures extrêmes, manque de soin et de nettoyage, etc.). Environ la moitié des lecteurs sondés (48%) estime qu’un casque est conseillé pour une durée de vie de trois ans ou moins. Toutefois, 37% ne savent pas se prononcer. “Marquer une validité de péremption est une obligation. Les cavaliers professionnels changent en moyenne leur casque annuellement ou tous les deux ans, par exemple. Pour les cavaliers moins assidus, attention aux UV et aux différences extrêmes de températures, qui fragilisent les colles et les composants et font vieillir le casque plus rapidement”, poursuit la responsable marketing.
La norme publiée et harmonisée en fin d’année 2023 est la CE EN 1384.2023. Elle remplace la norme de sécurité de 2017, mais cette dernière est encore valable durant plusieurs années, en conformité avec les certificats de validité. Beaucoup de lecteurs sondés ne prennent pas en compte le respect de la norme de sécurité européenne, s’appuyant – à juste titre – sur l’autorisation de mise sur le marché d’un équipement de protection individuelle (EPI). Néanmoins, beaucoup ne comprennent pas non plus la différence de prix et de sécurité entre les différents modèles. Qu’en est-il de la technologie MIPS, très répandue aux États-Unis mais peu en France? Comment la norme est-elle respectée malgré les différents matériaux présents sur le marché –carbone, Kevlar, ABS (plastique acrylonitrile/buta diène/styrène), etc.? Plusieurs sondés indiquent rencontrer des difficultés à choisir leur casque sur le seul plan de la sécurité. Pour Constance, la norme européenne permet de se délester de ce critère : “Les casques doivent répondre à des normes particulières pour être mis sur le marché. Je fais donc confiance aux marques reconnues et me fie aux innovations en termes de légèreté, d’aération et d’adaptation, ainsi qu’au confort général.” Un sentiment partagé par Marie: “Il faut que le casque reste bien fixé à la tête, qu’il ne puisse pas basculer dans une position qui vulnérabilise des zones clés et il doit donc bien s’adapter à la tête du cavalier, avec les réglages adéquats. Les normes sont supposées se charger du reste.” D’autres lecteurs portent un oeil plus critique sur les normes et aimeraient davantage d’explications de la part des marques, à l’instar de Juliette: “Choisir un casque pour sa sécurité me paraît difficile. Les principales études sur leur efficacité sont difficilement trouvables sur internet et, en outre, uniquement en anglais, avec des termes bien spécifiques.”“Je ne sais pas vraiment quoi regarder, ni quoi comparer. On ne sait pas quels sont les éléments classiques de sécurité et quels sont les ajouts qui pourraient justifier un prix plus élevé”, résume Noémie.